17/10/05 (B320) En quoi l’absence de DAF à la barre des témoins au procès du 18 octobre est-elle regrettable et porteuse de soupçons ? (Jean-Loup Schaal)

Rien ne permet d’affirmer avant le début de l’audience, que DAF sera absent de la Salle d’audience. On ne peut pas faire de procès d’intention.

En revanche, on peut déjà affirmer qu’il ne témoignera pas. La liste des témoins doit être signifiée environ 45 jour avant l’audience s’ils résident en France et 75 jours environ s’ils résident à l’étranger. En dépit de mes appels téléphoniques personnels et des appels sur le site, il n’a pas manifesté son désir de témoigner.

Pour qu’il puisse témoigner à l’audience, il faudrait un accord de toutes les parties : partie civile de Zakaria, Juges et Procureur de la République. Cela m’étonnerait que nous l’obtenions, encore faudrait-il même que DAF le sollicite. Ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle.

Personnellement et sans n’en tirer aucune conclusion hâtive ou anticipée, je ne comprends pas son attitude pour de nombreuses raisons, que je citerai par ordre croissant d’importance :

  • La première est la gratitude et la responsabilité. Un samedi d’avril 2003, dès que je fus alerté par ses plus proches collaborateurs, de son emprisonnement, nous avons aussitôt déclenché l’alerte rouge de l’ARDHD, ce qui signifie la mise en place d’un système d’information spécifique et renforcé. En dehors des informations publiées sur le site, nous informons la presse et les organisations concernées, en l’occurrence, surtout RSF et Survie.
    • Ensuite notre association a relayé tous les messages (y compris ceux du MRD de Belgique), de soutien et d’appel à manifester en France, en Belgique. Comme elle l’avait annoncé plusieurs jours à l’avance, elle a lancé une pétition internationale, qui a recueilli plusieurs centaines de signatures.
    • Rappelons que notre association s’est fixée pour mission de permettre à tous les opposants, sans distinction (hormis l’appartenance ou non à l’opposition) de s’exprimer librement. A ce titre, elle a publié tous les communiqués, messages et compte-rendu de manifestation du MRD, comme ceux d’ailleurs de tous les autres partis, syndicats et associations. N’ayant aucune ambition politique à Djibouti, je me suis toujours refusé à pratiquer la censure que je dénonçe par ailleurs et j’assume mes choix, dans le seul intérêt du Peuple djiboutien. 
  • La deuxième est l’importance de ce procès « exceptionnel »: il va se dérouler avec en fond l’affaire Borrel : en particulier les récents refus de Djama Souleiman, d’Hassan Saïd et de Guelleh de se rendre aux convocations de la justice française. Il va permettre d’exposer devant une Cour française impartial et devant des journalistes français et étrangers, toutes les violations des Droits de l’Homme commises à Djibouti : tortures, viols, emprisonnements arbitraires, exécutions extrajudiciaires, destructions de villages, d’écoles et de centres de soin, génocides, utilisation d’armes chimiques contre les civils, …. La présence de DAF aurait été utile, car il dispose certainement d’informations que nous n’avons pas et son témoignage aurait été d’un grand intérêt et d’une grande utilité, pour dénoncer les pratiques condamnables du régime de Guelleh, ce qui devrait être l’objectif de tout opposant convaincu.
    • N’oublions pas que parmi les textes qui nous seraient reprochés, nombreux seraient signés par le MRD de Belgique, qui a renoncé formellement, à l’époque, à bénéficier de l’anonymat que nous garantissons à tous nos lecteurs pour assurer la sécurité des familles. C’est la raison pour laquelle je réponds personnellement au Tribunal, ayant refusé de divulguer nos sources.
    • La partie civile pourrait être tenté d’utiliser l’absence de DAF pour tenter de nous déstabiliser.
  • La troisième et la plus importante est le fait que DAF avait l’occasion unique de montrer qu’il était totalement engagé dans l’opposition et que les procès à Djibouti, étaient montés de toutes pièces par une Justice aux ordres de la dictature et qu’il était innocent et condamné pour d’autres raisons …
    • Une condamnation de l’ARDHD entrainerait automatiquement la reconnaissance du bien-fondé de la condamnation de DAF par le Tribunal de Djibouti et donc la matérialité des faits qui lui étaient reprochés. Ne pas venir le 18 octobre, c’est prendre ce risque …

Quoi qu’il en soit et au-delà, non pas de cette trahison, mais de ce lâchage surprenant, je suis confiant dans notre défense. Avec la présence à mes côtés du bâtonnier Roger-Vincent Calatayud, militant des Droits de l’homme et membre de plusieurs instances nationales, nous serons présents le 18 octobre et nous présenterons un dossier complet, lourd et documenté … qui sera confirmé par les témoins qui ont accepté de se présenter à la barre et parmi eux Roger Picon, Ali Iftin, Mohamed Alhoumekani, Abdallah Deberkalleh, Abdourahman Yassin, Ali Coubba, …. Nous aurons aussi une pensée émue et particulière pour François-Xavier Verschave qui aurait du être présent lui aussi, si la maladie ne l’avait pas emporté fin juin.

Alors l’absence de DAF : une faute politique majeure ?

Nous ne pouvons le dire. Son absence laissera quand même supposer à de nombreux observateurs (dont certains s’expriment sur le site) qu’il pourrait ne pas être un opposant aussi engagé que certains le pensent et que l’existence d’accords privilégiés avec le régime en serait la raison essentielle. Nous nous refusons toujours à envisager un double jeu possible, bien que depuis le revirement de Me Aref, qui défendra le Général Zakaria contre nous, nous soyons contraints à plus de vigilance.

En application du principe de précaution, compte-tenu du doute sérieux et tant qu’il ne sera pas publiquement levé, nous ne publierons plus aucune information en provenance du MRD sur le site de l’ARDHD.

Jean-Loup Schaal
Président de l’ARDHD