09/09/10 (B568) Les traits de l’Erythrée – Afewerki joue Paris (1 article)
______________________ 1 – Jeune Afrique
Afewerki joue Paris
Par Christophe Boisbouvier
Toujours très virulent contre les États-Unis, le chef de lÉtat tente malgré tout de sortir de son isolement.
Et si le président érythréen commençait à mettre de leau dans son vin ? Le 18 août à Asmara, lombrageux Issayas Afewerki a reçu longuement (plus de deux heures) un émissaire venu très discrètement de Paris, le diplomate Stéphane Gompertz, directeur Afrique au Quai dOrsay. Une première depuis la visite en 2006 de la ministre française de la Coopération, Brigitte Girardin.
Le 8 juin, déjà, Afewerki avait fait un geste douverture : il avait accepté la médiation de lémir du Qatar dans le conflit territorial qui loppose à la République de Djibouti dans la région frontalière de Ras-Doumeira (zone clé du détroit de Bab el-Mandeb). À son interlocuteur français dont le pays a de multiples intérêts à Djibouti , le président érythréen a confié quil attendait maintenant les propositions du Qatar sur Ras-Doumeira.
Souple sur Djibouti, Afewerki reste en revanche intraitable à légard de son grand voisin du sud : « Pourquoi lÉthiopie veut-elle un accès au port dAssab ? Elle a déjà Djibouti ! » Pas douverture non plus sur la question somalienne. Malgré le rapport 2010 dun panel de lONU sur lassistance militaire et financière que lÉrythrée apporte aux islamistes somaliens, Afewerki continue de nier toute forme de soutien aux Chabaab de Mogadiscio. « Je sais quils ne sont pas fréquentables, mais, soyez réalistes, il faut faire avec », ajoute-t-il dans ce qui ressemble à un demi-aveu. Le problème, cest que le maître dAsmara prétend quil ne sait pas comment établir le contact avec ces mêmes Chabaab
Les sanctions votées en décembre dernier par le Conseil de sécurité de lONU contre lÉrythrée commencent donc à produire leurs effets. Pour essayer de sortir de son isolement international, Issayas Afewerki fait les yeux doux aux Djiboutiens et aux Français. Mais il ne bouge pas dun millimètre sur le front éthiopien et continue de traiter lAmérique de « grand Satan ». Bref, il calme le jeu sur un front pour mieux tenir sur les deux autres.