10/12/2013 (Brève 330) Cour européenne des Droits de l’Homme. La cour décide de renvoyer devant la Grande Chambre, l’affaire qui concernait la condamnation de Me Olivier Morice, avocat d’Elisabeth Borrel, qui avait été condamné par la Cour de Cassation pour avoir remis en cause l’impartialité du juge. L’ARDHD adresse toutes ses félicitations à Me Morice et se réjouit d’une nouvelle avancée dans le dossier Borrel…. Elle espére que la justice finira par triompher, pas à pas …

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___________ Extrait du communiqué de presse de la CEDH

Renvoi accepté

Morice c. France (requête no 29369/10)

Le requérant, Me Morice, est un ressortissant français, né en 1960 et résidant à Paris
(France). Il est l’avocat de Mme Borrel, veuve du juge français Bernard Borrel, qui, le
19 octobre 1995, fut retrouvé mort à quatre-vingts kilomètres de la ville de Djibouti, le
corps en partie carbonisé.

L’enquête menée par la gendarmerie conclut au suicide par
immolation. En novembre 1995, une information judiciaire fut ouverte à Toulouse pour
rechercher les causes de la mort du magistrat. En février 1997, Mme Borrel, contesta la
thèse et se constitua partie civile en déposant plainte pour assassinat.

Une information
judiciaire fut ouverte et confiée à la juge M. et au juge L.L. Le 21 juin 2000, les deux
magistrats-instructeurs furent dessaisis du dossier par la cour d’appel de Paris.
Le 7 septembre 2000, parut dans le journal Le Monde un article intitulé « Affaire Borrel :
remise en cause de l’impartialité de la juge M. » L’article relatait que les avocats de Mme
Borrel avaient « vivement » mis en cause la juge M. auprès de la Garde des sceaux et
l’accusaient d’avoir « un comportement parfaitement contraire aux principes
d’impartialité et de loyauté ».

Suite à une plainte des magistrats mis en cause le tribunal déclara Me Morice complice de
diffamation publique à l’égard des juges M. et L.L.
Invoquant l’article 6 § 1 (droit à un procès équitable) de la Convention européenne des
droits de l’homme, le requérant soutient que sa cause n’a pas été examinée de manière
équitable et par un tribunal impartial devant la Cour de cassation. Il expose que le juge
J.M. qui faisait partie de la formation ayant statué sur son pourvoi avait préalablement et
publiquement exprimé son soutien à la juge M. lors de l’assemblée générale des
magistrats du tribunal de grande instance de Paris du 4 juillet 2000.

Sur le terrain de
l’article 10 (liberté d’expression) de la Convention, il dénonce une atteinte à sa liberté
d’expression.
1 L’article 43 de la Convention européenne des droits de l’homme prévoit que, dans un délai de trois mois à
compter de la date de l’arrêt d’une chambre, toute partie à l’affaire peut, dans des cas exceptionnels,
demander le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre (17 membres) de la Cour.

En pareille hypothèse, un
collège de cinq juges examine si l’affaire soulève une question grave relative à l’interprétation ou à l’application
de la Convention ou de ses protocoles ou encore une question grave de caractère général. Si tel est le cas, la
Grande Chambre statue par un arrêt définitif. Si tel n’est pas le cas, le collège rejette la demande et l’arrêt
devient définitif. Autrement, les arrêts de chambre deviennent définitifs à l’expiration dudit délai de trois mois
ou si les parties déclarent qu’elles ne demanderont pas le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre.

Dans son arrêt de chambre du 11 juillet 2013, la Cour a conclu, à l’unanimité, à la violation de l’article 6 § 1. Un membre de la Cour de cassation ayant statué sur le pourvoi du requérant avait antérieurement exprimé son soutien à une juge partie prenante de l’affaire qui l’opposait à Me Morice. La Cour a conclu que l’impartialité de la Cour de cassation pouvait susciter des doutes sérieux et que les craintes de Me Morice pouvaient passer pour objectivement justifiées.

Par ailleurs, la Cour a conclu, à la majorité, à la non-violation de l’article 10. Elle a estimé que les juridictions internes ont pu être convaincues que les propos tenus par Me Morice dans le journal Le Monde étaient graves et injurieux pour la juge mise en cause, qu’ils étaient susceptibles de saper inutilement la confiance du public à l’égard de l’institution judiciaire et enfin qu’il existait des raisons suffisantes de condamner Me Morice pour diffamation.

Le 9 décembre 2013, l’affaire a été renvoyée devant la Grande Chambre à la demande du requérant.