31/12/10 (B584) Communiqué du FCD (Fédération congolaise de la Diaspora) à propos des poursuites judiciaires de l’affaire des biens mal acquis par trois dictateurs africains dont deux sont toujours vivants et en place (Un exemple qui pourrait peut-être concerner directement Guelleh dans l’avenir ?)

BIENS MAL ACQUIS : Note de Position de la FCD

Sur le jugement de la Cour de cassation du 9 novembre 2010 concernant l’affaire des « biens mal acquis »

La FCD se félicite de la récente décision de la cour de cassation qui vient de juger recevable la constitution de partie civile de l’ONG Transparence International-France (TI-France) dans l’affaire dite des « biens mal acquis ».


On peut légitimement s’interroger sur l’origine des fonds qui ont permis au Couple Guelleh de s’acheter un appartement de grand luxe dans l’une des avenues les plus « côtées » de Paris. Sans parler des autres propriétés dans le Monde !!

Alors qu’une majorité de Djiboutiens n’a même plus les moyens de manger à sa faim ..et que le pays est ruiné, en dépit des perfusions internationales sans cesse renouvelées … et qui disparaissent, bien souvent, avant même d’être arrivées dans le pays.

La justice française est donc autorisée à enquêter sur les biens frauduleusement acquis en France par BONGO, SASSOU NGUESSO et OBIANG NGUEMA, trois dictateurs impénitents qui sévissent (au moins pour les deux derniers, le premier étant décédé) depuis des décennies à la tête d’Etats privatisés pour mieux en piller les richesses.

Cette décision, on s’en doute, a été prise en dépit de la pression du pouvoir politique relayée par un Parquet dont l’indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif vient fort justement d’être mise en cause par un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) du 23/11/2010.

Le dévoiement de la mission du Parquet en instrument au soutien des intérêts supérieurs de la françafrique, les observateurs du microcosme françafricain l’ont expérimenté tout au long du déroulement de ce procès à rebondissements, et bien avant celui-ci, dans l’affaire dite des « 353 disparus du Beach ».

Il souviendra au lecteur que c’est à la demande expresse du Parquet de Meaux, que le chef de la police du Congo Brazzaville, Jean François NDENGUET, incarcéré à la maison d’arrêt de la santé pour « crimes contre l’humanité » dans ladite affaire, fut nuitamment libéré et aussitôt exfiltré au motif qu’il bénéficiait d’une immunité diplomatique plus que douteuse.

Le parquet va se surpasser dans l’affaire des « biens mal acquis ».

Elle débute par une plainte déposée en mars 2007 par les associations Survie, Sherpa, et la Fédération des Congolais de la Diaspora (FCD) pour « recel de détournement de biens publics et complicité » auprès du TGI de Paris contre cinq chefs d’Etats africains en fonction et leurs familles : Omar BONGO ONDIMBA (Gabon), SASSOU NGUESSO (Congo Brazzaville), Blaise COMPAORÉ (Burkina Faso), DOS SANTOS (Angola) et OBIANG NGUÉMA (Guinée équatoriale).

Jugée recevable, une enquête préliminaire est diligentée en Juin 2007. Confiée à l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière l’enquête révèlera que SASSOU NGUESSO et sa famille possèdent plus de 18 appartements et hôtels particuliers et près de 112 comptes bancaires à Paris et en région parisienne. Malgré la mise en évidence de ce vertigineux patrimoine, le Parquet de Paris n’hésite pas à classer l’enquête policière sans suite pour « infraction insuffisamment caractérisée » en novembre 2007.

Le 2 décembre 2008, Transparence International-France, Sherpa et un citoyen gabonais Grégory NGBWA MINTSA déposent une nouvelle plainte assortie d’une « constitution de partie civile » visant Omar BONGO ONDIMBA, SASSOU NGUESSO et OBIANG NGUÉMA ainsi que leurs entourages pour « recel de détournement de fonds publics »

Le 5 mai 2009, la doyenne des juges d’instruction au pôle financier de Paris, juge la plainte recevable et ordonne l’ouverture d’une enquête judiciaire sur les biens acquis par les trois chefs d’Etat en France. Le parquet de Paris qui a annoncé début avril qu’il s’y opposerait fait appel. Le 29 octobre 2009, la cour d’Appel de Paris donne raison au ministère public et juge la plainte irrecevable. C’est ce jugement qui vient d’être cassé par la cour de cassation sur un pourvoi de Transparence International-France.

Dans un article publié sur le site MEDIAPART le 19 novembre 2010, Philippe RIES observe que ce faisant, « la Cour de cassation ne fait pas que choisir son camp dans un bras de fer permanent dont l’enjeu n’est rien de moins, dans ce pays, que l’affirmation de l’indépendance de la Justice pour qu’il raccroche enfin le train des démocraties les plus avancées » .

Rarement en Europe occidentale, justice ne se sera montrée autant soumise à la raison d’Etat. La liste serait longue des affaires passées au tamis de son filtre. Pour aller vite, on pourrait citer les affaires BORREL et FALCONE, pour ne pas remonter à l’affaire BEN BARKA.

L’acte de « rébellion » de la Cour de cassation restaure la justice française dans sa dignité. Il vient sèchement signifier au pouvoir politique que la France a un rang à tenir parmi les nations civilisées et ne peut sans conséquences pour sa réputation de grande nation du droit, s’affranchir de façon répétée de ses devoirs, notamment, à l’égard des conventions internationales. Aux dirigeants africains il est dit que la France n’est pas la caverne d’Ali baba, qu’elle est un Etat de droit et qu’ils devront s’y faire.

Les cris d’orfraie des dirigeants africains hurlant au racisme, au néocolonialisme, et invitant les populations à une réaction vigoureuse contre la volonté de déstabilisation d’Etats souverains, ne font guère illusion. Dans une interview au journal catholique « La Semaine africaine », Paul-Marie MPOUELE, président du Rassemblement de la Jeunesse Patriotique (petite formation de l’opposition congolaise), résume l’opinion générale :

« Voilà des grands mots ! Déstabiliser qui ? Je constate, simplement, que chaque fois que le régime Sassou est confronté à une exigence de transparence, on sort l’artillerie lourde. C’était ainsi avec l’affaire des disparus du beach ; c’est ainsi, lorsque l’opposition réclame les conditions transparentes des élections ; c’est encore pareil, lorsqu’on parle de transparence dans la gestion des recettes pétrolières, etc…

C’est, du reste, très embarrassant de se servir du peuple comme bouclier, alors que celui-ci vit dans le dénuement le plus total. Je rappelle que plus de 50% des Congolais vivent en dessous du seuil de pauvreté, c’est-à-dire, avec moins de 500 F Cfa par jour.

Cette situation d’extrême dénuement est due à une gestion hasardeuse des finances publiques. Cet arrêt de la cour de cassation de France peut, en définitive, permettre à la famille Sassou de lever les doutes, les suspicions et autres interprétations que le peuple fait de la gestion des recettes pétrolières. Pourquoi craindrait-on la transparence, si l’on n’a rien à se reprocher ? Il y a tant d’argent qui échappe au trésor public. Si cette affaire peut mettre la lumière sur cette nébuleuse, pourquoi pas ! »

Les populations convoquées à la rescousse ne sont donc pas dupes et les manifestations « massives » anti-français et pro-SASSOU brandies par le régime n’ont attiré que les groupies adeptes de gains faciles, abonnés aux fonds secrets, les désœuvrés à qui l’on glisse quelques billets.

On peut difficilement être surpris. Car, le visage que donne à voir le régime milite furieusement contre lui.

– Du pétrole et des hôpitaux, des dispensaires sans médicaments, sans coton hydrophile, sans seringues, sans lits, sans draps, sans lumière, sans sanitaires et parfois sans eau courante ; des masques à oxygène sans oxygène,

– Du pétrole et des écoles à 80 élèves par classes, sans bancs ni chaises, sans enseignants ; des internats sans budget, sans couverts, sans lumière et finalement fermés, abandonnés aux rats et aux herbes folles,

– Du pétrole et des étudiants sans bibliothèques, sans salles de cours, sans bourses ou avec des bourses irrégulièrement versées faute d’argent,

– Du pétrole et une jeunesse sans perspectives, abonnée au chômage, rêvant des terres « paradisiaques » de l’Occident,

– Du pétrole et la misère au quotidien, la vie chère, et des millions de congolais condamnés à un seul repas par jour faute d’argent,

– Du pétrole et des paysans de plus en plus coupés de la capitale, du pays et des circuits économiques faute d’argent pour entretenir les routes léguées par la colonisation, en construire et écouler leurs produits,

– Du pétrole et l’absence d’eau courante dans ce pays baigné d’innombrables cours d’eau dont le fleuve Congo, le plus puissant au monde après l’Amazonie,

– Enfin, du pétrole, et 70% de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté.

On ne sait que trop, malheureusement, qui profite de la manne pétrolière.

SASSOU NGUESSO et son clan détournent sans vergogne, une partie substantielle de la rente pétrolière. Le système est bien rodé. Vente du pétrole négociée en dessous du prix du marché en contrepartie de versements à son profit, prêts gagés ou préfinancements sur la vente du pétrole, sociétés écrans contrôlées par des proches qui dévient une partie de l’argent du pétrole vers des comptes bancaires situés dans des paradis fiscaux, rétro-commissions touchées sur des contrats de passation de marchés publics, affectations des fonds publics dans des comptes privés autres que ceux du Trésor public etc… A ce compte, un ouvrage paru en 2006 aux éditions Fayard, « Afrique. Pillage à huis clos », évalue la fortune de SASSOU NGUESSO à plus d’un milliard de dollars (pp. 37-45).

Prétendre dans ces conditions que les succès économiques « époustouflants » enregistrés par le régime grâce à une politique volontariste d’ouverture des marchés à des partenaires autres que français seraient la cause de cette « ignominieuse cabale » anti-SASSOU relève de la fumisterie. Mais on n’en attendait pas moins de ce régime aussi arrogant que discrédité.

L’intérêt à agir dénié à Transparence International-France aux fins de disqualifier l’ONG est un autre argument désespéré du régime kleptocratique de Brazzaville. Pas tout à fait innocent, il sous-entend que les congolais seraient indifférents à leur sort, ou, pire, approuveraient l’inconduite criminelle du potentat.

C’est le lieu de rappeler que les congolais n’ont pas oublié la condamnation de SASSOU NGUESSO par la Conférence nationale souveraine au paiement d’une amende d’1 milliard de Francs Cfa en raison de « ses relations suivies avec des hommes d’affaires véreux et l’ampleur de ses malversations financières au préjudice de l’Etat congolais ». Inutile de préciser que l’homme ne s’est jamais acquitté de sa dette. Une habitude semble-t-il dans la famille car, dans la foulée de cette condamnation, son épouse était sommée de « procéder au paiement des dettes contractées à l’égard des tiers (en fait des banques), et de respecter les décisions de justice ». Lorsqu’il quitte le pouvoir en 1992, il laisse à son successeur et au pays une dette extérieure de près de 3000 milliards de Francs Cfa. Le Congo Brazzaville est alors le pays le plus endetté au monde par tête d’habitant.

La publication en mars 2007 du rapport du CCFD-Terre solidaire : « Biens mal acquis … profitent trop souvent – La fortune des dictateurs et les complaisances occidentales » vient révéler l’ampleur du pillage des richesses nationales par les dirigeants africains. Selon ledit rapport, la fortune détournée par les dictateurs au cours des dernières décennies oscillerait autour de 100 à 180 milliards de dollars. Un large débat est alors engagé entre les associations SHERPA, Survie et la fédération des congolais de la Diaspora à l’issue duquel une plainte est déposée devant le procureur de la République de Paris pour recel de détournement de fonds publics à l’encontre des familles dirigeantes précitées. L’enquête préliminaire diligentée confirme la plupart de nos allégations et révèle par ailleurs l’existence de nombreux autres avoirs, immobiliers et mobiliers. Elle est néanmoins classée sans suite, alors que les informations réunies permettaient l’ouverture d’une Information judiciaire.

Daniel LEBÈGUE, président de Transparence International-France, ONG auteure du pourvoi en cassation, justifie cette démarche par l’obligation de ne pas laisser « la solide enquête déjà menée rester sans suite ». ONG reconnue d’utilité publique, elle motive son intérêt à agir par sa vocation : la lutte contre la corruption et son corollaire obligé, se placer aux côtés des victimes.

« Quand vous avez un tel régime, allergique à la transparence et liberticide, la communauté internationale est un parfait recours » répond Paul-Marie MPOUÉLÉ à tous les « souverainistes » regroupés autour du régime congolais. Car et on le devine aisément, localement, aucun congolais sain d’esprit, ne se risquerait de porter plainte contre le dictateur. Ce serait mettre sa vie ainsi que celle de ses proches en danger. D’autant que la population ne se fait guère d’illusions ; elle sait que de justice, il n’en existe guère au Congo Brazzaville. Toutes les institutions sont inféodées au dictateur et participent de cette entreprise de consolidation de la dictature, la justice étant l’une de ses mamelles.

C’est également le constat du PNUD qui dans son Rapport national sur le développement humain (RNDH) 2006/2007 consacré au Congo Brazzaville, dresse le portrait d’un Etat véritable pandémonium où règnent la corruption et le désordre. Il pointe les Douanes, Impôts, Police, Tribunaux, Enseignement, Trésor, Marchés et contrats de l’État, Santé, Mairies, comme les « domaines d’activité les plus touchés par la fraude et la corruption ». Le système judiciaire y est jugé complètement « sous le contrôle du pouvoir exécutif ».

Nul ne s’imagine au Congo Brazzaville, que la Commission nationale de lutte contre la corruption, la concussion et la fraude ou l’Observatoire anti-corruption, créés en 2007 sous la pression internationale, les autorités congolaises étant alors en négociation avec les institutions financières internationales aux fins d’obtention du statut rêvé de « Pays pauvre très endettés » et par suite des avantages afférents (effacement de ses dettes), viendrait à importuner le roi SASSOU et ses proches.

Ils sont là pour faire beau, et à l’occasion, traquer le petit gibier dépourvu d’appuis. Avis partagé par le PNUD qui précise, « encore aujourd’hui, certains membres du gouvernement et leurs collaborateurs sont nommés sur des critères qui n’impliquent pas la prise en compte de l’intérêt général […] Quant aux institutions chargées du contrôle de l’action publique (Parlement, Cour des comptes et de discipline budgétaire, Inspection générale des finances), elles tardent à prouver leur efficacité […] Difficile, de progresser en l’absence de réelles « institutions fortes, respectueuses des lois et des règlements, garants de la démocratie et des droits de l’homme et aptes à promouvoir la participation des citoyens à la vie politique et aux sphères de prise de décision. »

On est bien loin du « complot anglo-saxon » et « anti-France » psalmodié sur tous les tons par un Pierre PÉAN qui n’en finit plus de se discréditer après ses prises de positions bien étonnantes sur la « réalité » du génocide rwandais. Et, c’est assurément être piètre avocat que d’expliquer aux Gabonais comme il vient de le faire récemment lors d’une émission à la radiotélévision gabonaise (RTG1), que les anglo-saxons sont plus menaçants pour le peuple gabonais que ne l’aura été Omar BONGO ONDIMBA et ne l’est sa famille qui les dépouillent depuis plus de 40 ans.

Mais ce n’est pas le moindre paradoxe de l’auteur d’ « Affaires africaines », livre fouillé décrivant les rapports franco-africains comme un véritable pandémonium où règnent le désordre et la corruption, le Gabon de BONGO résumant à lui seul ces dérives. En 340 pages bien documentées, il n’aura pourtant décelé aucune trace fusse-t-elle minime, d’une offensive anglo-saxonne antifrançaise en Afrique centrale. Pas très visionnaire l’ami PÉAN…

Par la suite, affirmer dans le même élan que ceux des africains ou des associations africaines ayant porté plainte contre les potentats africains seraient « instrumentalisés » par Sherpa, Survie et TI, elles-mêmes complices des « carnages et des guerres secrètes des grandes puissances en Afrique », est particulièrement choquant et indigne de celui qui se définit comme journaliste enquêteur, et n’a pourtant pas jugé utile (bien qu’il se trouvât à Libreville) d’entendre Grégory NGBWA MINTSA, Marc ONA ESSANGUI, Gaston ASSEKO, Georges MPAGA, Jean Marie POATY, tous militants de la société civile, jetés en prison sur l’accusation fantaisiste d’être « instrumentalisés et soutenus financièrement par des ONG françaises pour déstabiliser l’Etat ». Leur tort : avoir porté plainte dans l’affaire des BMA.

Pas besoin de les entendre en effet lorsque la démarche est militante et idéologique. Ils en auraient eu pourtant des choses à lui dire à Pierre PÉAN sur son livre et sur leurs motivations ! En particulier, leur étonnement que celui-ci reprenne « mot pour mot », ces accusations proférées par l’ex-ministre de l’intérieur de BONGO ONDIMBA, MBA OBAME au cours d’une conférence de presse ayant précédé leur arrestation en janvier 2009. Enfin, que le combat mené par eux depuis des années n’est que celui de la « justice sociale et du progrès du Gabon » (Cf. Communiqué du 13/12/2010 après le passage de Pierre PEAN sur la RTG1).

Hélas, Pierre PÉAN a fait le choix de cette resucée coloniale selon laquelle les africains seraient de grands enfants incapables d’engagement faute de saisir la complexité du monde et les enjeux contemporains. L’incidence des multiples variables apportant encore plus de confusion dans leur petite tête déjà surchauffée par la simple action de réfléchir. Alors, dans leur naïveté infantile, ils se font avoir. Des africains qui ne seraient jamais entrés dans l’histoire on passe aux noirs sans cerveaux. A trop lire Bernard LUGAN, Pierre PÉAN qui prétend proposer une grille de lecture révolutionnaire des vrais enjeux de l’heure se fourvoie.

La FCD, partie prenante de la plainte à l’origine de l’affaire des Biens Mal Acquis dénonce avec vigueur ce discours infantilisant qui relève de l’idéologie. Elle constate que depuis son immixtion épistolaire dans l’affaire rwandaise, Pierre PÉAN mène une croisade quasi-obsessionnelle contre le « péril » anglo-saxon qui viserait à supplanter le « pré-carré » français. Edwy PLENEL « l’espion » au service de la CIA et les ONG, Survie, Sherpa et Transparence International-France en seraient les têtes de ponts.

La FCD doute qu’elle ait été manipulée de quelque manière que ce soit par ses partenaires dans la plainte de 2007. Elle rappelle que les faits reprochés à SASSOU NGUESSO et mis en lumière avec force précisions dans le rapport du CCFD avaient déjà été relevés et condamnés par la Conférence nationale souveraine de 1991 sans qu’il ne fût jamais question d’un quelconque complot anglo-saxon.

Son engagement dans cette affaire comme dans celle des « disparus du Beach », relève d’un combat déterminé contre l’impunité d’un homme arrivé au pouvoir par effraction en 1997, poursuivi pour crimes contre l’humanité, et qui pille sans vergogne les richesses de son pays avec la complicité des entreprises exploitantes de l’Etat français ou de l’Union européenne, ses proches et amis français en affaires profitant également des circuits de dilapidation de ces richesses.

Les préoccupations de la FCD résolument opposée à ce que la France reste un sanctuaire pour les potentats africains et leurs biens frauduleusement acquis, rejoint celles des institutions multilatérales qui admettent désormais que « l’acquisition illicite de richesses personnelles peut être particulièrement préjudiciable aux institutions démocratiques, aux économies nationales et à l’état de droit » et que « la corruption est un facteur d’appauvrissement de nombreux pays ».

A l’échelle du continent noir, la corruption généralisée organisée par les élites, est un frein non négligeable au développement économique. La convention onusienne de Merida (UNCAC), premier instrument mondial de lutte contre la corruption, prescrit à tous les États de « prévenir et éradiquer la corruption, de coopérer entre eux, avec le soutien et la participation de personnes et de groupes n’appartenant pas au secteur public, comme la société civile, les organisations non gouvernementales et les communautés de personnes, pour que leurs efforts dans ce domaine soient efficaces » et pose de manière contraignante le principe de la restitution des avoirs acquis illicitement

Or, les gens dont il s’agit (SASSOU NGUESSO, Ali BONGO ONDIMBA, OBIANG NGUÉMA…) sont protégés par l’immunité des chefs d’Etats dans l’exercice de leur fonction derrière laquelle ils se réfugient pour perpétrer leurs forfaits en toute quiétude. Malgré tout, loin d’être un coup d’épée dans l’eau, la décision de la Cour de cassation transgresse le tabou de « l’inviolabilité » si pas de la personne, mais tout au moins du patrimoine de ces excellences, dans la mesure où il autorise le juge à investiguer sur celui-ci, l’intérêt de Transparence International-France à agir ayant été confirmé.

Dans une récente interview sur Rfi, l’avocat de SASSOU NGUESSO, Me VERSINI-CAMPINCHI, semble en avoir pris son parti et préfère axer la défense de son client sur « l’impossibilité de juger, en France, un détournement de biens publics opéré à l’étranger et commis par des étrangers, aucun texte du Code pénal français ne le permettant ». Raisonnement que conteste bien entendu William BOURDON, avocat de Transparence International-France. Au demeurant, sans être fin juriste, les juges ayant été désignés, on ne voit pas par quel mystère l’instruction pourrait être stoppée.

Libérés du carcan de la raison d’Etat, il reste à espérer que les juges Roger LE LOIRE et René GROUMAN chargés de relancer les investigations classées « sans suite », seront à la hauteur de l’enjeu et feront bon usage de cette liberté de manière à établir la provenance des fonds ayant permis l’acquisition de tous ces biens mobiliers et immobiliers de luxe.

L’honneur de la justice française est à ce prix. Son indépendance dont ce pays a littéralement abreuvé des générations entières d’étudiants africains, hexagonaux et d’ailleurs, sera jugée à l’aune de la détermination desdits juges à rechercher la vérité. Les africains ne la connaissent, hélas, que trop bien