01/04/11 (B597) Courrier des lecteurs : Ismail Omar Guelleh est plus dangereux que Ben Ali

Au-delà des similitudes réelles, la comparaison entre le régime de Ben Ali et celui d’Ismail Omar Guelleh nous démontre que le dictateur djiboutien est beaucoup plus dangereux que le président déchu.

Comme Zine el-Abdine ben Ali en Tunisie, Ismail Omar Guelleh occupe des hautes fonctions de responsabilités sous le règne du premier Président de la République de son pays avant de succéder à ce dernier affaibli par l’âge et la maladie.

En revanche, contrairement à Ben Ali qui sera accueilli favorablement par les Tunisiens de tous bords auxquels il promet « une vie démocratique avancée », Ismail Omar Guelleh, lorsqu’il s’impose à la tête de l’Etat en 1999, est déjà un homme détesté par les Djiboutiens. Et pour cause, depuis l’accession du pays à l’indépendance nationale on ne connaît pas sur son sol, de forfaitures, exactions ou trafics dans lesquels le nom de cet ex-agent de la DST bombardé chef de cabinet du président de la République ne soit associé.

Des méthodes identiques

Une fois accédé à la magistrature suprême le neveu de Gouled réconforte le régime tribal et antidémocratique tout comme Ben Ali met au pas les partis politiques et les organisations de la société civile, en faisant taire toutes les voix discordantes par la mainmise sur les médias audiovisuels et la presse écrite dans un environnement peuplé de flics, d’informateurs et de délateurs.

A l’instar de l’ACTE (Agence tunisienne de communication étrangère), l’ADI (Agence Djiboutienne de l’Information) soudoie des journalistes mercenaires pour assurer la propagande du régime dans les médias étrangers qui l’acceptent à l’exemple de Jeune Afrique, moyennant des compensations financières considérables voir occultes.

Les messages sont souvent les mêmes. Ben Ali ou Guelleh est un rempart contre l’islamisme. La Tunisie ou Djibouti est une oasis de paix et de stabilité dans un environnement régional ou les sources de tensions ne manquent pas.

Néanmoins ces messages publicitaires ne changent rien à la réalité accablante de ces pays gangrénés par la corruption, le népotisme et la prédation où tout un pan de la population est livré au désespoir en raison de la persistance du chômage, la baisse continue du pouvoir d’achat et la flambée des prix des denrées alimentaires de base. Cela ne change rien au quotidien insoutenable de la population, dans ces pays où les droits de l’homme et les libertés publiques sont bafoués, les opposants au régime réprimés, emprisonnés, torturés et parfois même disparus.( Voir le communiqué de LDDH du 01 /04/2011).

Ces derniers ont beau crier à la dictature, c’est à peine si leur voix est entendue par quelques organisations des droits de l’homme.

Guelleh plus cruel que Ben Ali

En matière d’atteintes aux droits de l’homme et à l’intégrité physique de la personne humaine, Ismail Omar Guelleh dépasse de loin Ben Ali.

A peine quelques mois après la naissance d’un Etat nommé Djibouti d’après son acte de naissance, il se produit un fait majeur fortement préjudiciable à l’avenir de celui-ci: le président Hassan Gouled Aptidon opère un coup d’Etat tribal en se nommant par décret chef de gouvernement. Par cet acte considéré à juste titre de haute trahison par Monsieur Ahmed Dini, le président Gouled accède à la requête d’une poignée d’extrémistes qui ambitionnent à construire un Etat Issa : La nation est prise en otage.

L’objectif à atteindre justifiera la mise en route immédiate du processus de marginalisation de la communauté afar, sur fond d’une terrible répression dont la damnation des habitants de la cité Arhiba le 16 septembre 1977, marque le point de départ.

C’est dans ce contexte qu’un célèbre agent de renseignements de l’administration coloniale devenu indépendantiste après coup fait son entrée sur scène. Il dirige la répression qui vise la communauté afar, désormais appelée à faire le deuil de ses droits en République de Djibouti. Le redoutable chef de cabinet, ordonne, assiste et participe aux scènes des tortures pratiquées dans la villa Christophe contre les jeunes afar, provoquant ainsi l’exil vers l’Ethiopie de presque tous les cadres de cette communauté susceptibles d’aspirer à des fonctions de responsabilités dans les services publics.

Les postes névralgiques seront systématiquement attribués à des Issas éthiopiens qui affluent massivement sur la « terre promise » pour investir tous les domaines de la vie nationale jusqu’à la haute sphère de l’Etat.

Le coup d’Etat tribal sera un succès total à quelques détails près : le pays conserve officiellement le nom de la République de Djibouti et des figurants afars sont maintenus dans le gouvernement et l’Assemblée nationale pour faire croire qu’il s’agit d’un Etat multiethnique.

Ismail Omar Guelleh, le bras répressif du régime tribal, sera dans tous les coups.

De l’attentat anti français de café de Paris en 1990 qui lui servira de prétexte pour lancer la répression contre les Gadaboursis jusqu’à l’affaire Borrel (1995), en passant par les massacres des civils à Arhiba, Goraboud, Yoboki, Day et ailleurs, sans oublier des assassinats commis à l’encontre des personnes au-delà des frontières de Djibouti.

Criminel doublé d’un mafieux, IOG s’associe aux affaires de son frère Idriss qui tourne au tour des trafics des stupéfiants, armes, déchets toxiques, faux dollars et blanchiment d’argent. Il récupère et exploite ces business pour son compte après la mort de son frère.

A l’approche de l’échéance présidentielle de 1999, l’égoïsme d’Ismail Omar Guelleh l’emporte sur la solidarité qui le lie à ses compagnons du groupe extrémiste ressenti comme de redoutables concurrents dans la course pour la magistrature suprême. Il jette en prison Ismail Guedi Hared, Moumin Bahdon, Gabayo ainsi que leur ami commun Ali Mahamadé et se proclame chef d’Etat à l’issue d’une mascarade électorale.

Le dictateur anti-Afar.

Quoi qu’on dise Ismail Omar Guelleh se veut avant tout l’ennemi juré des Afars. Arrivée au pouvoir, il commence par casser l’équilibre ethnique (symbolique) au sein de l’équipe gouvernementale pour mieux humilier et s’aliéner cette composante nationale en multipliant par deux le nombre des ministres Issas. Il signe des accords de paix dont il ne respectera aucune disposition avec le Frud en 1994 et en 2001.

Personne ne saura où va l’enveloppe budgétaire votée à maintes reprises à l’assemblée nationale pour la consolidation de la paix. Pas plus qu’on ne saura à qui profite des recettes considérables générées par le port de Djibouti ainsi que de millions de dollars versés à notre pays à titre des redevances par les différentes bases militaires étrangères installées à Djibouti.

Alors qu’il divise et appauvri son peuple, en le privant de ses droits fondamentaux, Ismail Omar se fait passer pour un spécialiste de la paix dans la région en s’immisçant surtout dans les affaires intérieures de la Somalie. En réalité, il tire les ficelles et contribue à raviver les conflits entre les différentes factions en lutte dans son propre intérêt.

A force de jouer avec le feu, le dictateur Djiboutien a fini par importer dans son pays tous les ingrédients qui ont conduit à l’implosion de la Somalie.


A l’heure où il brigue un mandat à vie en violation de la constitution, Ismail Omar Guelleh qui n’a jamais bénéficié de la légitimité électorale, est plus un candidat imposé par quelques hommes d’d’affaires somaliens (du clan Hawié) que par des Djiboutiens. Pour mater toute contestation populaire et plonger le pays dans le chaos, il compte surtout sur des centaines de Somaliens biens entrainés et équipés d’armes sophistiquées destinées à la Somalie mais extorquées à Djibouti (révélation faite par Wikileaks).

Que reste-il au peuple Djiboutien ?

Les Djiboutiens ont le droit et le devoir de se débarrasser du régime Guelleh. L’heure est plus que jamais à la mobilisation générale pour se débarrasser du tyran Ismail Omar Guelleh et de son régime. Comme à l’accoutumée, nous savons qu’il va s’autoproclamer élu. Mais cela ne devra en rien entamer la détermination du peuple.

Désormais il ne doit y avoir aucun repli dans les manifestations de rue. Au retour, les Djiboutiens doivent s’attendre à l’intensification de la répression de la part du régime. Car malheureusement, il ne sera pas facile de chasser un dictateur comme Ismail Omar Guelleh qui n’aime ni ce pays, ni ce peuple sans payer notre liberté en vies humaines. Nous devons savoir que La lutte de notre peuple entre dans une nouvelle phase du fait de l’intransigeance du dictateur. Une phase où aucune forme de résistance ne devra être exclue.

Il ne faut pas se cacher la vérité, le moment est venu pour les Djiboutiens de se doter des moyens de riposte adaptés afin de faire tomber le régime d’Ismail Omar Guelleh qualifié à juste titre de « dictature la plus féroce de l’Afrique » par Ismail Guedi Hared.