05/09/09 (B514) RSF / Deux journalistes détenus depuis dix jours et condamnés à un an de prison sur la base d’une loi obsolète

28 août 2008 – Libération sous caution du rédacteur en chef de l’hebdomadaire Reporter

7 mai 2008 – Le rédacteur en chef adjoint d’Enku remis en liberté sous caution
Reporters sans frontières exprime son incompréhension après la condamnation à un an de prison de deux journalistes, jugés suite à une plainte du procureur de la République et accusés de "diffusion de fausses nouvelles". Tous deux sont détenus depuis le 24 août 2009 à la prison de Kaliti, en banlieue d’Addis-Abeba.

"Ces condamnations et le réexamen de dossiers pourtant anciens sont d’autant plus surprenants que, depuis 2005, les autorités éthiopiennes semblaient montrer des signes d’ouverture vis-à-vis des médias. Après l’adoption d’une loi antiterroriste dont certains articles peuvent entraîner des entraves à la liberté de la presse, ces récentes incarcérations rappellent que l’exercice du métier de journaliste en Ethiopie reste très dangereux. Il est incompréhensible que la justice éthiopienne se réfère encore à une loi qui n’est plus en vigueur", a déclaré l’organisation, qui demande la remise en liberté immédiate des deux journalistes.

Asrat Wedajo, ancien directeur de publication de l’hebdomadaire disparu Seife Nebelbal, a été condamné à un an de prison par le juge Zewdinesh Asres, de la Haute Cour fédérale, pour avoir publié, en 2004, un article faisant état de violations des droits de l’homme à l’encontre d’individus dans la région Oromia. Le journaliste n’a pas bénéficié des services d’un avocat. A connotation politique, Seife Nebelbal avait l’habitude de dénoncer les supposés "mauvais traitements" des Oromos et a été interdit par les autorités éthiopiennes en 2005, dans le cadre de la répression du gouvernement de Meles Zenawi contre la presse.

Le journaliste a été condamné en vertu du code pénal éthiopien et de la loi sur la presse de 1992, désormais obsolète depuis l’entrée en vigueur, en décembre 2008, de la loi sur la liberté des médias et l’accès à l’information.

Dans une autre affaire, Ibrahim Mohamed Ali, directeur de publication de l’hebdomadaire Salafiyya, a également été condamné à un an de prison. Les autorités lui reprochent la publication, en 2008, d’une tribune critiquant le projet du ministère de l’Éducation d’interdire le port du voile aux étudiantes musulmanes dans les écoles publiques. A l’époque, Ibrahim Mohamed Ali avait passé dix jours en prison, en compagnie de Maria Kadim et Ezedin Mohamed, éditeur et directeur de publication du journal islamique Al-Quds.

Le 15 juillet dernier, Reporters sans frontières a adressé une lettre au ministre de la Communication, Bereket Simon, pour lui faire part de son inquiétude concernant l’adoption de la récente loi antiterroriste et les entraves à la liberté de la presse que ce texte est susceptible d’engendrer.

Reporters sans frontières avait effectué une mission en Ethiopie, en octobre 2008, au cours de laquelle elle s’était entretenue avec Bereket Simon, alors conseiller du Premier ministre. Bereket Simon avait fait part de la volonté du gouvernement éthiopien de mener une politique inclusive vis-à-vis de la presse et d’apaiser les conflits avec les journalistes. Reporters sans frontières a observé que des efforts ont été fournis par le gouvernement pour ouvrir l’accès à l’information pour les journalistes, mais redoute que des condamnations comme celle d’Asrat Wedajo et Ibrahim Mohamed Ali enrayent les progrès enregistrés.

"Nous plaçons nos espoirs dans la volonté des autorités éthiopiennes de créer un climat favorable à la liberté de la presse, garantissant aux journalistes de travailler à l’abri des intimidations et de la peur", a conclu l’organisation.