08/01/10 (B532) Nouvelles de Somalie. En raison des attaques multiples et des menaces islamistes, le PAM suspend son aide aux populations du sud de la Somalie, privant des centaines de milliers de personnes d’une aide vitale. (6 articles en Français)

______________________ 6 – Nouvel Obs avec Reuters

Onze morts dans des duels d’artillerie à Mogadiscio

Des tirs d’artillerie ont fait au moins onze morts à Mogadiscio, où des rebelles islamistes ont tiré au mortier sur le palais présidentiel, provoquant la riposte des forces gouvernementales, rapportent des témoins.

Les insurgés ont bombardé la Villa Somalia et les troupes gouvernementales ont répliqué en tirant notamment sur le quartier de Yaqchid, dans le nord de la capitale.

"Nous avons jusqu’ici récupéré onze morts et 34 blessés", a déclaré à Reuters Ali Muse, responsable des services d’ambulances de la ville. "Tous ont été atteints dans différents secteurs du nord de la capitale. Les tirs se poursuivent sporadiquement et on craint que le bilan ne s’alourdisse", a-t-il ajouté.

Abdi Cheikh et Abdi Gouled,
version française Guy Kerivel

______________________ 5 – Bruxelles 2 – Europe de la Défense

Mission de formation des militaires somaliens (Eutra): la dernière ligne… courbe ?

La programmation de la mission militaire de l’UE contribuant à la formation des forces de sécurité somalis (selon le nom officiel : "EU Military Mission to contribute to the training of Somali Security Forces") évolue lentement. Cela fait maintenant plus de six mois qu’on en discute au sein des groupes du travail ou du Comité politique et de sécurité (COPS). Le premier document mis en circulation date de début juillet ! Mais aucune décision définitive n’a toujours été prise. Les Européens peaufinent leurs plans ! Mais hésitent encore à s’engager dans une mission de nature bien différente…

Une décision en janvier ?

Une option stratégique a été adoptée au conseil des ministres de la Défense de novembre dernier, avec l’adoption d’un concept de gestion de crise (1). Et plusieurs MSO (options stratégiques militaires) ont été successivement discutées pour aiguiller le travail des militaires et planificateurs (2). L’Espagne a accepté le rôle de Nation-Cadre (3) et un planificateur a été désigné.

Mais le lancement officiel tarde.

Pour un proche de Catherine Ashton, la Haute représentante de l’UE à la politique étrangère, il n’y a pas d’ambiguité : "Le changement institutionnel a sans doute légèrement retardé la prise de décisions. Mais, très prochainement, une décision pourrait être prise". Peut-être dès le Conseil de janvier (le premier qui sera présidé dans le format "Traité de Lisbonne" par la Haute représentante), voire celui de février, selon certains avis, en tout cas avant le délai de mai 2010 avancé par certains diplomates d’Etats membres. Le COPS se réunit, vendredi, et a sur sa table ce dossier pour "déblayer" les derniers points difficiles. Et le groupe des diplomates peaufine un projet de décision du Conseil. La discussion est de plusieurs natures d’après le témoignage d’un expert du dossier.

Les questions qui restent en discussion

Une discussion est d’ordre politique : Faut-il ou non que les Européens s’engagent dans cette région du monde ? Faut-il une nouvelle mission PESD ?
Ne faut-il pas laisser plutôt la place à des actions bilatérales ? Dans cette discussion, on retrouve celui que j’appelle "l’hésitant historique" – le Royaume-Uni (4) -, mais aussi les Pays-Bas. Mais d’après un membre du COPS, si ces hésitations existent encore, d’autres problèmes plus "techniques" sont aussi évoqués.

Une autre façon d’évoquer des réticences politiques diront les pessimistes, le signe que la plupart des Européens sont entrés dans la discussion concrète, diront les optimistes. Il est aussi un fait qui ne peut être laissé de coté : l’engagement américain et britannique au Yémen principalement et en faveur de l’Amisom, également,

Les questions "techniques" sont diverses. On peut les résumer à trois essentiellement :

1° Comment s’assurer que les militaires somaliens, ainsi formés, ne vont pas ensuite retourner leurs armes. Question d’autant plus cruciale à la lumière des derniers attentats en Somalie (lire la "redoutable découverte des Ougandais" – à venir).

2° Comment payer et équiper les militaires ainsi formés. Question délicate alors qu’officiellement l’UE ne finance pas ce type de prestations. La solution pourrait passer par l’Union africaine et une collaboration avec les Etats-Unis (notamment pour les armes) pourrait s’esquisser.

3° La nécessité d’avoir un accompagnement médical. La situation en Ouganda ne paraît pas suffisante en matière médicale. Et il pourrait être nécessaire d’avoir une structure type Rôle 2 sur place.

Le contenu de la formation : des modules plutôt qu’une formation de base

Certaines questions ont été résolues, notamment le lieu (l’Ouganda) et le contenu de la formation : plutôt qu’une formation de base (comme les Français l’ont assuré à Djibouti en 2009) et comme l’assurent déjà les Ougandais, les Européens proposeraient d’assurer la tenue de modules spécifiques comme sur l’encadrement, sur certaines procédures (arrestations ou appréhensions de suspects, etc.).

Ce qui a plusieurs avantages : ménager l’Union africaine, nécessiter moins d’hommes, "avoir une réelle valeur ajoutée" plus en phase avec la tradition européenne. résoudre une question politique (qui heurte certains pays, former des militaires au combat n’est pas vraiment une mission traditionnelle de l’UE davantage orientée vers l’Etat de droit ou le peacekeaping). En matière d’effectif, il ne semble pas vraiment avoir de problèmes : les Etats ayant déjà annoncé leur participation chiffrée (Espagne, France, Hongrie, Slovénie…) assurant déjà l’effectif suffisant pour démarrer la mission.

___________________________ 4 – Voie 3

En Somalie les personnels humanitaires victimes de menaces

Des menaces grandissantes, la multiplication des embuscades visant les opérations humanitaires et une série d’exigences de la part de groupes armés ne permettent pratiquement plus au Programme alimentaire mondial (PAM) de continuer à nourrir un million de personnes dans le sud de la Somalie, a annoncé mardi cette agence des Nations Unies.

Les opérations humanitaires dans cette partie du pays étant de plus en plus souvent la cible d’attaques, le PAM est sérieusement préoccupé par les souffrances imposées aux catégories les plus vulnérables d’une population affamée. Il dénonce le fait que l’on s’en prenne ainsi de manière inhumaine à des opérations purement humanitaires ce qui constitue une situation sans précédent.

Le PAM continue d’organiser des distributions de vivres dans le reste du pays, y compris la capitale, Mogadiscio. Il aide ainsi 1,8 million de Somaliens à se nourrir, soit les deux tiers des personnes dans le besoin.

En raison de la situation dans le Sud, les ressources et les humanitaires qui étaient déployés dans cette région sont en cours de redéploiement pour parer à toute éventualité, notamment au cas où l’interruption des distributions alimentaires provoquerait un exode. Des réserves de vivres ont été « prépositionnées » et tout est prêt pour faire face à des mouvements de population que ce soit à l’intérieur de la Somalie comme aux frontières avec ses voisins.

Le PAM rappelle qu’il est une agence de l’ONU apolitique et impartiale présente depuis plus de quarante ans en Somalie où elle fournit une assistance aux plus pauvres parmi les pauvres. La pression exercée par les groupes armés dans le sud du pays constitue désormais un obstacle à l’accomplissement du mandat humanitaire du PAM.

La sécurité de ses équipes demeure une préoccupation fondamentale pour celui-ci. Des attaques récentes, des menaces, des actions de harcèlement et des demandes d’argent de la part de groupes armés ont perturbé l’acheminement des vivres et rendu pratiquement impossible l’assistance à un million de personnes vulnérables dont de nombreux femmes et enfants.

Bon an mal an, la Somalie n’est pas en mesure de répondre à plus de 40% des besoins alimentaires de sa population par sa production locale. Ces cinq dernières années, le chiffre a été plus proche des 30%.

Le PAM est la plus grande organisation humanitaire du monde. Il prévoit cette année de nourrir plus de 90 millions de personnes dans 73 pays.

___________________________ 3 – Le Monde

Un million de Somaliens menacés de famine après le retrait forcé du Programme alimentaire mondial

Un million d’habitants de la Somalie sont menacés de famine après la décision, annoncée, mardi 5 janvier, par le Programme alimentaire mondial (PAM), de "suspendre" ses distributions de vivres dans la partie sud de ce pays sans Etat de la Corne de l’Afrique. Le PAM, agence des Nations unies dont dépend la survie d’un total de 3 millions de Somaliens, soit un tiers de la population, avait déjà subi des assassinats d’employés et des attaques de pirates contre ses bateaux. Cette fois, ce sont les menaces et les exigences des miliciens islamistes du mouvement Al-Chabab, aux commandes d’une large partie du pays, qui conduisent le PAM à ce retrait.

Les islamistes ont exigé des rares organisations humanitaires encore présentes qu’elles licencient tout leur personnel féminin et qu’elles acquittent une taxe mensuelle de 20 000 dollars pour leur sécurité, a indiqué, mardi, Peter Smerdon, représentant de l’agence de l’ONU en Afrique de l’Est. Des demandes jugées "inacceptables" par le PAM.

Récemment, les menaces s’étaient intensifiées et un ultimatum posé, exigeant la cessation de toute activité le 1er janvier. En décembre 2009, des grenades ont été jetées par deux fois sur le bureau de l’ONU à Mogadiscio et un employé a été assassiné le 22 décembre. Le PAM a tenté de répondre aux exigences des groupes armés en organisant des réunions avec les anciens dans les villages, sans réussir à obtenir des garanties de sécurité suffisantes, a expliqué, mardi, un de ses porte-parole à Genève.

Risque d’exode

Les islamistes du mouvement Al-Chabab accusent le PAM de ruiner l’agriculture locale en contraignant les Somaliens à dépendre de l’aide alimentaire internationale. "Nous sommes très heureux de voir le PAM et les autres agences d’espionnage suspendre leur travail", a déclaré un responsable des miliciens à l’agence Reuters.

Le PAM, présent en Somalie depuis quarante ans, a répliqué à ces accusations récurrentes en rappelant que la production locale "n’a atteint que 30 % des besoins alimentaires des Somaliens" ces cinq dernières années. De son côté, un porte-parole d’Ahlu Sunna Waljamaca, une milice adverse, proche du gouvernement fédéral de transition (TFG) soutenu par les Occidentaux et l’ONU, voit dans le retrait du PAM une "bonne nouvelle", car il estime que l’aide alimentaire profitait à Al-Chabab.

L’aide va continuer à être distribuée au centre et au nord, y compris à Mogadiscio. Mais le PAM se prépare à un exode, vers le nord et les pays voisins, des Somaliens du sud, privés d’aide et affamés.

Philippe Bernard

___________________________ 2 – IRIN (ONU)

SOMALIE: Des milliers de déplacés par les combats

Des milliers de familles ont fui la ville de Dusamareb, la capitale régionale de Galgadud, dans le centre de la Somalie, après un week-end de combats entre les groupes islamistes qui a fait des dizaines de victimes et de nombreux blessés, ont déclaré des habitants à IRIN.

Le 2 janvier, les milices al-Shabab ont attaqué Dusamareb, à 500 kilomètres au nord de la capitale Mogadiscio, et brièvement pris le contrôle de la ville à Ahlu Sunna Waljama’a – un groupe soufi traditionnel –, avant d’en être à nouveau délogé.

« Notre estimation est qu’entre 6 000 à 7 000 familles [32 000 à 42 000 personnes] ont fui et sont maintenant déplacées », a dit à IRIN le sheikh Abdirahman Gedoqorow, un leader religieux.

La plupart des déplacés sont dispersés dans les villages et les localités rurales de la région, a-t-il dit.

M. Gedoqorow a dit que les personnes déplacées faisaient face à des conditions difficiles du fait d’une assistance insuffisante dans les régions où ils avaient fui. « Il n’y a personne là-bas pour les aider et la région a été ravagée par la sécheresse ».

Il a dit que les déplacés avaient « désespérément » besoin de matériel pour les abris, de nourriture et d’eau, le besoin le plus urgent.

Nombre de morts en augmentation

Un dirigeant local estime que jusqu’à présent 50 personnes sont mortes durant les combats et qu’au moins 80 ont été blessées. Cependant, un journaliste, sous couvert d’anonymat, a dit que le nombre de morts était probablement plus élevé.

Les deux groupes se battent pour le contrôle des régions du centre du pays depuis qu’Ahlu Sunna Waljama’a avait mis en déroute al-Shabab dans cette région en décembre 2008.

Le journaliste a ajouté qu’on avait rapporté que depuis, al-Shabab avait quitté la région. « Ils ne sont nulle part autour de Dusamareb. Ils se sont fait battre samedi [2 janvier] ».

Dusamareb, une ville de 40 000 habitants, a accueilli durant ces trois dernières années des milliers de personnes déplacées venant de Mogadiscio. « Que ce soient des habitants ou des personnes déjà déplacées, presque 80 pour cent sont maintenant des déplacés », a ajouté le journaliste.

Sécurité assurée

Tout en reconnaissant que les agences d’aide seraient réticentes à venir en aide aux déplacés – au vu de l’insécurité – M. Gedoqorow a dit que les agences cherchant à aider devraient contacter les responsables des communautés.

« Malgré les rumeurs, la situation est maintenant sous contrôle et nous avons une sécurité totale dans la ville », a-t-il dit. « Personne ne devrait avoir peur ».

Des combats sporadiques se déroulent dans le pays depuis que les troupes éthiopiennes se sont retirées en décembre 2008, laissant face à face les forces gouvernementales soutenues par l’Union Africaine et les insurgés islamistes.

Les travailleurs humanitaires estiment qu’au moins 3,6 millions de Somaliens ont besoin d’assistance dans l’ensemble du pays, et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) estime que jusqu’à 1,5 million de Somaliens sont déplacés.

Abdirazaq Moalim, le responsable du service de l’éducation à Dusamareb, a dit à IRIN que toutes les écoles de la ville étaient fermées car la majorité des élèves n’est plus là.

« Les élèves ne sont pas encore revenus et nous ne savons pas quand ils reviendront », a dit M. Moalim, qui avait lui aussi fui avec sa famille.

Il a dit qu’il y avait un sentiment de peur généralisée d’un retour d’al-Shabab.

M. Moalim a dit que de nombreux déplacés étaient partis dans des régions où il y avait très peu d’eau. « Je transporte cinq jerricans [20 litres] d’eau aux déplacés à Eil Barkad [10 kilomètres au nord de Dusamareb] », a-t-il dit.

______________________________ 1 – Nouvel Obs avec AP

Le PAM suspend son aide dans le sud de la Somalie

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a annoncé mardi qu’il cessait de distribuer de l’aide à un million de personnes dans le sud de la Somalie en raison d’une "multiplication des menaces et attaques" contre son personnel.

Ces attaques et menaces "font qu’il est devenu virtuellement impossible pour le PAM de poursuivre ses opérations d’aide à un million de personnes dans le besoin au sud de la Somalie", explique l’agence onusienne dans un communiqué.

Le PAM poursuit ses distributions dans le reste du pays, notamment dans la capitale, Mogadiscio, à plus de deux tiers des personnes qui ont été ciblées, soit 1,8 million de bénéficiaires.

Les ressources et le personnel ont été redéployés dans le nord et le centre du pays. Au moins quatre employés du PAM ont été tués ces 18 derniers mois et les militants ont menacé et pillé trois de ses bureaux dans le sud, selon Emilia Casella, une porte-parole.

Les groupes armés demandent que le PAM et d’autres organisations humanitaires retirent les femmes de leur personnel et exigent le versement de plusieurs dizaines de milliers de dollars pour garantir la sécurité des employés humanitaires, ajoute-t-elle.

L’agence a tenté de régler cette question en rencontrant les anciens des villages mais n’a pas pu obtenir les garanties nécessaires pour la sécurité de son personnel, explique la porte-parole du PAM. "Nous avons besoin de garanties concrètes de la direction" des mouvements armés.

Le PAM se tient prêt pour tout éventuel mouvement de population soit en Somalie, soit aux frontières vers les pays limitrophes