12/05/09 (B498) Le Journal de la Flibuste … Fond de polémique sur une éventuelle « taupe » qui, depuis Londres, pourrait renseigner les pirates sur les mouvements de navire … (3 articles)

___________________________ 3 – Portail des sous-marins

Pirates somaliens : un autre "début de la fin" ?

Par Rédacteur en chef.

Une source généralement fiable indique que 2 dirigeants de groupes de pirates somaliens (qui ont effectué à eux deux au moins 30 détournements) sont sous pression de la part des Tribunaux Islamiques pour stopper toutes les attaques d’ici la fin du mois, lorsque la mousson ralentit habituellement les activités des pirates.

Ces "chefs de pirates" ont été avertis que l’absence de coopération et la poursuite des attaques conduiraient à de sérieuses sanctions — y compris la menace d’être tué.

De plus, il a été demandé aux mosquées du Puntland d’informer les fidèles féminines que les pirates amènent la honte sur la Somalie en volant en mer et que ce ne sont pas de bons Musulmans.

L’information que les chefs des pirates veulent des investissements structurels en Somalie en échange de l’arrêt des attaques — investissements pour l’avenir de la Somalie, comme dans l’amélioration de l’éducation.

Les Tribunaux Islamiques se sont montrés efficaces par le passé pour ralentir la piraterie. Il faut cependant voir si leurs efforts vont à nouveau se révéler efficaces. En Occident, on s’inquiète que les Tribunaux Islamiques soient trop proches des Talbans et qu’ils pourraient conduire la Somalie sur la voie de l’Afghanistan en tant que havre de paix pour al Qaeda ou d’autres groupes terroristes. L’Occident va devoir décider si une Somalie plus stable mérite de prendre le risque…

___________________________ 2 – Point de Bascule (Canada)

Somalie – Les pirates n’ont pas besoin d’une taupe à Londres pour repérer les navires

Il y en a encore qui croient que les pirates somaliens sont des sortes de Robins des mers, et que la finance islamique est une alternative éthique au capitalisme. Lisez : Golfe persique – Des millions provenant des rançons de la piraterie sont blanchis dans des banques islamiques

Guardian : Les pirates somaliens n’ont pas besoin d’une taupe à Londres pour repérer les navires

Un abonnement à la Lloyd’s List, un contact à Suez ou un espion dans les dépôts de ravitaillement aux Émirats arabes unis aident à repérer la position d’un navire.

Vous n’avez pas besoin d’avoir un esprit criminel tordu pour trouver l’emplacement exact d’un cargo chargé d’une précieuse cargaison à un moment précis.

Si les rapports en provenance de l’Espagne sont exacts, et que les pirates somaliens ont un contact à Londres qui leur fournit des renseignements précis permettant de cibler les pétroliers à détourner, il se pourrait qu’ils aient développé un initié chez les courtiers maritimes de Londres.

C’est parce que, chaque lundi, les courtiers de Londres dressent une liste détaillant la position exacte de tous les pétroliers qui naviguent dans le monde. Cette tâche fastidieuse implique qu’il faille téléphoner à chaque propriétaire de navire, et elle est effectuée dans le but de permettre aux courtiers maritimes de déterminer le moment où un navire sera disponible.

Certains contestent toutefois l’allégation que des courtiers seraient de mèche avec les pirates. Une source dans le transport maritime a suggéré que les courtiers de Londres étaient « trop occupés et trop bien payés » pour faire affaires avec des pirates somaliens.

Un simple abonnement à la Lloyd’s List, le principal journal et site Internet du transport maritime, fournit une multitude d’informations sur l’emplacement d’un pétrolier.

Il y a également des moyens plus faciles de sélectionner un navire pour détournement. Selon des contacts dans le secteur du transport maritime, si vous voulez un cargo de grande valeur, le moyen le plus simple serait d’avoir un contact à Fujairah, l’un des sept émirats des Émirats arabes unis dans le Golfe persique, où les cargos chargés de pétrole se ravitaillent.

Ou encore, une taupe dans un bureau d’expédition du canal de Suez aurait accès à des renseignements sur les navires qui passent par le canal. Les navires réservent d’avance leur passage par le canal pour s’assurer qu’ils ne seront pas retardés. Un contact interne à Suez serait en mesure d’obtenir des informations sur la destination des pétroliers.

Londres est un centre mondial pour l’expédition. De nombreux groupes de transport maritime international y ont leur siège, y compris l’Organisation maritime internationale.

La bourse Baltique, un marché établi et auto-réglementé des courtiers maritimes pour le marché mondial, offre un marché en ligne pour les navires et les marchandises, un marché en temps réel de produits dérivés relatifs au fret, et des données sur le marché du fret.

La Lloyd’s Marine Intelligence Unit fournit des données instantanées au marché du transport maritime à partir de n’importe quel endroit dans le monde.

___________________________ 1 – Rue 89

Pirates somaliens : la France nage dans l’illégalité totale

Par Philippe Madelin

En examinant les textes, on ne relève aucune mention claire d’un tribunal compétent, ni d’incriminations spécifiques, ni d’une procédure précise qui permettent d’engager des poursuites.

Au cours de plusieurs expéditions successives menées par les forces françaises opérant dans le cadre de l’opération Atalante, ou sur mission spécifique du gouvernement, les marins et les commandos français ont donc intercepté une vingtaine de pirates, dont onze pour la dernière opération Nivôse. Ils sont actuellement incarcérés en France, dans les prisons de Rennes et de Fresnes.

D’un point de vue criminologique, ils apparaissent comme de « petites gens », pêcheurs côtiers, opérant par petits groupes indépendants dans le style des « grandes compagnies » du Moyen Age, aucune organisation criminelle de degré supérieur n’apparaît dans les enquêtes.

Ils sont emprisonnés, alors qu’aucune loi ne leur est vraiment applicable !

Seuls les tribunaux maritimes seraient compétents, ils ont été supprimés

Les actes de piraterie étaient réprimés par une loi 10 avril 1825, par une convention des Nations unies de 1982, dite de Montego Bay, et par différentes résolutions du Conseil de sécurité, 1816 et 1838 ; la résolution 1846 du 2 décembre 2008, confirme la détermination de la communauté internationale à lutter contre la piraterie en Somalie.

Co-parrainé par 19 pays, qui renouvellent pour un an l’autorisation de réprimer les actes de piraterie dans les eaux territoriales somaliennes, ce texte complète les dispositions du droit de la mer sur la lutte contre la piraterie en haute mer.

En vertu de la loi de 1825, seuls les tribunaux maritimes seraient compétents. Mais ces institutions ont été supprimées. Il y aurait un vide juridique assez étonnant. Selon la convention de Montego Bay, la juridiction compétente serait celle qui a pris la succession de tribunaux maritimes.

La Chancellerie reconnaît que la loi de 1825 n’étant toujours pas abrogée, aucun texte ne permet actuellement la transposition en droit moderne ni de la loi de 1825, ni de l’article 105 de la Convention de Montego Bay qui confie la répression aux tribunaux compétents, lesquels, pour le moment, ne sont pas déterminés !

Il y a urgence à établir un texte de loi

En clair, aucun texte ne permet de traiter les pirates et la piraterie. On ne peut pas tirer sur les embarcations montées par les pirates, on ne peut pas les arrêter ni les retenir. Comme on n’est pas en état de guerre avec la Somalie, on n’a pas le droit d’effectuer des tirs sur des véhicules ou des personnes circulant sur la terre ferme.

Or les marins et les commandos français ont :

tiré sur des embarcations hors des cas de légitime défense ;
tiré sur des véhicules circulant sur la terre ferme ;
retenus prisonniers les pirates qui ont été transférés en France.

Dans les milieux informés, on estime qu’il serait souhaitable, sinon indispensable qu’un texte de loi soit introduit, de façon à formaliser le droit français, sur cinq points :

transposition législative de l’article 105 de la convention de Montego Bay : définir quels tribunaux sont compétents pour juger toutes les affaires de piraterie et en quoi ils sont compétents.

définition des incriminations, telle que « association de malfaiteurs et complicité » ; ce texte pourrait s’inspirer du texte sur l’Association de malfaiteurs avec une mention « en relation avec une entreprise de piraterie ».

pour le moment, deux navires doivent être impliqués, un attaquant et un attaqué.

Mais quid quand la réplique est préventive, quand elle est menée par des scaphandriers ou des plongeurs, et surtout quand elle est menée à terre : en l’absence d’état de guerre, en principe il n’est pas possible de tirer sur des véhicules et/ou des personnes circulant sur un territoire étranger.

qui doit donner les ordres de tir visant des pirates revenus à terre ?

qui doit conduire la procédure ?

Le commandant du navire n’est pour le moment pas attributaire d’une quelconque capacité juridique. Ou bien il serait nécessaire qu’un OPJ soit embarqué pour légaliser les arrestations, ou bien que le commandant de bord se voie attribuer une compétence d’OPJ pour le cas particulier.

les conditions d’immobilisation des pirates à terre, puis de rétention à bord et de rapatriement sur la métropole ne sont pas déterminées actuellement.

Une loi sur la « force de mer » devrait régler toutes ces questions. Vaste programme. En attendant, pour le moment la situation des pirates interceptés relève de la plus complète illégalité. Plus exactement d’une totale absence de légalité, ce qui n’est pas mieux.