10/03/2019 (Brève 1327) Femmes Solidaires et le COFEDVI adressent une lettre ouverte au Président Macron à l’occasion de sa visite à Djibouti

Dans cette lettre ouverte que vous pourrez lire ci-dessous ou télécharger au format PdF (lien ici), ces associations demandent au Président d’intervenir auprès de Guelleh pour qu’il mette un terme aux viols des femmes dans le Nord et qu’il autorise une enquête sur les plaintes des victimes.
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A l’attention de Monsieur le Président de la République Française

Monsieur le Président,

Le pays que vous vous apprêtez à visiter le 11 mars, est dirigé par Monsieur Ismael Omar Guelleh, qui a succédé à 1999, à son oncle Hassan Gouled.

Nous voulons attirer, Monsieur le Président, votre attention sur les violences que subissent les Femmes à Djibouti et notamment sur le calvaire que vivent les Femmes Afar des régions du Nord et du Sud Ouest, sous blocus économique et sanitaire depuis 42 ans. Depuis 1991, les autorités Djiboutiennes utilisent les viols des femmes Afar par les soldats gouvernementaux comme arme de guerre.

Il ne s’agit pas de bavures, puisque les auteurs de ces crimes ne sont jamais sanctionnés, mais souvent promus à des grades supérieurs.

Ainsi le Comité des Femmes Djiboutiennes contre les Viols et l’Impunité COFEDVI, association djiboutienne clandestine a recensé jusqu’à 300 femmes violées. Ces actes odieux ont souvent lieu en présence des parents, maris ou proches, pour empêcher toute reconstruction familiale ; Ces femmes sont toutes marquées dans leur corps, leur dignité et leur conscience.

Celles qui ont eu le courage de porter plainte ont été persécutées. Les plaintes impliquant les militaires n’aboutissent jamais en République de Djibouti.

Femmes Solidaires a dénoncé l’impunité des viols des femmes Afar par l’Armée de Djibouti auprès du Conseil des Droits de l’Homme à Genève, en déposant une contribution lors de l’Examen Périodique Universel –EPU- de Djibouti en avril 2018.

Suite à des grèves de la faim des femmes djiboutiennes en France et en Belgique, soutenues par Femmes Solidaires et des nombreuses autres organisations, le Parlement Européen a adopté une résolution le 12 mai 2016, demandant une enquête internationale sur les violences faites aux femmes Afar de Djibouti et les viols qu’elles ont subis.

Monsieur le Président,

Nous savons que votre quinquennat est déclaré grande cause nationale pour l’égalité Hommes Femmes et contre les violences sexuelles et sexistes en France. Nous aimerions que vous contribuiez à ce que ces femmes Afar violées obtiennent justice et réparations. Ces violences faites aux femmes s’inscrivent dans un climat général de répression.

Depuis 42 ans la population de la République de Djibouti vit sous une dictature, qui refuse toute alternance par les urnes. Les dernières élections législatives multipartites de 2013 ont été gagnées par la coalition de l’USN, mais le pouvoir djiboutien a inversé les résultats du scrutin en sa faveur.

Ce pouvoir gouverne donc par la force des armes, la répression est son seul mode de gestion des problèmes politiques. Les violations massives des droits humains ont commencé dès le lendemain de l’Indépendance et ont été dénoncées à plusieurs reprises par les organisations de défense des droits humains (Amnesty Internationale, ARDHD, FIDH, OMCT, ACAT, Commission des droits humains des NU à Genève, LDDH) notamment les massacres des civils, les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires et tortures.

Nous vous demandons Monsieur le Président, d’user de toute votre influence pour que cessent toutes les exactions à l’encontre des femmes et plus particulièrement les viols dans le Nord et le Sud Ouest du pays par l’armée du Président Guelleh et qu’une enquête internationale puisse permettre aux victimes de ces crimes d’obtenir justice et réparations.

L’impunité doit cesser. Seule, l’arrestation et la condamnation des coupables qui continuent à vivre en toute tranquillité et à exercer les fonctions de soldats dans l’armée régulière peuvent soulager les femmes victimes de ces violences et leur rendre un peu de leur dignité.

Espérant pouvoir compter sur votre implication pour faire entendre la voix de la France dans la défense des Droits des femmes et des Droits Humains partout dans le monde, nous vous prions d’agréer, nos respectueuses salutations.

Fait à Paris, le 9 Mars 2019

Contact : femmes.solidaires@wanadoo.fr
djiboutiennes-contrelimpunite@hotmail.fr