03/04/06 (B344-A) Régionales : samedi 1er avril 2006 n’était pas le bon jour pour poisson d’avril réussi à Djibouti ! (Lecteur)


Une fois n’est pas coutume, le RPP a déclaré remporter le deuxième tour des « élections régionales » du vendredi 31 mars dans tous les « lieux de vote » : les deux communes de Boulaos et Balbala, ainsi que la région d’Ali Sabieh.

Le seul intérêt de l’artifice électoral réside dans les chiffres de la participation annoncés par l’ADI : Boulaos aurait voté à 28,70% ; Balbala à 40,22% ; la région d’Ali-Sabieh à 41,12%. Des taux proclamés par l’Etat RPP lui-même et qui s’affichent de plus en contradiction avec le spectacle des bureaux de vote quasi désert vus à la RTD, télé présidentielle s’il en est, qui n’a filmé que les bureaux les plus peuplés.

La masse de protestataires camouflée en abstentionnistes a donné une visibilité forte au ras le bol de la société djiboutienne et à l’appel au boycott fait à deux reprises par l’opposition djiboutienne. La mise en scèn des régionales pour faire accroire que Djibouti est en voie de normalisation démocratique n’a pas réussi à dissimuler la fiction qui entache un scrutin ignoré de trois Djiboutiens sur quatre.

Une pluie de manifestants aurait d’ailleurs accueilli samedi l’annonce des résultats officiels à Ali Sabieh et à Holl-Holl à l’appel de la liste « Ensemble pour l’Avenir » qui dénonçait les bourrages d’urne. Le malheur de cette liste étant de se retrouver toute seule face au RPP à Ali Sabieh pour ce second tour de « scrutin ». Mais ceci ne sera pas le seul malheur des listes dites indépendantes en général, en l’absence d’un débat avec l’opposition sur l’opportunité de jouer aux victimes.

Ces élections se sont déroulées en violation du droit à des élections libres consacré par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié par Djibouti. Pour information, Djibouti a ratifié ce Pacte le 05/11/2002, mais son entrée en vigueur avait été repoussée au 05/02/2003, selon le site du Haut-commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme, comme pour garder les mains libres pour truquer les élections législa ves du 10/01/2003.

L’appareil d’Etat mobilisé par le régime pour faire campagne en faveur du parti présidentiel n’avait pas fait dans la demi mesure. Le panneau géant « Guelleh » aperçu devant un bureau de vote à Ali Sabieh n’avait pas été le seul, de nombreux panneaux dont certains l’effigie du président dictateur auraient orné les alentours des cours de scrutin en plusieurs lieux.

Finalement, les Djiboutiens n’ont pas été les seuls à boycotter les élections dites régionales, aucun observateur étranger n’ayant davantage daigné s’y exhiber pour tenir les chandelles d’un viol des droits les plus élémentaires à des élections libres et transparentes. Il semblerait que le gouvernement ait démarché sans succès des pays et des ONG pour jouer au témoin. Les organismes chargés des opérations n’auraient sans doute pas apprécié l’absence de tout parti politique d’opposition légalement constitué dans le cours du scrutin.

L’espoir est fondé désormais qu’à l’avenir la communauté des pays démocratiques rejette systématiquement l’offre de notre gouvernement de fair légitimer ses mascarades électorales.

Mohamed Ali