23/09/10 (B570) Nouvelles de Somalie – nouvelle attaque shebab à Mogadiscio, au moins 19 civils tués – l’ONU appelle le gouvernement à « mettre fin à ses divisions internes » – « Fish-Barda », avant-poste de l’Amisom sous le feu des jihadistes – La France condamne avec la plus grande fermeté l’attentat (4 articles)

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Somalie: nouvelle attaque shebab à Mogadiscio, au moins 19 civils tués

Les insurgés islamistes shebab ont lancé jeudi une nouvelle attaque à Mogadiscio contre les forces gouvernementales et la force de paix de l’Union africaine (Amisom), au cours de laquelle au moins 19 civils ont été tués, ont indiqué des sources médicales et des témoins.

Les combats ont éclaté à l’aube dans plusieurs quartiers de la capitale somalienne, a constaté le correspondant de l’AFP.

Les insurgés ont attaqué les positions des forces du gouvernement de transition (TFG) et de l’Amisom sur les lignes de front au nord et au sud de la ville, avec de violents échanges d’artillerie.

"Nous avons compté 19 civils tués dans les combats jusqu’à présent, au moins 86 ont été blessés. La plupart ont été victimes de bombardements sur le marché de Bakara", un bastion de l’insurrection, a indiqué à l’AFP le chef du service de ambulances de Mogadiscio, Ali Muse.

"C’est un désastre, ils ont tué des civils innocents en bombardant un marché densément peuplé", a-t-il accusé.

"Je n’ai jamais vu un tel bain de sang, neuf personnes sont mortes d’un coup à Bakara" quand un obus de mortier s’est abattu sur un camion rempli de passagers, a raconté un témoin, Abdirahman Adan.

"Des femmes et des enfants figurent parmi les victimes", selon un autre témoin, Ahmed Abdulahi, interrogé par l’AFP.

Les combats se poursuivaient de façon sporadique à la mi-journée dans les districts d’Hodan et Holwadag (sud), Bondhere et Shibis (nord).

Cette nouvelle attaque shebab intervient après une violente offensive lancée le 23 août par les insurgés dans la capitale et qui a duré près d’une dizaine de jours. Les forces du TFG avaient alors abandonné plus d’une dizaine de leurs positions avancées sur les lignes de front, forçant l’Amisom à intervenir pour les remplacer.

A l’issue de cette offensive, les shebab se sont notamment rapprochés à un pâté de maisons d’un axe stratégique, l’avenue Maka al-Mukarama qui relie le port et l’aéroport, un corridor vital pour la force de paix.

Les civils sont de loin les principales victimes de la bataille de Mogadiscio. S’il n’existe pas de données fiables sur le nombre exact de victimes civiles, plusieurs milliers d’habitants de Mogadiscio sont morts dans les combats ces trois dernières années et des centaines de milliers ont été déplacés au moins une fois.

Plusieurs associations de défense des droits de l’Homme ont accusé les deux camps de tirs indiscriminés sur des quartiers densément peuplés.

L’Amisom affirme tout faire pour épargner les civils tandis que le gouvernement a assuré que des insurgés ayant péri dans ces combats étaient parfois inclus dans les bilans en tant que civils.

"Au moment où ils arrivent à l’hôpital, les corps ont été débarrassés de leurs armes, munitions et autre attirail et ils ont l’air de civils ordinaires", affirmait récemment le ministère de l’Information dans un communiqué.

"Nous savons que des civils sont blessés ou tués dans les combats (…) mais nous soupçonnons qu’une partie des pertes civiles enregistrées soient aussi composées d’extrémistes tués dans les combats", poursuivait le communiqué.

__________________________ 3 – AFP

Somalie: l’ONU appelle le gouvernement à "mettre fin à ses divisions internes"

La démission du Premier ministre somalien est une "nouvelle manifestation des disputes" au sein du fragile gouvernement de transition (TFG) qui doit mettre un terme au plus vite à "ses querelles internes", a estimé mercredi l’envoyé spécial de l’ONU pour la Somalie.

Dans un communiqué transmis à l’AFP, Augustine Mahiga "a pris acte de la décision du Premier ministre Omar Abdirashid Sharmarke de démissionner dans l’intérêt de la paix et de la stabilité en Somalie".

Cette démission est cependant "une nouvelle manifestation des graves querelles au sein du TFG", selon M. Mahiga, qui "espère que le TFG mettra fin maintenant à ses divisions internes l’ayant empêché de mener des tâches essentielles".

Cette démission est l’épilogue d’une interminable crise à la tête du TFG qui paralysait depuis des mois l’activité d’un gouvernement soutenu à bout de bras par la communauté internationale et dont l’autorité se limite à quelques quartiers de Mogadiscio.

Elle est intervenue une dizaine de jours après une violente offensive des shebab dans la capitale, qui a vu la déroute des forces pro-gouvernementales, sauvées in extremis par la contre-attaque des soldats ougandais et burundais de la force de paix de l’Union africaine (Amisom, 7.200 hommes).

"Le leadership somalien doit rester uni et concentré sur son travail, moins d’un an avant la fin de la période de transition en août 2011 et alors qu’il reste un travail énorme à accomplir", a souligné l’envoyé spécial de l’ONU.

M. Mahiga a appelé les responsables somaliens "qui soutiennent la paix et la sécurité à montré qu’ils peuvent travailler ensemble", au moment où "la communauté internationale et le peuple somalien attendent l’unité de leur leaders, et non des crises politiques récurrentes".

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Mogadiscio: "Fish-Barda", avant-poste de l’Amisom sous le feu des jihadistes

Hervé BAR

Caché dans les étages d’un immeuble éventré par les obus, un sniper allongé sur une planche de bois, immobile comme une statue, scrute la ligne de front dans la lunette de son fusil Dragonov.

Le canon d’acier noir pointe au travers d’un trou en forme d’oeil de boeuf dans la façade, stigmate d’un récent assaut des shebab. Un coup de feu claque, la douille brûlante est éjectée sur le sol carrelé dans un tintement métallique.

A un jet de pierre du vieux port de Mogadiscio, la position de "Fish-Barda" défend le flanc nord des zones sous contrôle de la force de l’Union africaine (Amisom) dans la capitale face aux insurgés islamistes.

"L’ennemi est là, à moins de 300 mètres", explique le lieutenant Kananza, longiligne officier qui commande ce poste avancé de l’armée ougandaise.

De cette ancienne station de police de cinq étages, il ne reste qu’une ruine, plantée au milieu d’un tas de gravats comme une fusée de béton sur son pas de tir.

"C’est une position stratégique", explique le colonel Francis Chemo, commandant de ce secteur de la capitale. "Elle domine toute la zone, verrouille l’accès au vieux port et empêche le ravitaillement des insurgés par la mer".

Fish-Barda a été évacué en catastrophe par les éléments de police du TFG (gouvernement) peu après le début d’une vaste offensive shebab le 23 août.

Plus d’une dizaine de positions ont été ainsi abandonnées sous la pression des insurgés, mettant un moment l’Amisom en difficulté et la forçant à contre-attaquer.

Occupé deux jours par les assaillants, Fish-Barda a finalement été repris par les soldats ougandais de l’Amisom, avec l’appui de leurs engins blindés et chars T-70, au terme de quatre heures d’affrontements.

L’arme à l’épaule, les militaires empruntent une succession d’échelles de bois posées dans la cage d’ascenseur noircie par les flammes pour monter à leurs postes de combat.

Sur le carrelage poussiéreux, une longue traînée de sang séchée: "le cadavre d’un des leurs que les shebab ont emporté", lance un sous-officier.

Dans une pièce vide aux murs crasseux couverts de graffitis obscènes, une mitrailleuse PKM est installée devant une fenêtre en partie obstruée par de vieux cartons.

Une lègère brise marine vient rafraîchir les combattants trempés de sueur sous leur lourd gilet par-balles, accroupis derrière leurs sacs de sable, le regard tendu vers les lignes ennemies.

Un lit de camp repose à même le sol, un reste de riz dans une assiette en plastique traîne sur une caisse de munitions. "Nous sommes sur nos gardes 24h/24, les shebab peuvent lancer un assaut à tout moment", souligne le lieutenant Kananza, talkie-walkie crachottant collé à l’oreille.

Le no man’s land qui sépare les belligérants est une succession de maisons éventrées, étouffées par la broussaille, dont les courettes ou anciens jardins ne sont plus que des décharges encombrées de pourritures.

Une minuscule tâche sombre se détache un instant entre deux murs blancs immaculés grêlés d’éclats: un "combattant shebab", réagit le servant de la mitrailleuse.

Une rafale assourdissante déchire l’air, à laquelle répondent des coups de feu isolés. Entre chaque échange de tirs, revient imperturbablement le fracas lointain des vagues sur la digue du vieux port.

"La situation est imprévisible", selon le colonel Chemo. Sur cette ligne de front, vidée de toute population, se concentrent les jihadistes étrangers qui combattent au sein des shebab.

"Nous les repérons à leur couleur de peau, ce sont souvent des Arabes, des Pakistanais. Ils sont plus combatifs, plus aguerris", observe le commandant ougandais.

Autre particularité, "ils récupèrent toujours leurs cadavres. Sinon, ils tirent sur les visages de leurs morts pour les rendre méconnaissables".

__________________________ 1 – France diplomatie (A.E.)

Attentat en Somalie (21 septembre 2010)

La France condamne avec la plus grande fermeté l’attentat commis hier à l’intérieur du campus gouvernemental de Mogadiscio.

Bernard Kouchner participera jeudi à New York à un sommet sur la Somalie, présidé par le Secrétaire général des Nations unies. Il aura l’occasion de redire à l’ensemble des partenaires la confiance qu’accorde la France au processus de Djibouti, aux Nations unies et à l’Union Africaine dans leur difficile travail pour rétablir la paix et la stabilité en Somalie.

La France renouvelle son soutien au gouvernement fédéral de transition et l’appelle, dans les meilleurs délais, à rétablir son autorité tout en assurant un dialogue ouvert avec tous ceux qui acceptent de renoncer à la violence.