29/08/2013 (Brève 182) ALERTE ROUGE : Revue de presse / Affaire Borrel : un témoin clé arrêté (L’Humanité)

Affaire Borrel : un témoin clé arrêté

Un ancien officier djiboutien avait témoigné devant la justice française, en 1999, et consolidé la thèse de l’assassinat du juge. Il a été interpellé au Yémen.

Dix-huit ans après l’assassinat du juge Bernard Borrel, la recherche de la vérité est toujours un chemin bordé d’épines. Dernier rebondissement en date : un témoin clé dans l’affaire Borrel a été interpellé samedi dernier au Yémen. Mohamed Saleh Alhoumekani, un Belgo-Yéménite venu rendre visite à sa famille, a été arrêté dans un hôtel de Sanaa à la demande des autorités djiboutiennes. Ses déclarations devant la justice française, en 1999, avaient consolidé la thèse de l’assassinat – et non plus celle du suicide défendue par la France – du juge Borrel. Le magistrat français avait été retrouvé mort en 1995, son corps en partie calciné, dans un ravin de Djibouti.

dossier compromettant

Lieutenant de la garde présidentielle djiboutienne au moment des faits, Mohamed Saleh Alhoumekani avait en novembre 1999 fui son pays pour Bruxelles, d’où il avait accusé nommément l’actuel président djiboutien Ismaël Omar Guelleh (alors pas encore chef de l’État mais chef de cabinet de son prédécesseur, Gouled Aptidon) d’être le commanditaire du crime. Bernard Borrel aurait été trop « fouineur » pour l’actuel président, il aurait recueilli des informations compromettantes sur l’attentat commis en septembre 1990 au Café de Paris, lieu de rendez-vous de la diaspora française ; un trafic d’uranium a été même évoqué, impliquant des lobbies africains et des sociétés européennes.

L’arrestation d’Alhoumekani et sa possible extradition vers Djibouti font craindre désormais que ce dossier ne soit « étouffé », s’est inquiétée lundi l’association de défense des droits de l’homme Survie. Alhoumekani avait obtenu l’asile en Belgique et la nationalité belge après avoir quitté Djibouti. Il possède également la nationalité yéménite.

Hier, le ministère belge des Affaires étrangères a dit avoir eu des garanties de Sanaa sur l’impossibilité d’une extradition en vertu de la Constitution yéménite.

Or Djibouti est toujours sous la botte du dictateur Guelleh, et les arrestations arbitraires, les tortures et disparitions sont monnaie courante, comme le dénoncent régulièrement les associations de défense des droits humains.

La menace d’une extradition n’a pas disparu pour Survie : « L’instruction étant toujours en cours en France, le gouvernement français doit intervenir auprès des autorités yéménites pour empêcher de voir ainsi disparaître un témoin essentiel… À moins qu’il ne cherche à étouffer l’affaire comme les gouvernements précédents ? »

Bernard Duraud