11/04/11 (B599) Courrier des lecteurs / Awdal State : la naissance d’un État est-elle la solution, somme toute finale, face à l’impasse politique en Somalie.

Par Ali Hebjire, Montréal, Canada

Vidéo disponible :
La cérémonie de déclaration d’indépendance de l’État d’Awdal dans la région nord de la Somalie, (Awdal, Salal, et Gabileh) à Minneapolis au Minnesota:
http://www.sctimes.com/videonetwork/897407693001/Local-news-for-Somali-speakers-April-8

Le Somaliland, entité non reconnue par la communauté internationale, n’était qu’une union contractuelle entre les 3 grandes communautés de la région nord de la Somalie, communément appelée le Somaliland. Ce contrat politique que les Oka et autres sultans avaient paraphé à l’époque à Borama (mai 1993) donnait un avantage politique (mais temporaire) aux Issak, avantage consenti par toutes les parties concernées pour permettre une chance à la paix en calmant les passions.

C’est en ce sens que Feu Mohamed Ibrahim Igal, l’ancien président avait résumé avec sa fameuse phrase: xaaq mahe waa haal, c’est à dire que la situation n’est pas juste mais que c’était le seul moyen politique trouvé pour apaiser les frustrations du clan Issak, qui affirmait avoir plus souffert que les autres clans sous le régime dictatorial de Siad Barré. Cette situation ne devait pas perdurer.

Un seul clan accapara la majorité des postes politiques. Sans ne jamais réparer les torts subis par les autres clans. Sans ne jamais trouver de remède aux injustices politiques. Refusant jusqu’aux recensions pour ajuster les déséquilibres, arguant de son combat contre la dictature et l’importance des pertes en vies humaines subies par sa communauté.

Au fil des années, les choses ne changèrent point, scellant pour toujours la nature de l’union, comme étant de facto une administration Issak. Même s’il y eut 3 ou 4 élections présidentielles avec la participation des chefs coutumiers aux décisions gouvernementales dans les précédentes administrations. La venue de Silanyo, vieux routier de la politique et ancien ministre de Siad Barré accentua-t-elle la monoclanisation de l’union, ajoutant l’injure à un népotisme d’un autre âge, et une institutionnalisation du tribalisme (spécialité somalienne) et des chasses aux sorcières pour éliminerles non-Issak des postes administratifs.

Tuant ainsi dans l’œuf une expérience politique nouvelle qui avait fait naitre des espoirs et une foi dans le vivre-ensemble entre les 3 grandes communautés(les Gadaboursi, les Isaak et les Darod – Dulbahante). Des espérances aujourd’hui mortes, démontrant aux yeux de tous et du monde l’incapacité des clans Somalis à entretenir des rapports sains entre eux et à conduire une politique normale, c’est à dire une gestion au-dessus des clans, et non des relations perverses : d’abusés et d‘abuseurs.

Et que ceux-là mêmes qui se disaient les victimes de l’ancien régime, en particulier le clan Issak qui n’a rien appris de l’Histoire, chausse aujourd’hui les bottes de Siad Barré. Alors que ce dernier avait en son temps destitué certains clans au nom d’un idéal, voila les victimes d’hier (se croyant plus malins) et grâce aux dollars que l’administration américaine leur octroient annuellement pour la sauvegarde de la paix dans cette région plus que troublée.

Ces dollars leur sont-ils montés à la tête pour qu’ils commencent à réprimer les non-Issak ? Au lieu d’associer les Gadaboursi et les Darod Harti Dulbahante au processus politique, ils tentent de les assujettir. Au lieu d’instituer, ils les destituent au nom du clan. Voilà, une élite, leurs wahgarad comme on dit en Somali pris dans la répétition du primitivisme.

Voilà une élite aveugle et sans vision politique. Seulement hilares et se croyant malins. Ne profitant de leurs avantages politiques que pour dessaisir les autres au lieu d’investir dans l’avenir. Quitte à impliquer les uns et les autres clans dans un conflit inutile (comme celui qui se poursuit en ce moment même à Khalshale entre les Issak et les Dulbahante).

C’est dans ce contexte que le peuple d’Awdal (régions de Salal et Gabileh) ont pris leur destin en main, et ils ont crée une structure administrative indépendante. Rejoignant de fait l’approche appelée US Dual Track Policy, la dernière trouvaille des américains pour créer une confédération de clans (les derniers pourparlers avec le grand voisin éthiopien viennent de se terminer). Il ne reste plus qu’a finaliser des modalités avec Addis-Abeba et Washington pour aller de l’avant.

Il faut croire que c’est à Washington et Addis- Abeba que se décide la chose politique des Somalis et non à Hargeisa et encore moins ailleurs.

Vive l’État d’Awdal…

Merci à l’équipe d’ARDHD