05/04/07 (B389) Communiqué de l’ARD : VIOLATION DES DROITS HUMAINS : TEMOIGNER, C’EST PREVENIR !

«
Hommes, femmes, enfants, vieillards abattus à la Kalachnikov à
bout portant.Charniers.Viols, inhumations collectives.Un pays à feu
et à sang.Des crimes impunis.Comment arrêter la machine infernale.Cette
spirale de l’effroi qui a transformé en quelques années un paradis
en enfer dans un pays où la Loi pourtant déclare haut et fort,
noir sur blanc, que la « personne humaine est sacrée »
» ?

Constitué par les parents des victimes des massacres de Bouaké
et de Duékoué en Côte d’Ivoire, pour les assister dans
les procédures en cours, j’ai pris la responsabilité de rendre
publics leurs témoignages afin que les assassins et leurs commanditaires
sachent qu’ils n’échapperont pas au châtiment de leurs crimes
et que le temps de l’impunité est passé ! « Ce que je
veux, c’est faire éclater la Vérité !!! »

Dans un autre contexte, ces lignes auraient pu être écrites par
notre ami Jean Paul Abdi Noël…Elles ne sont pas de lui. Rendons donc
à Maître Jacques Verges les droits d’auteur de ces lignes. Elles
relatent les crimes commis une décennie durant (1995-2005) à
l’Ouest du continent. Elles sont consignées dans un ouvrage intitulé
« Crimes contre l’Humanité. Massacres en Côte d’Ivoire
» paru aux éditions Pharos/Laffont en Mai 2006. Cet ouvrage est
plus qu’une plaidoirie. Il se veut, c’est l’éditeur qui l’affirme,
« (.) un témoignage » Justement !

C’est pour avoir témoigné et rendu ici d’autres crimes
publics que le Président de la Ligue Djiboutienne des Droits Humains
a une première fois été arrêté sans mandat
à son domicile, placé en garde à vue à la brigade
criminelle, puis transféré et écroué à
la prison civile de Gabode, sous le chef d’accusation de « divulgation
de fausses nouvelles ».
Libéré quelques jours
plus tard et à nouveau arrêté puis condamné à
6 mois de prison fermes et écroué toujours à Gabode sous
cette fois le nouveau chef d’accusation d’ « offense aux institutions
républicaines ».

Fausses nouvelles ?? Offense ??

Un rappel des faits s’impose ! Apprenant qu’un charnier d’ossements humains
venait d’être découvert au Day, le Président de la LDDH
mène son enquête.Il recueille ainsi de nombreux témoignages
divers et concordants sur le lieu de la découverte du charnier, l’identité
des victimes (toutes civiles et identifiées par les leurs, grâce
à différents indices.), la date du massacre (1er Janvier 1994)
et l’identité des assassins présumés (militaires en uniformes
dans l’exercice de leur fonction !).

Ancien député, le Président de la LDDH se souvient qu’en
Janvier 1995, il était le rapporteur d’une commission d’enquête
parlementaire chargée d’instruire les plaintes des notables de la région
au sujet de l’arrestation à leurs domiciles respectifs de sept (7)
civils par les forces armées et de leur vraisemblable exécution
sommaire selon les plaignants de l’époque.et d’aujourd’hui (et qui
réclament encore justice !). Auteur d’un premier rapport adressé
aux Présidents de la République et du Parlement de l’époque
(et pour d’évidentes raisons classé « confidentiel »),
Mr Jean Paul Abdi Noël en cherche une trace, la retrouve et en garde
les copies en lieux sûrs, à toutes fins utiles.

Dans la
foulée, dans un communiqué explicite, l’ARD, rappelle que les
noms
des sept (7) civils figuraient dans la liste des centaines de victimes
civiles à indemniser et annexée à l’Accord de Paix du
12 Mai 2001, signé en
grandes pompes entre le FRUD-Armé et le.gouvernement !
Il est laissé en liberté provisoire en attendant son procès.

Mais très
vite, le naturel policier et répressif du pouvoir revient au galop
: Jean Paul est à nouveau arrêté ! Cette fois pour «
offense. »
Pourquoi ? Parce qu’à peine remise du choc de la découverte
du charnier, la
population du Day apprend l’annexion du corps d’une des leurs par deux
individus (un membre de la Garde Républicaine et un enseignant). A
nouveau,
elle alerte la voix des sans voix. Comme d’habitude, il enquête.recoupe
les
témoignages, prend acte de la plainte déposée par le
père de la victime (une
sourde-muette.) fait son devoir, témoigne et condamne le viol.

C’est
pour s’être fait l’ écho de ce viol et l’avoir dénoncé
que le
Président de la LDDH a été jugé pour ainsi dire
à huis clos puisque aucun de
ses avocats n’a pu plaider et condamné à 6 mois de prisons fermes.

Pourtant,
le parquet ne nie pas les faits mais parle officiellement donc
sans rire, d’une « dispute » entre les deux auteurs du délit
et la
sourde-muette.Sans commentaires !!!
Arrêté sans mandat à son domicile, gardé à
vue comme un délinquant, écroué,
libéré, à nouveau arrêté et écroué
sans autres formes de procès que
l’arbitraire qui caractérise l’actuelle Justice Djiboutienne, le Président
de la LDDH est aujourd’hui hospitalisé, sa santé s’étant
dégradée en prison.

Au sortir
de ce procès à oublier, l’un de ses avocats contenant sa colère,
s’est écrié : « c’est un procès politique ! ».
C’est exact, Maître ! Mais
pas seulement et plus que ça !
Ce n’est pas seulement Jean Paul Abdi Noël qui est visé par cette
condamnation. C’est vous, moi, lui, chaque Djiboutienne, tout Djiboutien,
n’importe quel démocrate de quelque ethnie, race ou confession qu’il
soit.
Tous sommés de nous accommoder de l’arbitraire.A d’autres !!!

C’est
précisément parce que nous avons la conviction que cet arbitraire,
est
la conséquence d’une impasse essentiellement politique, elle même
le fruit
de la violation de l’Accord de Paix et d’engagements nationaux et
internationaux solennellement souscrits que nous affirmons avec détermination
et certitude que le procès à venir ne sera pas seulement
celui de notre ami Jean Paul Abdi Noël, ce sera aussi et surtout celui
de ce
pouvoir sans foi ni loi.

– Par
respect pour tous les sacrifices consentis par les Djiboutiens
durant (et après) 8 ans de guerre civile…

– Au nom
de tous les martyrs civils et militaires.

– Par
attachement aux droits conquis sur cette terre qui nous est si
chère.

– Gardant
à l’esprit le sang, les larmes et la sueur versés.

– Faisant
nôtre le sacerdoce de notre ami Jean Paul Abdi Noël, « nous
offensons » à notre tour les « institutions républicaines
», si tant est que
d’un strict point de vue juridique, désigner un crime de guerre (exécutions
sommaires et répétées de civils par des « soldats
» en uniformes, viols.),
un délit ou infraction (tentative de viol, viol, coups et blessures
volontaires, arrestations et détentions arbitraires.) par leur nom
constitue
une « offense ».

A l’instar
de tous les défenseurs des droits de l’Homme, Jean Paul n’a fait
que témoigner pour prévenir. Son noble combat pour que justice
soit rendue
aux victimes de l’arbitraire fait honneur à notre pays.

M.A.A.
Secrétaire à la communication et porte parole de l’ARD