11/03/08 (B438) CICR : Communiqué de presse. Somalie : une détérioration inquiétante de la situation humanitaire
Si l’attention des médias, ces dernières semaines, s’est fixée sur d’autres crises frappant l’Afrique, la situation humanitaire en Somalie a continué de se détériorer de manière alarmante.
Le long conflit armé qui secoue le pays s’est intensifié, avec des vagues de violents combats non seulement à Mogadiscio, la capitale, mais aussi dans d’autres régions. Des centaines de milliers de personnes ont été déplacées. Leur situation a été exacerbée par le manque chronique de pluie. Le coût de la vie a grimpé si brutalement que de nombreuses personnes n’ont pas les moyens de s’acheter de la nourriture et d’autres produits de première nécessité.
Les équipes d’évaluation du CICR signalent que dans plusieurs régions, un grand nombre de familles déplacées doivent survivre avec un peu moins d’un repas par jour et consacrer une part de plus en plus importante de leurs maigres revenus à l’achat d’eau potable. Les pénuries de nourriture et d’eau menacent la survie de la population dans les régions de Mudug, Galgudud, Nugaal, Bakool et ailleurs. Dans certaines parties du pays, les habitants dépendent entièrement de l’élevage et du commerce. Mais beaucoup de zones de pâturage sont devenues arides, et les bergers perdent les animaux qui sont trop faibles pour parcourir des distances de plus en plus longues entre les pâturages et les rares points d’eau. Dans ces régions où de nombreuses familles vivent principalement de l’agriculture, comme à Bakool, les maigres récoltes dues au manque de pluie durant deux ans ont entraîné de grandes souffrances.
Conditions de vie
« Nous sommes allés là où la population déplacée avait peu de nourriture et pratiquement aucun bien », dit Daniel Gagnon, spécialiste des secours du CICR en Somalie. « Les déplacés nous ont dit que les bombardements à Mogadiscio étaient si intenses qu’ils avaient dû fuir en laissant derrière eux même leurs effets personnels les plus indispensables. »
Il y a deux mois, 3 500 familles sont arrivées à Guriel, à 300 km de Mogadiscio. « Ces familles endurent les pires souffrances. Les conditions de vie sont effroyables, déclare M. Gagnon. Dans certains endroits, la nourriture, l’eau, les articles ménagers de première nécessité et les installations sanitaires sont rares ou inexistants. »
Dans la région de Mudug, toutes les communautés visitées par les équipes du CICR avaient perdu leurs principaux moyens de subsistance. L’économie locale est fondée sur l’élevage et l’agriculture, et la plupart des gens vivent au jour le jour. « Il y a une grave sécheresse dans la région, où la pluie n’est pas tombée en suffisance depuis trois ans », explique Julian Jones, coordonnateur du CICR pour les projets eau et habitat en Somalie. « La combinaison d’une grave pénurie d’eau et de pâturages trop éloignés signifie que les gens ne peuvent pas faire grand-chose à part espérer qu’il pleuve. »
Certaines communautés font tout leur possible pour donner refuge au grand nombre de familles déplacées fuyant le conflit armé à Mogadiscio un nombre qui ne cesse de croître. Dans certaines parties de Bakool, en raison de la sécheresse prolongée, des agriculteurs vivent dans la misère. « Après toute une année de lutte, les mécanismes de survie ont atteint leurs limites », dit Henri Maindiaux, agronome du CICR pour la Somalie. « En plus de la nourriture, l’eau devient une préoccupation majeure. »
Soins de santé pour les familles à Afgoye et Danile
Un grand nombre de familles déplacées de Mogadiscio vivent à seulement quelques kilomètres de la capitale. « Dans les districts d’Afgoye et de Danile, les gens sont inquiets de voir augmenter les cas de maladies telles que la diarrhée et le paludisme. Et ils ne peuvent aller nulle part pour se faire soigner correctement, la situation étant trop dangereuse à Mogadiscio », explique Rodolfo Rossi, délégué médical du CICR pour la Somalie.
Au cours des deux premiers mois de 2008, le CICR a aidé le Croissant-Rouge de Somalie à ouvrir trois dispensaires provisoires à Afgoye et un à Danile. Les trois dispensaires d’Afgoye assurent en moyenne 130 consultations par jour, et celui de Danile 70 par jour. Avec le soutien du CICR, la Société nationale gère dans le centre et le sud de la Somalie 25 dispensaires qui desservent une population de 260 000 personnes. Depuis janvier, ces structures ont assuré près de 18 000 consultations.
Traitement des blessés à Mogadiscio
À Mogadiscio, le nombre élevé de blessures par arme demeure une source de grande inquiétude pour le CICR. Chaque jour, les équipes chirurgicales des deux principaux hôpitaux, Medina et Keysaney, soignent des dizaines de personnes blessées par des éclats d’obus ou des balles. Le CICR continue de fournir une assistance importante à ces hôpitaux disposant de services spécialisés.
Depuis le début de l’année, les hôpitaux Medina et Keysaney ont traité plus de 600 blessés, dont 350 femmes et enfants. En 2007, ils avaient traité plus de 4 000 blessés.
Depuis août 2007, deux chirurgiens du Croissant-Rouge du Qatar travaillent à l’hôpital Keysaney, géré par le Croissant-Rouge de Somalie. Ils réalisent environ 120 opérations par mois. En outre, ils organisent des sessions de formation destinées au personnel médical.
Appel à épargner les civils
À plusieurs reprises, le CICR a rappelé aux parties au conflit qu’elles doivent prendre toutes les mesures possibles pour éviter de faire des victimes parmi les civils et d’endommager des biens civils.
Profondément préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire et la dégradation des conditions de sécurité, le CICR a depuis janvier renforcé ses opérations humanitaires dans le pays. « Il est essentiel que le personnel humanitaire, ainsi que les secours et le matériel médical soient respectés et protégés », souligne Pascal Hundt, chef de la délégation du CICR pour la Somalie.
Outre les programmes de secours d’urgence et médicaux, le CICR continue de mener des activités telles que l’installation et la remise en état de systèmes d’approvisionnement en eau, la réalisation de projets portant sur l’agriculture et les moyens de subsistance, la transmission de messages Croix-Rouge et le rétablissement des liens familiaux dans différentes régions du pays. Actif en Somalie depuis 1977 et travaillant en étroite coopération avec le Croissant-Rouge de Somalie, le CICR reste un acteur essentiel en matière d’aide d’urgence aux victimes du conflit armé et des catastrophes naturelles.
Vue d’ensemble des activités d’assistance
Depuis janvier 2008, le CICR a :
· transporté par avion quelque 16 tonnes de matériel médical et chirurgical destinées aux hôpitaux de Mogadiscio ;
· fait parvenir cinq tonnes de matériel médical à 25 structures médicales du Croissant-Rouge de Somalie dans les régions du centre et du sud du pays ;
· fourni aux hôpitaux de Borama et de Bossaso environ 3,5 tonnes de matériel médical et chirurgical pour traiter les blessés de guerre.
Depuis mi-février 2008, le CICR a fourni :
· des rations alimentaires riz, haricots secs et huile végétale pour une période de deux mois à plus de 22 000 personnes vulnérables et sans ressources dans le nord de la région de Mudug et dans certaines parties de la région de Nugaal, et à plus de 27 000 personnes dans le sud de la région de Sool ;
· des assortiments complets d’articles ménagers matériel pour l’installation d’abris, batteries de cuisine, vêtements pour adultes et enfants, matelas, couvertures et jerrycans à près de 155 000 personnes dans les régions de Mudug et de Galgudud, la zone de El Dere, Danile (à la périphérie de Mogadiscio), Medina (dans la capitale) et la région du Moyen-Shabelle.
En outre, deux millions de litres d’eau sont transportés chaque jour par la route et distribués à 350 000 personnes dans les régions de Mudug, du nord de Bakool, de l’est de Bay et de Galgudud.