13/02/10 (B538) Nouvelles de Somalie (4 articles en Français)

__________________________ 4 – Radio Vatican

En Somalie, les civils, premières victimes de la guerre

La guerre dure depuis près de vingt ans en Somalie et les combats se sont intensifiĂ©s depuis 2006. Le haut commissariat de l’ONU pour les dĂ©placĂ©s parle aujourd’hui de plus d’1,5 million de dĂ©placĂ©s et pour le seul mois de janvier, d’au moins 260 morts civils.

Les civils somaliens qui payent une guerre de pouvoir entre deux principales factions.

D’un cĂ´tĂ©, le gouvernement de transition menĂ© par Sharif Cheik Ahmed, un ancien chef de guerre Ă©lu prĂ©sident en 2009 par des Ă©lus modĂ©rĂ©s, de l’autre deux milices dites plus radicales, celle du Hezb-al-Islam et celle de la jeunesse, Al Shebab.

Un conflit d’abord idĂ©ologique, comme l’explique BĂ©nĂ©dicte Godrieaux, expert de la Somalie pour l’association de dĂ©fense des droits de l’homme Amnesty International.

__________________________ 3 – Le Point avec AFP

Somalie: les insurgés promettent une « guerre totale » au gouvernement

Par Mustafa HAJI ABDINUR

Les insurgĂ©s islamistes radicaux shebab ont promis vendredi de mener une « guerre totale » en Somalie face Ă  la menace d’une offensive imminente des forces pro-gouvernementales Ă  Mogadiscio.

Les insurgĂ©s islamistes radicaux somaliens, emmenĂ©s par les shebab, ont galvanisĂ© leurs partisans lors de la grande prière du vendredi et promis une « guerre totale » alors que le pays se prĂ©pare Ă  une offensive gouvernementale d’envergure contre la rebellion.

Des centaines d’habitants de Mogadiscio ont anticipĂ© depuis plusieurs jours cette offensive, fuyant la capitale oĂą convergeaient simultanĂ©ment de nombreux combattants islamistes dĂ©terminĂ©s Ă  en dĂ©coudre avec les troupes gouvernementales et leur alliĂ© de la force de l’Union africaine (Amisom).

En attendant cette offensive imminente, cinq civils ont encore Ă©tĂ© tuĂ©s et 20 blessĂ©s dans un nouvel Ă©change de tirs d’artillerie entre insurgĂ©s shebab et forces gouvernementales dans le nord de Mogadiscio.

Devant des centaines de fidèles rĂ©unis pour la grande prière du vendredi dans la mosquĂ©e Nasreddin, dans le sud de Mogadiscio, cheikh Muktar Robow Abu Mansur, l’un des principaux commandants de la milice islamiste, a promis au gouvernement une lutte sans merci.

« Vous ĂŞtes au courant des derniers bombardements Ă  l’aveugle de l’ennemi sur notre peuple. Au nom de l’islam, nous avons l’obligation de combattre cet ennemi », a-t-il lancĂ©.

« Les guerriers d’Allah sont parfaitement prĂ©parĂ©s Ă  lancer des attaques pour chasser l’ennemi » de la capitale, a affirmĂ© Abu Mansur, appelant « tous les moujahidines du pays « à s’unifier pour vaincre ».

Les shebab contrĂ´lent environ 80% du sud et du centre de la Somalie tandis que le gouvernement du prĂ©sident Sharif Cheikh Ahmed, Ă©lu il y a un an, n’a d’autoritĂ© que sur quelques quartiers de la capitale dont plusieurs points stratĂ©giques tels que le port ou l’aĂ©roport.

« Notre promesse est d’engager une guerre totale contre eux. Etes-vous avec nous? », a lancĂ© Abu Mansur, suscitant un « oui » massif de ses partisans.

« Cette guerre ne concernera pas seulement la Somalie. Tous les guerriers saints de l’islam iront aider nos frères Ă  combattre au YĂ©men, en Afghanistan et en TchĂ©tchĂ©nie », a Ă©galement promis le chef shebab.

Au cri de « Allahu Akbar », plusieurs centaines de partisans des shebab se sont Ă©galement rassemblĂ©s vendredi matin dans l’ancien stade de la capitale, oĂą des chefs de la milice islamiste ont appelĂ© lĂ  aussi Ă  la guerre contre le gouvernement et l’Amisom.

« Nous sommes rassemblĂ©s ici pour montrer au pays notre dĂ©termination. Les ennemis d’Allah se sont alliĂ©s pour nous combattre, mais nous aussi sommes unis pour les vaincre », a dĂ©clarĂ© cheikh Ibrahim Ali, chef shebab de BaĂŻdoa (sud de la Somalie).

Le chef du mouvement islamiste alliĂ© Hezb al-Islam, cheikh Hassan Dahir Aweys a tenu une rĂ©union similaire dans le village d’Elashabiyaha, qui abrite de nombreux dĂ©placĂ©s en pĂ©riphĂ©rie de Mogadiscio.

Dans la matinĂ©e, de nouveaux Ă©changes d’artillerie ont emportĂ© leur lot quasi-quotidien de victimes civiles: les combats ont dĂ©butĂ© lorsque les shebab ont ouvert le feu contre des positions gouvernementales d’un quartier nord de la capitale, Bondere, entraĂ®nant une riposte.

« Les tirs croisĂ©s et les obus de mortiers ont touchĂ© des zones d’habitations dans le nord de Mogadiscio et nos ambulances ont collectĂ© cinq corps et 20 autres civils blessĂ©s », a indiquĂ© Ă  l’AFP Ali Muse, le chef du service des ambulances de la capitale somalienne.

De son cĂ´tĂ©, le chef de la commission de l’UA, Jean Ping a appelĂ© vendredi les Etats membres de l’organisation continentale Ă  envoyer plus de troupes en Somalie et la communautĂ© internationale Ă  respecter ses engagements financiers pris lors d’une confĂ©rence Ă  Bruxelles en avril 2009.

__________________________ 2 – Le Devoir avec AFP

Somalie – Les shebab rejoignent al-QaĂŻda

Les insurgĂ©s islamistes radicaux somaliens shebab ont officiellement proclamĂ© leur allĂ©geance Ă  al-QaĂŻda lors d’une rĂ©union des principaux cadres du mouvement Ă  BaĂŻdoa.

«Nos dĂ©cisions incluent [celle] de porter le djihad dans les rĂ©gions de la Corne de la Afrique et d’Afrique de l’Est afin de libĂ©rer les communautĂ©s islamiques et de lier notre djihad Ă  celui, global, dirigĂ© par al-QaĂŻda et son chef Oussama Ben Laden», a dĂ©clarĂ© Cheikh Fouad Mohamed Shangole, un haut dirigeant shebab.

Fin 2009, le chef des shebab Mohamed Abdi Godane, prĂ©sent Ă  la rĂ©union de BaĂŻdoa, avait proclamĂ© son allĂ©geance Ă  Ben Laden dans un enregistrement vidĂ©o.Mais les shebab demeuraient divisĂ©s sur ce point, une faction demeurant attachĂ©e au seul agenda politique somalien tandis qu’une frange plus radicale refusait tout compromis politique et se rangeait sous la bannière d’al-QaĂŻda.

__________________________ 1 – LibĂ©ration

Somalie : une armée en loque face aux jihadistes (Article complet)

Avec des rĂ©fugiĂ©s enrĂ´lĂ©s au Kenya et de maigres troupes formĂ©es par la communautĂ© internationale, Mogadiscio s’apprĂŞte Ă  lancer l’offensive contre les Shebab.

Stéphanie Braquehais

La classique surenchère de dĂ©clarations belliqueuses pourrait bien, cette fois, dĂ©boucher sur une offensive majeure. Ces derniers jours, des centaines de civils ont fui Mogadiscio tandis que les insurgĂ©s islamistes affluent vers la capitale somalienne. Le fragile gouvernement de transition ne cesse, en effet, d’annoncer une contre-attaque de grande ampleur contre les milices extrĂ©mistes Shebab, qui ont, ces derniers jours, renforcĂ© leurs positions Ă  Mogadiscio.

Le gouvernement ne contrĂ´le que quelques quartiers de sa propre capitale, essentiellement grâce l’aide de l’Amisom, la force de maintien de la paix de l’Union africaine, composĂ©e de 5 000 soldats. Car, en vingt ans de guerre civile, l’armĂ©e somalienne a cĂ©dĂ© la place Ă  des milices locales menĂ©es par des chefs de guerre obĂ©issant Ă  des logiques claniques et poursuivant des intĂ©rĂŞts Ă©conomiques.

Les – rares – soldats somaliens sont la plupart du temps sans uniforme, chaussĂ©s de sandales, et passent leur temps Ă  piller et rançonner les civils pour pallier les salaires qu’ils touchent rarement. Une fois blessĂ©s, ils ne peuvent que s’en remettre Ă  la chance pour survivre. «C’est difficile de savoir pourquoi on se bat, et on sait que personne ne viendra nous aider une fois qu’on est touché», nous a dĂ©clarĂ© Abdi, un soldat blessĂ© d’une vingtaine d’annĂ©es, rencontrĂ© dans un hĂ´pital de Mogadiscio.

«Peur de mourir».

Depuis des mois, les pays voisins de la Somalie, inquiets de la montĂ©e en puissance des Shebab, se mobilisent pour venir en aide Ă  l’embryon de forces gouvernementales somaliennes. L’Ethiopie, qui s’est retirĂ©e de Somalie il y a un an, opère des incursions ponctuelles et continue Ă  armer la milice progouvernementale Al-Sunna dans le centre du pays.

Nairobi, pour sa part, a mis en place des camps d’entraĂ®nement dans le district d’Isiolo, dans l’est du Kenya, pour former des milliers d’hommes recrutĂ©s sur son propre territoire. Ces enrĂ´lements ont dĂ©butĂ© de manière secrète, d’abord dans les camps de rĂ©fugiĂ©s somaliens, Ă  Dadaab ou dans le quartier d’Eastleigh, Ă  Nairobi. Puis, ils ont visĂ© des localitĂ©s frontalières comme Mandera, El-Wak ou Wajir. Selon plusieurs sources, des Kenyans ont aussi Ă©tĂ© recrutĂ©s pour renforcerÂ… l’armĂ©e somalienne. «L’armĂ©e kenyane est venue un jour dans mon village et a dit Ă  tous les jeunes qu’ils toucheraient 600 dollars [environ 439 euros, ndlr] par mois pour aller se battre contre les Shebab en Somalie.

J’ai appris Ă  tirer, Ă  fabriquer des grenades, Ă  manier un fusil d’assaut G3», tĂ©moigne un Kenyan d’origine somalienne de 23 ans nĂ© Ă  Sericho, dans le nord-est du Kenya. Lorsqu’il a Ă©tĂ© recrutĂ© par l’armĂ©e kenyane, en juillet, ses papiers d’identitĂ© lui ont Ă©tĂ© confisquĂ©s. Il y a deux semaines, il a fui le camp d’entraĂ®nement car le salaire promis n’Ă©tait payĂ© qu’au compte-gouttes. «Je ne suis jamais allĂ© en Somalie, j’ai eu peur de mourir», explique-t-il.

A l’opposĂ© de ces mĂ©thodes peu orthodoxes, la communautĂ© internationale s’est engagĂ©e Ă  former 2 000 soldats somaliens, avec pour objectif, Ă  terme, d’atteindre 6 000 hommes. Cependant, mettre en place une armĂ©e digne de ce nom dans un pays qui n’a pas connu de vĂ©ritable Etat depuis 1991 est une gageure. La France a effectuĂ© deux sessions de formation pour 150 et 350 soldats, pendant six semaines en 2009. L’armĂ©e djiboutienne s’est Ă©galement attelĂ©e Ă  la tâche, portant Ă  un millier le nombre d’hommes ayant suivi un entraĂ®nement. Mais les recrues sont très hĂ©tĂ©rogènes : elles vont du vieil officier formĂ© sous Siyad BarrĂ©, le dictateur chassĂ© du pouvoir en 1991, au milicien tout juste sorti de l’adolescence et aguerri dans les rues. Certains, trop jeunes, ont d’ailleurs dĂ» ĂŞtre rapatriĂ©s Ă  MogadiscioÂ…

«Drapeau».

«On a aussi travaillĂ© pour leur inculquer le sentiment d’appartenir Ă  une nation, raconte un officier français. Tous les matins, et tous les soirs, ils saluaient leur drapeau.» Ce drapeau, Ă©toile blanche sur fond bleu, que les islamistes extrĂ©mistes d’Al-Shebab ne veulent plus voir Ă©rigĂ© nulle part, estimant qu’il est contraire Ă  l’islam.

La France se montre discrète sur cette formation depuis l’enlèvement de deux agents de la DGSE, venus conseiller les forces de sĂ©curitĂ© somaliennes, en juillet Ă  Mogadiscio. L’un a Ă©tĂ© libĂ©rĂ© en aoĂ»t, mais le deuxième est toujours aux mains des Shebab et, selon plusieurs sources somaliennes, les contacts restent encore extrĂŞmement laborieux Ă  ce jour.

Plusieurs pays de l’Union europĂ©enne ont pour projet d’envoyer entre 80 et 200 formateurs dans un pays africain – vraisemblablement l’Ouganda, qui s’est portĂ© volontaire – pour accueillir ces formations. Ces bonnes intentions sont accompagnĂ©es de gĂ©nĂ©reuses promesses financières, surtout motivĂ©es par le regain de la piraterie dans le golfe d’Aden, qui cause un Ă©norme prĂ©judice au commerce international. En rĂ©alitĂ©, ces soldats, une fois rentrĂ©s Ă  Mogadiscio, touchent un salaire aussi modeste (100 dollars) qu’alĂ©atoire.

Beaucoup sont donc tentĂ©s de passer Ă  l’ennemi ou, tout simplement, de vendre armes et munitions pour arrondir leurs fins de mois.