30/11/2011 (B632) ARDHD : communiqué de presse à propos du refus d’un médecin français établi à Djibouti, de délivrer un certificat à deux victimes de torture dans les locaux de la gendarmerie djiboutienne (SRD)

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COMMUNIQUE DE PRESSE

Paris, le 30 novembre 2011
Contact : Jean-Loup Schaal

Un médecin français établi à Djibouti peut-il refuser de délivrer un certificat à une victime de tortures, au motif qu’il est membre de l’opposition politique ?

C’est ce qui est arrivé à deux victimes de tortures, qu’ils ont subies dans les locaux de la Gendarmerie djiboutienne – SRD (Service de Recherches et de Documentation)

MM Farah Abadid Hildid et Houssein Robleh Dabar, journalistes, membre de l’opposition djiboutienne légalisée et du Conseil national des Droits humains ont été arrêtés le 21 novembre, alors qu’ils étaient en réunion. Pas moins de quatre véhicules de la Gendarmerie djiboutienne ont encerclé le bâtiment et l’ont investi brutalement sans aucun mandat délivré par la Justice.

Farah Abadid et Houssein Robleh ont été immédiatement menottés et conduits dans l’un des véhicules et poussés avec de violents coups de matraque.

Arrivés dans les locaux du SRD, ils ont été torturés avec une violence inouïe. M Farah Abadid se plaint, en particulier, de troubles auditifs et M. Houssein Robleh de douleurs aux parties génitales. Les interrogateurs musclés voulaient leur faire avouer qu’ils avaient incité un juge du siège M Mohamed Cheick Souleiman Cheick Moussa (arrêté lui aussi et gardé à vue dans un lieu secret – on craint pour son intégrité physique et même pour sa vie) à appeler dans un tract à une manifestation pacifique contre le régime dictatorial.

Libérés le 24 novembre dans la soirée, M Farah Abadid Hildid, l’une des victimes s’est présentée le lendemain matin (25/11) au Cabinet du Docteur Bruno Dell’Aquila, médecin français, établi depuis de nombreuses années à Djibouti, pour demander une consultation et un certificat médical, décrivant les lésions constatées par le praticien.

Ce dernier a rédigé une ordonnance mais a refusé de délivrer un certificat (en contravention, semble-t-il, avec les recommandations de l’Ordre des Médecins – France – Cf en annexe les recommandations de 2005 du Dr Jean Pouillard, ancien Vice-Président du Conseil national)

Le lendemain 26 novembre, sur la base d’un échange par mail entre l’ARDHD et le Docteur Dell’Aquila, les deux victimes se sont rendues de nouveau au Cabinet du docteur pour demander une consultation. Saisi par une violente colère, le praticien a refusé de les recevoir et les a jetés à la porte de son cabinet en disant qu’il refusait de recevoir des membres de l’opposition politique djiboutienne.

Ce qu’il a confirmé le soir même par mail à l’ARDHD, assimilant la démarche de ces deux victimes qui souffrent et qui ont aussi besoin d’un certificat pour attester des blessures subies dans les locaux de la gendarmerie, à celle du NKVD soviétique.

Nous lançons un appel à l’Ordre français des Médecins et à RSF (Reporters sans frontières) pour qu’ils rappellent à ce médecin, ses devoirs d’assistance aux malades qui viennent le consulter, sans aucune considération concernant leur appartenance politique ou autre.

Nous lançons un appel à l’OMCT (Organisation mondiale contre la Torture) pour qu’elle puisse enquêter sur ce nouveau cas flagrant de torture, commis à Djibouti par des Gendarmes.

Nous demandons à la communauté internationale de cesser de soutenir un régime dictatorial sanguinaire qui asservit sa population, qui ruine l’économie du pays en détournant tous les fonds publics et les aides internationales et qui torture tous les opposants.

Témoignages audio des deux victimes disponibles :
M Farah Abadid Hildid : https:/old.ardhd.org/affinfo.asp?articleID=15303

M Houseein Robleh Dabar : http:/www.ardhd.org/affinfo.asp?articleID=15304

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Extrait de la recommandation émise
par le Dr Jean Pouillaud,
Vice-Président du Conseil National de l’Ordre des Médecins
et membre de la Société Française d’Histoire de la Médecine.

(Ref UNAFORMEC 2005)
disponible à l’URL : http://www.unaformec.org/formation/certificats/certificats.htm
Téléchargement http://www.unaformec.org/formation/certificats/redaction_certificats.pdf

« En toutes circonstances, le praticien doit honorer le contrat social qui le lie à son patient, répondre en conscience à la confiance que ce dernier accorde à son médecin et privilégier son devoir d’assistance dans les soins et la défense de ses droits. »
(…)

« Le certificat médical, acte ayant pour objet essentiel de « constater », est un témoignage au sens du droit. car il « contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu’il a personnellement constatés » : non pas n’importe quel fait mais un fait médical, directement ou indirectement en relation avec l’état de santé d’un patient au cours d’une consultation médicale, et ceci : moyennant les droits et obligations que lui confère la règle du secret médical »
(…)

« La rédaction des certificats fait partie de l’activité médicale habituelle du corps médical : « L’exercice de la médecine comporte normalement l’établissement par le médecin, conformément aux constations médicales qu’il est en mesure de faire, des certificats, attestations et documents dont la production est prescrite par les textes législatifs et réglementaires » art. R. 4127-76 du code de la santé publique. »
(…)

Les obligations déontologiques : signalement des maltraitances : toute personne incapable de se protéger, victime de sévices, de privations ou de violences sexuelles (art R. 4127-44 du code de la santé publique).
(…)