23/04/06 (B347-A) Affaire des prisonniers disparus et torturés dans différents pays. Un nouveau probléme de taille pour Guelleh. Des plaintes pénales ont été déposées en France par la LDH et par la FIDH devant le tribunal de Bobigny.

____________________________ Note de l’ARDHD
L’affaire des prisonniers secrets américains monte en puissance et Guelleh risque d’être concerné, car plusieurs rapports font état d’au moins deux mouvements aériens sur l’aéroport de Djibouti et un témoin affirme avoir été torturé sous le portrait de Guelleh.

La plainte déposée conjointement par la LDH et la FIDH en décembre 2005 devrait aboutir à une instruction pénale et elle ne pourra pas ignorer ce qui s’est passé à Djibouti.

Nous dirigeons-nous vers de nouveaux ennuis judiciaires (et diplomatiques ?) auxquels Guelleh devra faire face ?

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1 – Le récent rapport d’Amnesty International – dont nous avions publié des extraits le 12/04/06 dans le numéro B 345 (lien ) et mis en téléchargement les versions complètes (Liens dans l’article) – apporte des éléments qui indiquent que Djibouti aurait pu servir de lieu de détention et de torture.

Extraits du rapport présenté par Amnesty (Traduction réalisée par Amnesty France)

Résumé « Le transfert de prisonniers à l’étranger pour leur arracher des informations par la torture utilisant l’eau, l’arrachage des ongles des mains et des pieds, les coups et les décharges électriques à la demande des responsables américains est une pratique inhumaine qui doit cesser. »

Edmund Markey,
membre du Congrès,
12 mars 2005

En mai 2005, trois Yéménites abasourdis et traumatisés sont finalement sortis d’un réseau clandestin de prisons administrées par les États-Unis et dispersées dans le monde entier. Transférés d’un endroit à l’autre par des vols secrets, ils avaient été maintenus en détention depuis 2003 sans aucun contact avec le monde extérieur. Des délégués d’Amnesty International se sont rendus au Yémen pour les rencontrer.

Les récits éprouvants de ces hommes font entrevoir le système trouble d’arrestations, de transferts et de détentions secrètes mis en place par les États-Unis dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme ». Muhammad Bashmilah et Salah Ali Qaru ont été arrêtés en Jordanie et remis aux États-Unis en octobre 2003.

Deux mois plus tard, Muhammad al Assad a été arrêté en Tanzanie et remis à des fonctionnaires américains. Pour leurs familles, ces hommes ont ensuite « disparu ». Ils ont, en réalité, été incarcérés dans au moins quatre centres de détention secrets gérés par les États-Unis, probablement dans trois pays différents.

Il ressort des informations que ces hommes ont fournies par la suite qu’ils ont vraisemblablement été détenus à Djibouti, en Afghanistan et dans un pays d’Europe de l’Est. Après leur arrestation, Muhammad Bashmilah et Salah Ali Qaru ont, semble-t-il, été transférés de Jordanie en Afghanistan où ils ont été incarcérés dans un centre de sécurité maximale où les détenus étaient en permanence enchaînés à un anneau fixé dans le sol. Muhammad al Assad a été transféré à bord d’un petit avion américain dans un centre de détention probablement situé à Djibouti où il a été interrogé par des hommes qui ont affirmé appartenir au Federal Bureau of Investigation (FBI, Bureau fédéral d’enquêtes).

La version anglaise est plus précise : Muhammad Al-Assad affirme avoir été torturé sous le portrait de Guelleh !!

Muhammad al-Assad says that he was questioned there by US officials, one man and one woman, who told him they were from the USA’s Federal Bureau of Investigation (FBI); a picture of the President of Djibouti hung on the wall of the interrogation room. Muhammad al-Assad spent about two weeks there before being processed for another transfer. This time he thinks he was in a larger plane as he entered it without
having his head pushed down or bending. He believes he was strapped down to a
bench and that the plane had a row of benches along the side. He knows the flight was
long and that it touched down once before flying on to a place that was “cold and muddy”.

2 – La FIDH et la LDH avaient déjà porté plainte le 21 décembre 2005 devant le tribunal de Bobigny (Extrait du communiqué sur le site LDDH : lien)

21 décembre 2005 – Terrorisme
France / Vols clandestins de la CIA. La FIDH et la LDH portent plainte pour détention arbitraire et tortures


Communiqué commun


Paris, le 21 décembre 2005 –  La FIDH et la LDH  déposent ce jour une plainte près le Procureur du Tribunal de Grande Instance de Bobigny pour détentions arbitraires, séquestrations, tortures, et violations de la troisième Convention de Genève sur le sort des prisonniers de guerre.



Au vu des informations recueillies depuis plusieurs années, il apparait que l’agence américaine de renseignements (CIA) a, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, utilisé des avions clandestins dans le but d’acheminer illégalement des détenus dans des centres secrets de détention et/ou, d’utiliser ces mêmes avions comme centres d’”interrogatoires poussés”. A deux reprises au moins, des avions se seraient posés sur des aéroports français (Brest-Guipavas et Paris-Le Bourget), dans des circonstances suspectes, sans que les destinations n’aient été clairement explicitées. Les plus grandes craintes peuvent être formulées quant au transports de prisonniers de la CIA à l’occasion de ces vols La FIDH et la LDH demandent par conséquent à ce que toutes les investigations nécessaires sur ces faits soient effectuées dans les plus brefs délais par l’autorité judiciaire.



La FIDH et la LDH estiment – si les faits sont avérés – que ces procédures de transfert de détenus peuvent être assimilés à une forme de détention arbitraire et de séquestration, et peuvent être constituifs, le cas échéant, de violations flagrantes des Conventions de Genève. En outre, il est désormais avéré que les techniques dites « d’interrogatoires poussés » menées par les agents américains conduisent à l’utilisation de procédés de tortures et mauvais traitements, et sont par conséquent formellement prohibés par la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984. Or il y a tout lieu de craindre que de telles pratiques étaient mises en oeuvre sur les détenus transportés lors des deux vols incriminés.



La FIDH et la LDH ont déposé leur plainte près le procureur du Tribunal de Grande Instance de Bobigny, dans le ressort duquel se trouve l’aéroport de Paris-Le Bourget. Elles entendent souligner la responsabilité première des autorités françaises, d’enquêter sur ces faits et de pousuivre leurs auteurs.



Enfin, la FIDH et la LDH appellent les autorités françaises, et au delà, l’ensemble des gouvernements concernés, à coopérer, dans le cadre des enquêtes en cours, au sein des institutions européennes. Nos organisations craignent en effet que, pour ces gouvernements, après la tournée européenne de Condoleezza Rice, l’indignation cède le pas à la passivité, sinon à la complaisance. La commission spéciale d’enquête du Parlement européen doit en effet pouvoir compter sur la totale coopération des Etats membres de l’UE. De même, les Etats membres du Conseil de l’Europe doivent coopérer dans le cadre des enquêtes dilligentées par le Secrétaire général, le Commissaire aux droits de l’Homme et l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe.