22/02/09 (B487) FreeDjibouti -> Pourquoi les partis d’opposition djiboutienne s’enlisent-ils ?

Au moment de coucher la première lettre de cet article, je voudrais avoir une pensée profonde pour toutes les djiboutiennes et tous les djiboutiens qui ont perdu leurs vies tout au long de notre long processus de démocratisation, pour que vive la démocratie à Djibouti.

Que la terre de nos aïeux leur soit légère !

Le combat pour l’Etat de droit et la démocratie contre la dictature de Guelleh, à la demande spontanée des forces vives de notre pays, se retrouve aujourd’hui dans une situation d’enlisement après 18 années de lutte sans alternance politique.

Les erreurs d’appréciation répétitives de la part des Etats-major des partis politiques de l’opposition djiboutienne, qui sont systématiquement reconduites lors des grands rendez-vous électoraux, expliquent en grande partie cet enlisement du combat démocratique auquel il faut ajouter l’usure des leaders qui incarnent cet échec politique.

L’érection d’un front commun contre l’oppresseur, qui devrait être une organisation commune regroupant tous les leaders et personnalités des diverses formations politiques pour échanger, analyser et harmoniser une stratégie globale dont le but serait la fin du système mafieux ; elle fait cruellement défaut dans le dispositif actuel de l’opposition.

Il parait important qu’après une si longue période de dictature, les forces démocratiques s’attachent à mettre en place des institutions démocratiques et à assurer leur fonctionnement d’une manière transparente, avant de songer à mesurer leurs réelles forces politiques dans les urnes lors des élections générales.

De plus, un des facteurs décisifs qui n’a pas fait l’objet d’une stratégie élaborée de la part de l’opposition djiboutienne, est d’avoir joué contre l’émergence d’une société civile solidaire et des groupes d’intérêt national tels que les forces syndicales et associatives pour relayer les exigences sociales nécessaires en vue de renforcer l’action politique des partis de l’opposition démocratique.

Il convient de tirer une première conclusion du fait qu’en l’absence d’une stratégie de front commun des partis politiques de l’opposition démocratique djiboutienne (toute tribu confondu) pour en finir avec la dictature-mafieuse, nos leaders n’étaient pas en situation de penser et rédiger une plate-forme commune de transition indispensable en vue d’implanter la démocratie et l’Etat de droit à Djibouti.

Il est évident qu’ils n’ont pas pensé non plus, à la nécessité d’une telle transition postulée comme une étape décisive et incontournable pour l’enracinement de la démocratie avant d’arriver aux élections générales qui devraient les départager.

Les partis politiques de l’opposition démocratique djiboutienne sont en situation d’enlisement après 18 années de lutte sans alternance politique, parce qu’ils se retrouvent dans l’entonnoir face à Guelleh. Cela est dû au fonctionnement archaïque de ces partis politiques d’opposition qui cherchent à obtenir le pouvoir sans aucune organisation technique concrète.

Quels sont les modes de fonctionnement des partis politiques de l’opposition démocratique à Djibouti et à l’extérieur ?

Les partis politiques de l’opposition démocratique qui prétendent incarner l’alternance face à la dictature Guelleh, n’ont rien de démocratique en ce qui concerne leur mode de fonctionnement interne.

A Djibouti, les partis politiques présentent des candidats aux élections législatives et présidentielles pour différents mandats publics sur la base des idéologies des plates-formes des partis, le soutien aux candidats pour ces élections ne se fait souvent pas sur l’idéologie ou les plates-formes politiques mais sur la base d’appartenances ethniques, tribales et régionales.

A Djibouti, l’appartenance à la tribu ou à l’ethnie, si on la compare à l’appartenance aux partis politiques qui interviennent dans des systèmes politiques basés sur l’idéologie et les plates-formes des partis politiques, semble inspirer un plus grand degré de loyauté. Ceci a pour conséquences le népotisme, la corruption, les guerres ethniques, l’accaparement des fonctions ministérielles et du pouvoir, et la marginalisation des minorités. Même lorsqu’on a recours aux partis, le soutien politique qu’ils recueillent tend à s’appuyer plus sur l’appartenance ethnique que sur l’idéologie.

Ce « facteur de loyauté » a privé les partis politiques intervenant dans les organes législatifs de la discipline et de la loyauté dont ils ont besoin pour fonctionner efficacement. Au sein des partis politiques, les regroupements ethniques tendent à s’imposer, au détriment des politiciens qui ont les meilleures idées ou les meilleurs compétences pour diriger.

Cette réalité engendre des conflits d’intérêt.

Un politicien se retrouve souvent en situation d’avoir à choisir entre ce qui est le mieux pour la région et le groupe ethnique auxquels il s’identifie, et la plateforme du parti politique. Sa loyauté à sa tribu ou à son groupe ethnique risque de ne pas lui donner une place dans le parti politique. Néanmoins, ce sont le plus souvent la région et la tribu dont le politicien est issu qui l’ont porté à sa fonction législative.

Sur la scène politique djiboutienne, deux groupes ethniques (Issas, Afars) dominent généralement les partis politiques, la «position de parti » se résume à être une manière de favoriser les intérêts du groupe ethnique dominant plutôt qu’une idéologie particulière ou l’intérêt de la population en général. La majorité des partis de l’opposition fonctionnent de cette manière d’où une grande contradiction par rapport à leurs programmes.

Quand on lutte pour l’avènement de l’Etat de droit et la démocratie face au totalitarisme, il convient de mettre en place des structures et la pratique démocratique au sein des partis de masse afin d’ouvrir en permanence les débats d’idées qui engagent les grandes orientations et décisions du parti, dès lors qu’elles sont sanctionnées par le vote des militants ou des commissions habilitées : cela s’appelle la transparence.

Les partis politiques de l’opposition démocratiques s’enlisent parce qu’il n’existe pas dans leur structure propre de fonctionnement, des parlements internes.

Au sein de ces institutions internes toute puissantes, doivent se dérouler en toute transparence les débats qui engagent la vie du parti, l’élaboration des stratégies électorales, le choix des candidats qui représentent le parti, l’organisation des primaires, la collecte des fonds, la question du financement etc.

Au sein des partis politiques de l’opposition djiboutienne, quelles sont les institutions de veilles stratégiques pouvant alerter un leader politique lors d’une décision arbitraire pour le raisonner sur la nécessité de changer de tactique ?

Aucune.

Qui peut parler aux leaders politiques de l’opposition djiboutienne qui savent et connaissent tout au grand mépris des militants qui sont des hommes et des femmes braves qui constituent les forces vives du parti ?

Cet enlisement des forces démocratiques s’explique naturellement par le fait qu’il est contre-productif de vouloir incarner l’Etat de droit et la démocratie en érigeant autant qu’en fait IOG, l’arbitraire comme mode de fonctionnement des partis de l’opposition.

Après 18 années de lutte soldée par l’enlisement des forces démocratiques à Djibouti, il convient de conclure qu’il revient aux leaders nouveaux, et une génération nouvelle de prendre la relève par d’autres méthodes, visions, fonctionnements et pratiques démocratiques.

D’une génération à l’autre, les buts restent souvent les mêmes, mais les approches et méthodes changent. L’espoir d’une innovation est nécessaire pour galvaniser et propulser la lutte pour l’alternance politique à Djibouti.

La diaspora sera certainement au cœur de ce nouveau souffle, c’est-à-dire la recomposition du paysage politique national.

FreeDjibouti

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