15/01/05 (B281) Le 15 août un lecteur a adressé une lettre au Chef d’Etat-Major de la Police à Djibouti, pour lui signaler comment étaient traités et considérés, par un certain fonctionnaire (le capitaine Mohamed Houssein Rabeh), les Djiboutiens, résidant à l’étranger, qui revenaient au Pays. De quoi leur retirer toute envie de revenir ! Et pourtant la lettre est restée sans réponse … à ce jour !

Monsieur
Hassan Djama
Monsieur le Chef d´État Major de la police
B.P. 22
Djibouti
République de DJIBOUTI

Cher Colonel,

Permettez moi tout d’abord
de me présenter. Je m´appelle Ibrahim Djama, né á
Djibouti en 1965. Après mes études scolaires je me suis engagé
dans l´armée nationale et j´ai suivi ma formation de soldat
de trois mois á l´école militaire de Hollholl en 1981
avant de partir en France pour un stage de transmission à Paris au
service central des chiffres et de la sécurité des télécommunication
service du Premier ministre Pierre Mauroy. J’habite la Suède depuis
1987.

Le commandant de l´école
militaire de Holholl était á cette époque le lieutenant
Omar Bouh Goudade actuel colonel du FAR.( Force d´Action Rapide)

Une
anecdote préalable pour illustrer mon propos et proposer des méthodes
correctives, qui sont efficaces.

A l’école militaire
de Holholl, la nourriture donnée aux soldats était devenue tellement
mauvaise qu’elle ne répondait plus aux besoins en calories définies
par les normes de l’Armée. Les soldats tombaient souvent malades après
avoir mangé les repas servis dans la cantine. Effectivement, chaque
jour des soldats se plaignaient de douleurs intestinales. Même les chèvres
et les moutons en dehors de la caserne ne voulaient pas manger les restes
de ces repas !!

Face à cette
situation, je décidais d’agir á ma manière.

Je profitais de ma corvée
de nettoyage du bureau du commandant de l´école militaire, le
Lieutenant Omar Bouh, pour écrire une lettre anonyme que je déposais
sur la table de travail du Lieutenant.

Dans ma lettre je parlais
de la nourriture avariée que l’on donnait aux soldats, de la baisse
de leur moral à cause de cette négligence et du traitement inhumain
affligé par le sergent alcoolique du camp qui était allé
jusqu’à obliger un soldat à boire son urine pour le punir.

Une semaine après
ma lettre, le lieutenant Omar Bouh s´est déguisé en soldat
et il a fait la queue devant la cantine pour évaluer la qualité
des repas servis aux soldats.

Le lieutenant Omar Bouh
constata personnellement la véracité des faits que j’avais relaté
dans ma lettre anonyme. Les repas étaient exagérément
salés pour masquer leur mauvais goût et ils ne fournissaient
pas les éléments nécessaires pour la bonne santé
des soldats.

Le lieutenant Omar Bouh a pris aussitôt des décisions courageuses
pour faire cesser cette situation. Il a mis aux arrêts de rigueur l´adjudant
responsable de la cantine des soldats et il a changé l’ensemble du
personnel de la cantine.

Une nouvelle équipe
a investi la cantine et a servi des menus convenables aux soldats. Cela contribua
bien entendu au redressement rapide du moral des troupes qui avait atteint
un niveau inquiétant.

Le lieutenant Omar Bouh
rétrogradera le sergent X et le mutera dans le Groupement de Commando
des frontières – le GCF de Galafi pour le punir de son action de démoralisation
de ses soldats, contraire à la loi des Armées.

En faisant cela le commandant
Omar Bouh faisait tout simplement son devoir et faisait respecter les lois
et règles en vigueur dans l´Armée nationale dont il est
responsable aux yeux de la Loi. Aucun officier, sous officier ni homme du
rang n’est au-dessus des Lois et encore moins face aux règlements précis
des Armées..

Une question fondamentale.

Si je n´avait pas
écrit cette lettre anonyme, le lieutenant Omar Bouh n´aurait
jamais su ce qui se passait dans son camp et aurait peut-être eu à
affronter des problèmes avec ses hommes. Le sergent aurait toujours
continué à faire boire de l’urine à ses soldats et à
piétiner leur dignité.

J’ai tenu à vous relater ce fait avant de
vous expliquer ce qui est arrivé récemment à ma famille
à Djibouti.. car il propose une action simple mais efficace pour évaluer
les dysfonctionnements et pour y remédier

Ma femme djiboutienne
et mes six enfants, tous nés en Suède, sont rentrés á
Djibouti le 10 juin 2004. Retour prévu le 02 août 2004. Je tenais
à ce qu’il passe les vacances scolaires dans notre pays et qu’ils le
découvrent pour la première fois. Qu’ils connaissent l´environnement
dans lequel j´ai grandi.

Possédant tous
des passeports suédois, ma femme déposa en prévision du retour, conformément
aux règles en vigueur, aux services des Etrangers les 7 passeports
suédois 14 jours avant leur départ pour avoir les autorisations
de sortie nécessaires.

Chaque fois que ma femme
se présentait au bureau d’un certain capitaine Mohamed Houssein Rabeh
pour récupérer les passeports, celui-ci lui disait de revenir
un autre jour sans ne jamis lui en donner la raison.

Les jours passaient et
la réponse du capitaine restait pareille « reviens un autre jour
« . Le jour J approchait et mes enfants commençaient à s’angoisser.
Le capitaine Mohamed Houssein Rabeh était soit absent du bureau soit
il leur disait de revenir sans explication.

Ma femme n´était
pas la seule á subir les abus du pouvoir manifeste de ce jeune fonctionnaire.
Chaque fois, elle croisait une cinquantaine de personnes djiboutiennes et
étrangères qui faisaient la queue devant son bureau et qui attendaient
aux guichets pour payer les frais et récupérer leur passeport
par la voie selon les procédures légales.

Hélas, les jours
se suivaient et se ressemblaient devant le service de l´immigration
de Djibouti. Ma femme a même vu chaque jour des femmes avec des nourrissons
et des vieillards qui passaient des journées entières pour tenter
d’obtenir leurs papiers.

Le sort de tous ces gens
dépendait uniquement du bon vouloir d’un seul individu qui ne respectait
ni les lois de son pays ni les gens entassés chaque jour devant son
bureau.

Pour que ma femme puisse
obtenir les 7 passeports, il n’y avait plus qu’une alternative.

  • La première
    était de le corrompre le capitaine Mohamed Houssein Rabeh en lui
    donnant de l´argent. Vieille et triste méthode en Afrique.
  • La seconde était
    de passer par l’intervention d´un homme supérieur à
    lui. Vieille et triste méthode en Afrique.

Bien entendu ma femme
choisit la seconde solution, qui était la bonne á ce moment
la. Dans un petit pays comme Djibouti, chaque djiboutien a toujours un ou
plusieurs cousins bien placés dans l´appareil de l´État.

24 heures avant le départ
de ma femme et mes enfants à destination de la Suède, ma femme
est allée voir un Ministre qui chargea son proche collaborateur de
téléphoner au capitaine Mohamed Houssein Rabeh.

Monsieur le Chef d´État
Major de la police, le haut fonctionnaire du Ministère débloquera
sur un simple coup de fil et en moins de deux minutes ce que ma femme avait
essayé d’obtenir pendant 14 jours : les 7 passeport qui dormaient dans
le tiroir du capitaine Mohamed Houssein Rabeh..

Ce jour-là heureusement
ma femme avait eu la chance d´avoir un cousin ministre.

– Mais vers qui peuvent
se tourner les Djiboutiens ou les autres qui n´ont pas, dans leurs relations,
un Ministre ou quelqu’un de haut placé dans l´appareil de l´État
?
– Comment peuvent-ils faire prévaloir leurs droits légitimes
auprès de l’Administrations quand elle est tenue par des indivdus sourds,
insensibles et opposés aux services du public ?
– Est-il encore nécessaire, en 2004 á Djibouti, de solliciter
l’intervention d´un Ministre de la République pour obtenir l’application
des droits les plus élémentaires par les services publics de
État. ?

Si les Ministres doivent
régler ces petites choses auprès des différents services
de l´État, comment pourront-ils trouver le temps nécessaire
pour gérer l´intérêt supérieur de la nation
?

Toutes ces questions
resteront probablement sans réponses.

Monsieur le Chef État
Major de la police. le Président de la République á nommé
un Médiateur de la République par le décret n°2000-0150/PRE
du 11 juin 2000 pour faciliter le rapprochement des services de l´administrations
publiques avec la population afin que l´arbre ne cache plus la forêt.

Monsieur le Chef État
Major de la police, permettez-moi un conseil, en tant que citoyen de ce pays
que j´aime toujours. Déguisez-vous un jour, en simple citoyen
et adressez-vous aux différents services publics de l´État
pour évaluer, comment vos droits seront ou ne seront pas bafoués
pas des gens qui se croient investi d’un pouvoir absolu de nuisance, n’ayant
aucune légitimité ni justification au regard de leur poste.

Précisément
comme l’avait fait le lieutenant Omar Bouh Goudade commandant de l´école
militaire de Hollholl en 1981 en se déguisant en soldat pour se rendre
lui-même compte de la qualité des repas servis à ses hommes.

Pour montrer que le capitaine
Mohamed Houssein Rabeh a détenu dans ses tiroirs sans motif et raison
valable les 7 passeport, ma femme a fait appel au Commandant Houssein qui
est le supérieur direct du capitaine en question.

Le commandant est intervenu
et il n’a eu qu’à dire à son subordonné :« cette
femme est là devant ton bureau depuis plus de 10 jours et tu retiens
ses passeport sans raison. Je t’ordonne de signer et expédier cette
affaire « 

Le Capitaine Mohamed Houssein
Rabeh lui á répondu que son supérieur faisait de la politique
et que cela ne l’intéressait pas. Dans l´armées le refus
d´obéir à un supérieur était puni de 30
jours d´arrêt.

Monsieur le Chef État
Major de la police

  • La République
    de Djibouti est une et indivisible comme l´a dit le premier Ministre
    Monsieur Ahmed Dini dans sa déclaration de l´indépendance
    de la veille de l´indépendance le 26 juin 1977.
  • Il y a une et une seule
    constitution qui s´applique á tout le monde dans le territoire
    national.
  • Il n´y a pas
    deux catégories de Djiboutiens.
  • Tous les djiboutiens
    quelque soit leur grade, leur fonction, leurs origines ou leur sexe sont
    soumis à la même Loi.
  • Les fonctionnaires
    de État sont au service de la population et doivent respecter et
    appliquer la Loi, sans aucune autre considération.

Monsieur le Chef État
Major de la police cette lettre n´est pas pour vous demander de punir
le capitaine Mohamed Houssein Rabeh mais tout simplement pour vous montrer
pourquoi les Djiboutiens qui sont en colère face à cette maladie
des services de État et à leur inefficacité, voir à
leur nuisance dans certains cas.

La colère se porte
bien sur contre le plus haut responsable, qui est élu au suffrage universel
directe : je désigne le Chef de l´état, qui est le garant
de la constitution selon l´article 22. Dans une véritable démocratie
ce seraient les urnes qui parleraient et qui puniraient le Président
en le renvoyant dans ses quartiers.

Nos trois enfants aînés,
Aden né 1992, Elias né 1993 et Laila née 1994 ont décrit
Djibouti, à leur retour, comme un pays sans loi et des hommes sans
têtes. Cette histoire les a profondément affectés …
car ils n’imaginaient même pas que ce soit possible, auparavant.

Pour eux et à leur
âge, un pays sans Loi est un pays ou un seul individu accapare le fonctionnement
d’un service administratif sans respect ni pour la Loi, ni pour son supérieur
hiérarchique, ni pour les hommes, les femmes et les enfants qui faisaient
la queue devant son bureau.

Pour eux, des hommes sans
tête, c’est un pays où personne ne respecte les règles
communes : prenons par exemple, le nombre des véhicules qui ne respectent
pas le code de la route, les bus qui roulent à des allures exagérées
et dangereuses dans les quartiers et dans le centre ville, des voitures garées
n´importe où et n´importe comment.

Ils ont raconté
tout cela à leur maître de l´école. C´est
lui qui me l´a dit ensuite.

Le résultat
est consternant : mes enfants ont décidé de ne plus jamais revenir
à Djibouti, tant que tous ces problèmes ne seront pas solutionnés
/ normalisés.

Et comprenez combien
cela me touche et m’attriste : mes propres enfants rejettent la terre de nos
ancêtres à cause des dérives de certains petits potentats
de la fonction publique ! C’est affligeant !

Ici en Suède, en
Europe ou en Amérique du nord, l´Administration est au service
de la population. Elle est neutre et objective et elle n’a pas le droit à
l´erreur. Les heures d´ouverture ne dépendent pas des états
d’âme des fonctionnaires titulaires du bureau. Pour assurer la continuité
du service de État, si le fonctionnaire est absent ou malade un collègue
se substitue à lui.

Chaque citoyen a le droit
d´obtenir une réponse à ses demande dans le délai
fixé par la Loi. Si le citoyen n´est pas satisfait de la réponse
il peut saisir le tribunal administratif de la Commune. Le citoyen et le fonctionnaire
se présentent devant un juge qui examine la plainte. Si le fonctionnaire
a tort, il aura un avertissement. Trois avertissements dans une année
entraîne la révocation du fonctionnaire.

Si j’ai jugé utile
d’attirer votre attention, Monsieur le Chef État Major de la Police
sur ce cas, c’est parce qu’il concerne des milliers de nos concitoyens.

Dans l´attente d´une
réponse veuillez recevoir Monsieur le Chef État Major de la
Police mes salutations les plus respectueuses.


IBRAHIM DJAMA
Gråvädersv. 4.J
226 42 LUND
Tel: 46 705 14 83 90
Jaamac002@Hotmail.com
Suède

_________________ Note
de l’ARDHD
Nomination du capitaine Mohamed Houssein Rabeh au titre
d’Homme de la Semaine – catégorie fonctionnaire.

Ce fonctionnaire dévoué et zélé, sous les ordres du Commandant Idriss Djama Guirreh (le vendeur des passeports « comme des petits pains »), qui ne ménage
aucun effort à la fois pour améliorer la qualité du service
public, mais surtout pour organiser des rencontres les plus fréquentes
possibles avec les usagers, a tant fait pour l’image de marque de l’Administration,
qu’il mérite certainement de figurer au tableau d’honneur des hommes
de la semaine’, catégorie fonctionnaire.

Il y sera inscrit très
prochainement afin que tout le monde se souvienne, à l’avenir, de son engagement sans compromis
au service de l’efficacité et de la population. Toutes nos félicitations pour cette promotion qui devrait contribuer à le rendre encore plus célèbre.