07/03/11 (B594) La démocratie n’est pas une drogue artificielle pour abrutir et soumettre le peuple ; c’est une culture, un état d’esprit qui construit chaque jour. (Par Mohamed Saleh Alhoumékani)

Il n’existe pas de premier ni de dernier discours […]
Rien n’est mort absolument : chaque sens aura sa fête de renaissance.
Mikhaïl Bakhtine. Historien et théoricien russe de la littérature.

La réflexion menée depuis quelques semaines, au sein de l’opposition politique à Ismaïl Omar Guelleh, sur la Liberté à construire demain dans notre pays, est un acte politique – des uns comme des autres – d’une extrême importance et que l’on peut qualifier de Responsable quant aux conditions futures de réalisation et sur son application dans la vie quotidienne de nos compagnons et concitoyens à Djibouti.

Cette réflexion commune sur ce sujet qui nous rapproche est une démarche fondamentale dans l’histoire de notre pays au plan du rétablissement futur de l’appareil d’Etat, de l’équilibre, de la respectabilité, de la représentativité de nos institutions et de leur indispensable évolution pour une mise en adéquation avec un environnement international en plein bouleversement.

Il faut se ressembler un peu pour se comprendre, mais il faut être un peu différent pour se respecter mutuellement.

Tous nos discours politiques sur le sujet ne consistent pas qu’à énumérer et à classifier des actions tenues pour libres ; nous nous devons aussi de fixer tous ensemble, dès à présent au sein de l’opposition, le chemin menant à la libération de notre pays en faisant fi de nos différences.

Dès lors l’expression de « libération du sol national dans l’urgence», afin de mettre un terme aux abjects « Actes de répression » ordonnés par le pouvoir actuel, doit l’emporter sur toute autre considération individuelle.

Replacé dans ce nouveau contexte facteur de rassemblement de l’opposition, le terme de « liberté » doit se conjuguer spontanément dès à présent au pluriel car nous nous devons de définir clairement les « libertés », de toutes les libertés et de leurs limites : qu’elles soient civiles, politiques, économiques et sociales.

Par ces dispositions restant à exprimer et à conforter pour l’avenir, il convient d’entendre un certain nombre de droits de faire, qui n’existent que s’ils sont reconnus par les uns et les autres et instaurés dans des institutions de caractère économique, social et politique à recréer.

Qu’importerait que l’humain s’imagine être libre de penser, si l’expression de son opinion l’exposerait à un bannissement social et si sa situation économique l’obligerait à se taire pour survivre ? Comme c’est le cas actuellement à Djibouti !

Qu’importerait que l’on soit libre de déposer dans l’urne son bulletin de vote, si les élections étaient autant de mascarades guignolesques ? Comme c’est le cas hélas actuellement dans notre pays et si les moyens de propagande, la presse et les candidats eux-mêmes sont inféodés aux détenteurs du pouvoir politique ou aux extrémismes.

Le vrai c’est que la liberté n’est pas une donnée préexistante, une invariable qu’il s’agirait de protéger ; c’est une faculté qu’il faut conquérir, puis défendre pour l’avenir.

Le droit ne peut être satisfait que dans une société juste.

La Justice et le Droit, qui est son outil privilégié, doivent donner à la démocratie un dynamisme auquel elle ne peut prétendre lorsque son objectif est exclusivement politique sous une dictature de la tyrannie.

Droit et Justice doivent donc ériger le gouvernement en créateur de monde puisque, de toute évidence, les droits sociaux ne peuvent être effectifs que dans une société dont toutes les structures, spécialement les structures économiques, auront été fondamentalement rénovées.

Au premier rang des priorités parmi les tâches du futur pouvoir politique dirigeant, c’est à une véritable entreprise de rénovation sociale à laquelle il devra donc s’atteler sans attendre, dont les préambules constitutionnels et les décisions futures devront clairement en fixer les obligations.

Lorsque le pouvoir politique régnant dévalue et exploite l’homme, comme c’est le cas actuellement à Djibouti, le pouvoir démocratique n’est plus celui qui baisse la tête, celui qui est docile en se contentant de mendicité et de « you you » par ce qu’il a un canon de fusil braqué dans son dos, mais celui qui, au nom d’une certaine idée de l’homme, de sa valeur, de ses droits et de sa Liberté, lui résiste et finit par le dominer.

La démocratie n’est pas une drogue artificielle pour abrutir et soumettre le peuple ; c’est une culture, un état d’esprit qui construit chaque jour.