24/03/11 (B596) La voix au chapitre : LE RISQUE D’ENLISEMENT


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LA VOIX AUX CHAPITRE :
Le 20 mars 2011

LE RISQUE D’ENLISEMENT

-Le massacre du 19 mars 1967 fut l’œuvre d’un colonialiste en retard sur l’histoire qui s’accéléra en Afrique, et la cupidité d’une petite minorité de collabos.

Cette date fut précédée par la guerre tribale de 1949 et la répression aveugle suite au référendum de 1958.

Toutes ces dates qui se répétaient cycliquement ont été effacées, du moins nous l’espérions, par notre accession à l’indépendance en 1977 soit dix ans après, pour interrompre ce cycle de malheur de dix ans.

Il appartient à nos historiens de tirer les leçons de notre vie politique avant et après le colonialisme.

La malédiction Djiboutienne réside dans la division persistance et entretenue depuis notre accession à l’indépendance, du tribalisme érigé en système de gouvernement.

Nous n’avons pas encore réussi à forger dans nos esprits une citoyenneté Djiboutienne et à balayer cette méthode de gouvernement basée sur un fragile équilibre ethnique et un semblant de dosage tribal.

Le malheur veut que même l’opposition, du moins à ses débuts, ait copié la méthode, tout en la dénonçant. L’un des sports national, consiste en la dénonciation du tribalisme, cependant tout le monde le pratique fidèlement.

Heureusement, du coté de l’opposition on voit à présent germer une prise de conscience de ce cancer qui nous a relégué depuis toujours à la dernière place des nations

Ce n’est quand même pas un hasard si nous avons accédé à notre souveraineté nationale, dix sept ans après la grande vague des indépendances de notre continent.

Il faut espérer que le vent du changement qui vient de souffler sur les différents pays et notamment, la Tunisie et l’Egypte, nous débarrasse de cette maladie qui paralyse nos esprits critiques.

Il a fallu à nos amis démocrates Tunisiens, vingt trois jours (23) pour balayer vingt trois ans (23) de dictature féroce, dont se réclamait comme son modèle, notre président, sans complexe.

-Le basculement commence à s’opérer : le pouvoir qui n’avait pas l’habitude de gestion de crise, commence à paniquer à la première manifestation d’envergure, en multipliant les méthodes héritées du colonialisme, jusqu’à puiser dans les lois et les règlements dont nous nous sommes libérés en accédant à notre souveraineté nationale. Le pouvoir démontre, si besoin était, qu’il a conservé précieusement la logistique coloniale

Nos dirigeants seraient-ils nostalgiques de cette époque que nous aimerions jeter à la poubelle de l’histoire ?

Le risque d’enlisement :
Le pouvoir multiplie les arrestations arbitraires. Malgré les intimidations, la population désireuse du changement n’hésite plus à manifester son mécontentement tous les vendredis*. La contestation ne s’essouffle pas et certains voudraient que les manifestations soient quotidiennes !

Pour toute réponse le pouvoir continue à interdire les manifestions même pacifique, encadrées par des partis responsables .Il expulse aussi, les associations étrangères qui sont venues dans notre pays, sans partie pris, afin de nous aider à combler nos déficits démocratiques !

C’est le cas de l’association Etats-uniennes : Democracy International qui avait budgétisé plus de deux millions de dollars américain pour nous aider à nous familiariser avec la méthode de bonne gouvernance et de citoyenneté.

Mal lui en a pris de s’attaquer à ce genre d’ONG qui a pignon sur rue et de la traiter, comme une « simple » association ou parti politique djiboutien. Voilà que maintenant les journaux étrangers dévoilent le véritable visage de nos dirigeants.

Et il en était temps.

Chasser le naturel il revient au galop : Nos dirigeants ne supportent pas la moindre critique d’où qu’elle vienne et ne comprennent pas qu’on puisse se permettre de montrer une autre réalité que la leur.

Lorsque le président est habitué à se voir encenser tout au long du journal télévisé chaque jour, il lui est difficile d’entendre où de voir des critiques sur sa gestion de la république.

Cette république qu’il a pratiquement réduite à une entreprise privée avec drapeau et un siège dans les instances internationales.

A suivre un journal télévisé de la RTD, nous nous demandons s’il se passe autre chose dans le pays et dans le monde en dehors des activités quotidiennes du président

Dans ce monde de communication accélérée, notre pays avec la Corée du Nord reste hermétique aux journalistes.

Le pouvoir ne se gène pas de fermer les antennes étrangères qui se risquent d’émettre la moindre critique sur sa gouvernance. Souvenez-vous de la brusque fermeture de l’antenne de RFI, dont il n’a pas pu supporter son indépendance éditoriale

C’est une angoisse persistante de nos dirigeants actuels : ils détestent les journalistes indépendants qu’ils n’ont pas pu ‘’acheter’’ ou tout autres observateurs libres.

Depuis longtemps, aucun journaliste n’a pu rentrer dans notre pays.

Nous avons appris le mois dernier la tentative avortée du correspondant de la chaine AL JAZIRAH, qui souhaitait couvrir la grande manifestation unitaire de l’opposition, du 18 février dernier.

Une des questions que les agents de nos représentations posent sans complexe, aux demandeurs de visa quelque ce soit sa motivation, -familiale, touristique ou autre, est : Etes-vous journaliste ? Ce qui désarçonne le commun du mortel et surtout décourage le simple touriste qui commence à se poser des questions.

Nul n’ignore que les pays qui se méfient à ce point des observateurs et notamment des journalistes, n’ont pas la conscience tranquille et ont des choses à cacher.

Un signe qui ne trompe pas : Lorsque sur une population estimée à environ 800.000 âmes sur l’ensemble de la République, dix pour cent (10%) de cette population manifeste dans la capitale sans aucun moyen de communication autre que le bouche à oreilles, tout le monde s’accorde à admettre qu’il y a un désir inébranlable de changement et un rejet sans appel du tenant du pouvoir. Les manifestations ont été aussi importantes, si non plus dans les différents villes et villages de l’intérieur de la République qu’à Djibouti ville.

Depuis cette manifestation, que nous pouvons qualifier d’historique, le pouvoir à repris ses vieilles méthodes héritées du colonialisme sans honte en puisant dans les décrets-lois révolus et en instaurant un ‘’Etat de siège’’ non assumé mais de fait.

La multiplication des tensions entre jeunes de différents quartiers qui ressurgissent soudainement par le pur des hasards, comme dans le passé, à la veille des événements importants m’exaspère au plus haut point. Je ne crois pas à la spontanéité de ces bagarres de jeunes des quartiers. Ils sont manipulés et financés à dessein. C’est une honte d’utiliser la jeunesse pour se rendre indispensable et se maintenir indéfiniment au pouvoir.

Pour finir, l’avenir de notre pays m’inquiète :

Si malgré la volonté du changement souhaité par la grande majorité de la population, le tenant du pouvoir s’entête à organiser le 8 avril prochain, c’est-à-dire dans trois semaines, une mascarade d’élection.

Le dirigeant quelque soit sa responsabilité se doit d’anticiper l’événement et non de le subir

S’accrocher coute que coute à son fauteuil ne peut servir de programme, à la manière de l’Ivoirien BAGBO ou du Libyen le colonel KHADAFI ou plus près de nous le yéménite ALI ABDALLAH SALEH. Ces despotes, pour conserver leur fauteuil, n’hésitent pas à massacrer leurs peuples.

Mon souhait, est que nous réussissions malgré tout, à éviter ce genre de méthode pendant qu’il en est encore temps.

AÏNACHÉ
* MALIINTA JIMCAAY – JAABUUTII LAJIRAAY –
GUUMEESIGA JIIFFIYAA JIILCIIYAY –
SIIDAD OOLAH JIDHAAY KII TAGUE –
KANJOGANAAH – JAANTA UUKO LAAB