14/02/2012 (B643) L’anniversaire de l’ARDHD (Jean-Loup Schaal)

Quand une association fête 20 années d’existence, il est d’usage que son Président rappelle les différentes étapes et les succès obtenus en relation avec son objet « social ».

Dans le contexte actuel qui prévaut à Djibouti, j’ai choisi d’éviter cela et de ne pas transformer cet anniversaire en opération de communication.

Certes l’ARDHD pourrait afficher de nombreux succès, dont celui d’être le média probablement le plus consulté par la communauté djiboutienne, y compris par ses détracteurs institutionnels …

S’il y a un succès qui nous a particulièrement rempli de joie au sein de l’équipe : c’est la libération de la petite Hasna, qui purgeait une peine non fondée au fond des geôles de l’Ethiopie et c’est l’accueil de sa famille (avec 3 autres) par la France ».

Mais il serait particulièrement mal venu de parler du passé, alors que c’est l’avenir qui se joue en ce moment à Djibouti.

L’avenir c’est le changement de régime, c’est l’ouverture à la démocratie, c’est une justice indépendante au service de la vérité, c’est la liberté de penser, de s’exprimer, c’est aussi le respect de la propriété individuelle et la fin de la corruption, c’est enfin et surtout la fin des tortures et des exécutions sommaires, le respect de toutes les populations et la réconciliation des différentes composantes du pays, pour vivre ensemble et pour participer au développement de la république, afin que les jeunes générations puissent espérer dans l’avenir.

C’est la raison pour laquelle, nous avons choisi de fêter symboliquement et officiellement le 20 ème anniversaire de l’association, le 18 février 2012, le jour même où les dirigeants de l’opposition, dans le pays, appellent à la mobilisation pacifique des populations pour dénoncer l’arbitraire et la main mise sur l’appareil de l’Etat par un couple et ses courtisans.

Que va faire l’ARDHD dans sa 21ème année ? En particulier

  • Continuer à soutenir les opposants sincères et véritables qui sont engagés sans réserve d’aucune sorte, dans la lutte contre la dictature,
  • Continuer à donner la parole à ceux qui en étaient privés et qui veulent exprimer leur rejet de la tyrannie et leurs espoirs dans un changement de régime,
  • Continuer à diffuser de l’information non seulement pour la communauté djiboutienne où qu’elle soit dans le monde, mais aussi pour les observateurs internationaux. Culpabiliser toutes les organisations et tous les gouvernements qui continuent à soutenir Guelleh, pour des motivations souvent éloignées du respect des Droits de l’Homme.
  • Continuer notre mobilisation en faveur des réfugiés djiboutiens d’Addis Abeba, qui vivent depuis 20 années, pour certains, dans la précarité, l’insécurité et la misère et qui peuvent légitimement espérer un secours du UN HCR pour obtenir la réinstallation dans un autre pays.

Avant de terminer, je renouvelle tous mes remerciements en premier lieu à l’équipe bénévole de l’ARDHD. Certains de ses membres ou de ses correspondants sont bien connus des lecteurs : Omar Gabasse, Ariko, Roger Picon ; il y a aussi celles et à ceux qui travaillent de façon particulièrement efficace dans la discrétion et qui assure une veille quasi permanente 7/7 et parfois 20/24 .. sans oublier de nombreux correspondants habituels, contraints de conserver l’anonymat pour éviter des mesures de représailles contre les familles restées au pays.

Mes remerciements s’adressent aussi à toutes celles et à tous ceux qui nous adressent des messages, des informations vérifiées ou des points de vue. Sans elles et sans eux, le site n’existerait pas sous son format actuel, car l’important est de diffuser des informations qui sont occultées par les média à la solde exclusive du couple infernal qui gère le pays (comme s’il s’agissait de sa propriété) et qui ruine et asservit les populations en utilisant la force sauvage, en particulier, celle des bataillons de la Garde républicaine et des redoutables agents du SDS.

Enfin je n’oublierai pas nos partenaires et nos contacts. En particulier la LDDH et son Président Jean-Paul Noël Abdi, ASF, RSF, la FIDH, la CIJ, l’OMCT et l’association SURVIE et ses bénévoles, qui reprend nos informations et qui nous apporte son soutien dès que nous la sollcitons pour renforcer « notre force de frappe médiatique », dans le respect de ses propres objectifs.

Nous espérons qu’en ce 18 février, les forces de Police et de Gendarmerie prendront conscience de la légitimité des revendications de la population souveraine et qu’elles s’abstiendront d’intervenir contre les manifestants pacifiques, dont une grande partie sera constituée par leurs proches parents.

Nous leur rappelons que des Djiboutiens, leurs soeurs et leurs frères, vivent aujourd’hui avec les séquelles des tortures qu’elles /ils ont endurées dans les locaux du SRD, du SDS et autres lieux secrets.

Nous leur rappelons que des familles sont endeuillées par les morts, les viols, les harcèlements commis par des fonctionnaires des forces de sécurité, qui se sont mis au service du dictateur et non de la population, comme c’était leur mission à l’origine …

Nous espérons que cette mobilisation (décidée localement), dans le prolongement de la journée du 18 février 2011, marque le début d’un changement que la population appelle de tous ses voeux.

Jean-Loup Schaal

13/12/2011 (B634) Survie : La poudrière djiboutienne (JL Schaal) un article à lire sur la version papier du dernier Billets d’Afrique et d’ailleurs, n°208, décembre 2011, que nous publions avec l’aimable autorisation de la rédaction.

Alors que la gabegie et
la corruption siphonnent
les finances de l’Etat,
la contestation sociale
s’amplifie neuf mois après
l’élection frauduleuse de
Guelleh.

Chaleureusement
salué par Sarkozy pour ce
troisième mandat, Guelleh
accentue la répression au
risque d’embraser le pays.
Asséchées par la corruption du
gouvernement du président Ismaël
Omar Guelleh et par les patrons des
grandes entreprises nationales, les finances
de Djibouti sont exangues.

La voracité de
Guelleh, sa famille et ses proches continue
de plus belle avec des retraits considérables
d’argent, plusieurs millions d’Euros à chaque
fois. Et comme les aides internationales
semblent avoir été pratiquement stoppées
(notamment celle de la France), le Trésor
djiboutien n’a plus de ressources financières.
Le désengagement de la France est visible
alors que cet été, la 13e DBLE (demi-brigade
de légion étrangère), l’un des deux régiments
opérationnels et le plus emblématique, qui
était stationné à Djibouti, a levé le camp
pour rejoindre la nouvelle base française
d’Abu Dhabi.

Sans que l’information ne soit
confirmée, le second régiment opérationnel,
le 5e RIAOM, devrait faire ses valises dans
les prochains mois. Ne resteront plus que la
base aérienne, la base navale et le 10e bataillon
de commandement et de service, puisque la
fermeture de l’hôpital militaire Bouffard a été
évoquée dans le projet budgétaire soumis aux
députés français.

Depuis de nombreux mois,
on parle de la renégociation des accords de
défense entre les deux pays. Les négociations
butent sur des points majeurs sans que l’on
sache lesquels. On peut imaginer que les
prétentions financières du président Guelleh
quant au loyer de la base française dépassent
le seuil maximal proposé par la France.

Amende record pour Total


Dans ce contexte de crise, il est tentant de voir
dans la récente condamnation de deux filiales
de Total à la somme record de 204 millions
d’euros, une mesure de compensation. Total
Djibouti et Total Marketing Djibouti ont été
condamnés pour une affaire de pollution,
des fuites d’hydrocarbures venant d’un
réseau ancien d’oléoducs, découvertes en
1997. En réclamant un tel montant, Guelleh
ne cherche-t-il pas à faire pression dans les
négociations avec le gouvernement français.

Une thèse probable alors que Total avait
suspendu récemment l’approvisionnement
des véhicules des forces de police pour des
arriérés de paiement. Ce jugement permettrat-
il de pratiquer des compensations dans le but
d’annuler les dettes de l’Etat djiboutien auprès
du pétrolier ?

Un avenir inquiétant

Dopée par les exemples du printemps arabe,
la population djiboutienne commence à se
rebeller et à réclamer ouvertement le départ
du dictateur. La tension est palpable et n’a
cessé de monter en puissance depuis la grande
manifestation du 18 février 2011 puis la
«réélection» de Guelleh.

Le niveau moyen
de ressources par habitant continue à baisser:
la moitié des familles ne ferait plus qu’un
seul repas par jour. Le niveau de chômage est
considérable avec un taux de 74 % de chômeurs
dans la population en situation de travailler,
généralement admis. Après les retraités, ce sont
surtout les élèves, les étudiants et les jeunes
diplômés-chômeurs, qui conduisent des actions
quasi-quotidiennes dans les rues de la capitale.

La répression est violente; les manifestants, y
compris mineurs, sont arrêtés par centaines et
transférés dans différents centres de la ville:
brigades de gendarmerie, école de police de
Nagad et parfois détenus dans des lieux de
détention secrets.

Les retards de paiement
dans la fonction publique sont fréquents, la
mise en liquidation d’entreprises privées et les
licenciements massifs de personnels dans la
construction et la gestion du port s’accélèrent.
Certains quartiers n’ont accès à l’eau qu’une
heure par jour, l’alimentation électrique est
souvent interrompue et les hôpitaux manquent
de tout.

Pour toute réponse, le régime prend pour cible
des membres de l’opposition, les journalistes et
les défenseurs des Droits de l’homme. Certains
ont passé plusieurs jours dans les salles de
torture de la gendarmerie et du SDS (services
secrets Djiboutiens), avant d’être remis en
liberté par un juge intègre et courageux.

Celui-ci, Mohamed Cheick Souleiman, paye
d’ailleurs très cher son engagement pour
la justice, puisqu’il a été à son tour arrêté et
torturé avant d’être mis au secret. Malgré tout,
les langues se délient. Plusieurs opposants,
dont Houssein Robleh Dabar, ont osé raconter
publiquement le récit de leurs tortures.

Il est à
noter qu’un médecin français installé de longue
date à Djibouti, a refusé, avec virulence, de
délivrer des certificats médicaux aux victimes
Djibouti
pour attester des tortures subies.
Alors que la répression s’accentue, Guelleh
se prépare au pire.

D’après plusieurs témoins,
le régime assure la distribution d’armes et
d’argent dans des quartiers connus pour
être proches de l’ethnie du président avec
des agents kenyans et éthiopiens qui font la
tournée en pick-ups.

De quoi embraser le pays
à la moindre étincelle.

Jean-Loup Schaal

29/07/2011 (B614) Deutsche Welle / Arbre à Palabre, l’émission animée par Frejus Quenum. Cette semaine : Les causes profondes de la sécheresse dans la corne de l’Afrique. A écouter ou a télécharger (25 minutes).

Lien avec l’enregistrement sur le site Deutsche-Welle

Les causes profondes de la sécheresse dans la corne de l’Afrique

Les invités de l’émission "arbre à palabre" sont unanimes sur un point: la sécheresse dans l’est de l’Afrique est surtout liée aux mauvaises politiques agricoles et à l’absence de stabilité politique dans la région.

Reçus par Fréjus Quenum, trois experts ont discuté des principaux aspects du sujet à travers le prisme du changement climatique, des relations internationales et des droits de l’homme. Ces invités sont: René Ngongo Conseiller politique forêt auprès de l’Ong Greenpeace International, Joseph Vincent Ntuda Ebode Directeur du centre de recherches et d’études politiques et stratégiques à l’Université Yaounde 2 du Cameroun et Jean-Loup Schaal responsable de l’Association pour le respect des droits de l’homme à Djibouti.

_______________________ Arbre à palabre du 29/07/11

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