15/08/07 (B408) REUTERS / Vers une « zone verte » à Mogadiscio (Info lectrice)
Par Andrew Cawthorne et Sahal Abdulle
NAIROBI (Reuters) – Harcelé par une guérilla urbaine islamiste, le gouvernement somalien s’efforce de créer en plein Mogadiscio une « zone verte » du type de celle existant à Bagdad pour mettre à l’abri les responsables et les visiteurs étrangers, révèle le Premier ministre.
Dans un entretien accordé mardi à Reuters, Ali Mohamed Gedi déclare: « A l’heure actuelle, les services de sécurité du gouvernement s’emploient à instaurer une ‘zone verte’ où les ressortissants étrangers et ceux qui sont vulnérables pourront demeurer pour leur propre sécurité ».
« J’espère que nous parviendrons à des résultats positifs très prochainement », ajoute-t-il sans donner de précisions.
Le gouvernement de Gedi et le corps expéditionnaire éthiopien appelé fin 2006 en renfort combattent les insurgés islamistes depuis que ces derniers ont été chassés de Mogadiscio en décembre à l’issue de six mois au pouvoir.
A en croire le chef du gouvernement, l’armée somalienne est en train de remporter la guerre contre les rebelles et s’évertue aujourd’hui à « nettoyer » des poches de résistance tenues dans la capitale et ses environs par un dernier carré de 200 à 300 combattants.
Lors des affrontements les plus durs livrés en début d’année, des centaines de civils ont été tués et des dizaines de milliers d’autres ont fui une capitale dont les murs criblés de balles portent toujours les stigmates de la guerre.
Evoquant l’assassinat de deux journalistes de renom et de plusieurs responsables somaliens ce week-end, le Premier ministre reconnaît toutefois ne pas mésestimer la gravité de la situation.
« Les terroristes sont toujours, en partie, actifs et on compte toujours des attentats suicide, des mines et des tirs contre les civils », ajoute Gedi, qui s’exprime, le visage grave, dans le jardin de la maison qu’il possède à Nairobi, capitale du Kenya voisin.
Le chef du gouvernement estime par ailleurs qu’il faut renforcer de façon urgente les effectifs de la mission de l’Union africaine déployée à Mogadiscio, qui comprend 1.600 militaires ougandais au lieu des 8.000 promis.
POURQUOI LE DARFOUR ET PAS LA SOMALIE?
« Je ressens un certain manque d’enthousiasme » sur le sujet de la part du Conseil de sécurité de l’Onu, ajoute-t-il, alors même que la communauté internationale vient d’autoriser le déploiement de 26.000 casques bleus au Darfour.
Son gouvernement, mis en place en 2005 pour tenter de rétablir un semblant d’Etat central dans un pays en pleine anarchie depuis le renversement de Mohamed Siad Barré, souhaite que la force de paix de l’UA soit renforcée de toute urgence, avant de passer sous la bannière des Nations unies.
Pour le moment, assure Gedi, aucune mission d’évaluation du département des opérations de maintien delà paix de l’Onu n’a été envoyée en Somalie.
« Il serait opportun de demander aux Etats membres du Conseil du sécurité ou des Nations unies pour quelles raisons ils mettent autant l’accent sur le Darfour et non sur la Somalie », suggère-t-il.
« A New York, on me disait ‘rétablissez la paix et nous viendrons pour la maintenir’. Mais notre pays a besoin non pas de maintenir la paix, mais de l’instaurer d’abord », poursuit Gedi.
Le Premier ministre s’emporte par ailleurs contre un récent rapport de l’ONG Human Rights Watch (HRW), qui rend l’armée somalienne et ses alliés éthiopiens, au même titre que les insurgés, coupables de crimes généralisés contre la population de la capitale lors des combats de cette année.
« Je rejette entièrement ce que l’ONG affirme. HRW insulte les gouvernements », dit-il en reprochant à l’organisation non-gouvernementale de passer sciemment sous silence tous les aspects positifs de l’action gouvernementale comme la table ronde pour la paix, la mise en place d’administrations locales et l’assistance apportée aux réfugiés.
« Il semble que cette ONG ou d’autres sont liguées avec d’autres cercles opportunistes qui (…) souhaitent maintenir la Somalie dans un état de vide et la transformer en sanctuaire pour terroristes ».
Pour sa défense, le Premier ministre conclut: « Dans tous les conflits de la planète, il existe un risque de bavures (…). Parfois, les ordres ne sont pas respectés mais il est de notre devoir de corriger les erreurs qui peuvent se produire ».