12/01/05 (B280) Djibouti : la douce descente aux enfers (Par Mohamed Qayaad)
Les djiboutiens(nes)vivent au sein d’un leurre magistral, d’une République
disparue que le régime autocratique s’acharne à ne pas reconnaître
telle, et que ses politiques artificielles prétendent perpétuer.
La réalité
est insensée, les chiffres sont terrifiants :40.000 personnes meurent
de faim chaque jour dans le monde, ce sida qui tue 2 millions d’Africains
chaque année. Combien meurent-ils de faim ou de sida à Djibouti
? Nous ne le saurons jamais.
Cette dictature qui broit
des centaines de milliers djiboutiens repose sur une effroyable "machine
de mort", en large partie secrète :escadrons de la mort, torture
systématique, enlèvements et disparitions, manipulation de la
violence des opposants, désinformation et "action psychologique". . .
La pratique généralisée
de la torture, "banalisée" par la milice politique(SDS)depuis
1977, est en quelque sorte au fondement de la folie meurtrière qui
se déchaînera plus tard, caractérisée par le mépris
absolu de la vie humaine et du corps des adversaires supposés .
Ce peuple affamé, anéanti
au vu et au su de tous pour "la très juste cause" et les
intérêts de l’ex-puissance colonisatrice.
Un peuple livré
à lui-même, mais nous posons toujours les mêmes questions
fantômes auxquelles, beaucoup le savent, rien ne répondra, sinon
le désastre des vies que ce silence ravage et dont on oublie qu’elles
représentent chacune un destin.
Que devient-elle la RDD ? Une
promesse de Vie ? Un Enfer, déjà, qui ne dit pas son nom ?
Mais Dante a-t-il imaginé
l’Enfer de ceux qui réclameraient l’Enfer en vain ? De ceux pour qui
la pire damnation serait d’en avoir été chassés ?
N’est-il pas terrifiant
de demeurer ainsi passifs, comme paralysés, tétanisés devant
ce dont dépend notre survie ? Ne faut-il pas se demander si cette survie
est programmée ou non ?
A fuir ces questions, on
s’épargne dans l’immédiat la révélation du pire, mais
craindre la révélation du pire, n’est-ce pas risquer d’y être
mieux précipité ?
Or ce régime dictatorial
s’emploie à dévier, supprimer ces questions;il se mobilise, converge
vers d’autres, et focalise autour d’elles l’opinion, qu’il tient de la sorte
en suspens autour de faux problèmes.
Demandez-vous à
quel point la cruauté de ces vies abrège leur durée, et
s’il est besoin de murs, de miradors pour incarcerer ces gens.
Revisite-t-il/elle(djiboutien(ne))
ce temps d’une lenteur insidieuse au cours duquel il/elle est devenu(e)l’un
de ceux qui , même vus, même entendus, ne sont pas regardés, ne
sont pas écoutés, et qui, d’ailleurs, se taisent ?
De ces chômeurs
rejetés, puis écrasés sur les bords de la route. Une route
qui ne mème plus aux mêmes lieux. Où conduit-elle ? Nul ne
sait.
Destins annulés, jeunesse
détériorée. Avenir aboli. Que peuvent-ils attendre de l’avenir ?
Quelle sera leur vieillesse, s’ils y atteignent ?
De ces enfants exclus
, d’un système scolaire inique et impitoyable qui, n’ont plus rien à
espérer puisque cette democrature ne leur a jamais rien donné.
Qu’ont-ils à perdre
puisqu’ils n’ont rien reçu, sinon des modèles de vie que tout
les empêche d’imiter ?
On atteint ici à
des sommets de l’absurde, de l’inconscience planifiée. De la tristesse, aussi.
Ce siècle nous
a appris que rien ne dure, pas même les régimes les plus bétonnés.
Qu’allons-nous devenir ? Que faire ? Par où commencer ? Autant de questions
qui restent sans réponses face à ce régime génocidaire.
Quel avenir peuvent-ils
imaginer ? même le rêve ne leur a jamais été permis.
Que peuvent-ils attendre
de l’avenir ? Avenir sans projet ? Un avenir qui leur réserve <<chômage>>, <<misère>>, <<rejet>>, le
sentiment d’être inutiles, ou, mêmes, parasitaires ? Des virtuoses
de l’exclusion !
De ces enseignants humiliés, ruinés
puis exilés. On leur reproche le choix de l’exil avec raison certes;mais
on oublie bien vite le caractère dévastateur de la violence
et du dénie de droits qu’ils subissent en amont.
De ces répudiés, de
ces laissés pour compte jetés dans un néant social. De
ces oubliés-là (les retraités), abandonnés, proscrits.
Hors jeu !
De ces jeunes filles
désorientées, désemparées, qui se prostituent afin
de subsister un temps. On le sait. Et il y a des clients. Qui hurle, sinon les
parents de ces victimes ? Quels boucliers levés contre cette pédophilie
tolérée ? Seuls à réagir, les consommateurs .
Ces satrapes (IOG et Cie)ne
devraient-ils pas s’attaquer non pas tant aux épiphénomèmes
que sont la corruption, l’alcool , la drogue, la prostitution mais aux phénomèmes
qui en est l’origine: la pauvreté dont nous savons qu’elle conduit
ces jeunes filles à se prostituer au bénéfice des possédants, à
seule fin de survivre encore un peu.
Encore faut-il qu’ils
aient la volonté de le faire ?
Devraient-ils fuir le
désespoir au moyen de mensonges, de camouflages, de fuites aberrantes ? Cette
attitude-là, est désespérée, désespérante.
Discours sur discours
annonçant <<des priorités>> qui n’apparaîssent
pas, qui n’apparaîtront pas.
Pour ne citer la Nation
du 30/12/04 <<Les Dikhilois et les Dikhiloises, [. . . ] Cette écoute
de proximité a permis au Président de délivrer à
ses interlocuteurs okarois un discours axé sur la volonté du
gouvernement de développer les économies locales pour faire
face au processus de paupérisation. >>
Mais qui donc subit la
honte, parfois la mort et chaque fois une vie détériorée ?
Faut-il tenir ainsi les brimades pour le modèle sur lequel il faudrait
s’aligner. Est-ce la norme le fait d’être brimé ?
Les préjugés
contre eux sont si défavorables qu’ils sont jugés coupables
d’habiter cette zone.
Les vies dévastées
de ces gens n’éveillent guère de scrupules chez la Nation. Les
scrupules sont pour elle, honteux d’être honnis.
L’imagination de l’article
de la Nation est sans limite lorsqu’il s’agit de distraire la galerie avec
des bricolages débiles, sans effets, sinon néfastes, sur rien.
Ces populations résident
dans un paysage qui ne les intéresse guère.
Ce paysage fait partie
pour eux d’un passé destiné au folklore ou à l’oubli.
L’opprobre dans lequel
on les tient, la punition qu’on leur inflige, pourraient être annonciateurs
de dérives sans limites, car ces populations molestées ne sont
plus désormais nécessaires aux desseins de ceux qui les tourmentent.
Ces malfrats ont transformé
Djibouti en une immense tombe:vivants, nous sommes morts – des morts vivants
-.
Mais le cynisme porte
tout pouvoir à retourner contre ceux qu’il opprime le ressentiment.
Leurs discours survolent
les vrais problèmes ou les faussent, des discours qui sans fin ressassent
les mêmes promesses intenables, ces discours-là sont passéistes
et remuent sans fin des nostalgies qu’ils sauront toujours utiliser pour mieux
mentir davantage.
La remise en cause des
fausses questions posées, le rétablissement de celles évitées, la
dénonciation de celles escamotées:dénoncerait sans doute
la duplicité du pouvoir autoritaire, ou plutôt des ioguistes, et
leur intérêt à ce que la société djiboutienne
demeure inféodée au système périmé, fondé
sur la culture de bassesse, de l’avilissement.
Le régime ioguiste
utilise alors le système quasi parfait de la double pensée que
Georges Orwell avait inventé en 1949, un an avant sa mort, pour . . . son
célèbre 1984 ! :<<il fallait oublier un critère devenu
inopportun, mais aller le rechercher quant il redevenait nécessaire, aussi
longtemps qu’il le fallait. >>
Cette réalité, qui
ne souffre aucune controverse chez les gens de bonne foi, définit la
différence fondamentale du climat électoral: dans cette république
(Djibouti) soumise à la terreur d’une machine à tuer devenue
folle, soutenue ou dirigée par la France, les conditions de n’importe
quel scrutin sont compromises à l’avance.
La route de leur paradis
est courte et ils jouissent de ce qu’ils trouvent de meilleur :l’alcool, la
drogue , la prostitution. . .
Leur espoir est plein
de mépris, mais le cri des opprimés est plein de paix.
Notre ultime espoir c’est
la raison, que l’homme a laissé disparaître dans un océan
de malhonnêteté.
L’Amour
du créateur me donne l’espoir qu’une vie meilleure se prépare.Mohamed Qayaad