28/02/08 (B436) Le Figaro : Paris réduit le déploiement de son armée en Afrique

Arnaud de La Grange

Le chef de l’État français doit annoncer jeudi au Cap que le nombre de soldats et de bases militaires devrait baisser et que les accords de défense seront revus.

S’il y a un sujet diplomatico-stratégique auquel une politique de rupture devait s’attaquer, c’est bien celui des relations entre la France et l’Afrique. Le candidat Nicolas Sarkozy s’y était engagé durant la campagne, mais le mouvement n’était jusque-là guère perceptible. Le président va saisir l’occasion de sa visite en Afrique du Sud, aujourd’hui, pour annoncer une refonte du dispositif militaire français sur le continent noir.

Le premier volet concerne la relation politique entre Paris et les capitales de l’ancien pré carré. Le chef de l’État devrait annoncer une remise à plat des accords de défense et de coopération militaire. Avec comme mot clé plus de «transparence». Les diplomates devraient ainsi nettoyer les fameuses «clauses secrètes» de ces accords, non publiées officiellement, mais à la source de bien des aventures expéditionnaires françaises.

Le second volet touche à la carte militaire française en Afrique. Quelque 9 000 hommes y sont déployés. Quelles bases va-t-on fermer ou garder ? Certaines causes paraissent acquises, d’autres sont plus incertaines. Paris dispose de trois bases permanentes : Djibouti, le Sénégal et le Gabon. Les deux autres implantations le Tchad et la Côte d’Ivoire ont des statuts plus volatils, relevant de l’opération extérieure. «Djibouti à l’Est, le Tchad au Centre, mais trois implantations à l’Ouest, c’est donc là que des choix devraient être faits», confie une source militaire.

Côté «retraits» purs et simples, l’affaire de la Côte d’Ivoire semble entendue. Il vient d’ailleurs d’être décidé de changer le statut de nos forces présentes à Abidjan : elles passent d’implantation permanente (le 43e Bima, bataillon d’infanterie de marine, créé en 1978) à celui d’«opération d’extérieure» (Opex). Il sera ainsi facile de rapatrier les soldats quand on estimera l’incendie ivoirien bien éteint.

Abidjan bientôt fermée, Djibouti allégée

Le Tchad est un cas particulier. L’opération «Epervier», mise en place en 1986 pour protéger le pays des appétits libyens, est un «dispositif provisoire» qui dure, pour le moins… En France, le tropisme tchadien est encore fort. Les militaires vantent les qualités de «porte-avions terrestre» au cœur du continent, les diplomates voient encore dans le Tchad le «verrou de l’Afrique». Mais Nicolas Sarkozy pourrait décider de réduire la voilure, une fois la situation stabilisée, notamment avec le déploiement de la force européenne (Eufor).

Côté bases, Djibouti devrait être conservée.

Mais le nombre de soldats y serait réduit, certains de ses effectifs étant d’ailleurs réaffectés sur la future base d’Abu Dhabi.

Va-t-on choisir entre le Gabon et le Sénégal ? Les deux bases ont des qualités stratégiques différentes. Avec le retrait d’Abidjan, Dakar reste la seule porte d’entrée maritime digne ce nom pour la France. L’implantation «marine» pourrait être conservée, la composante terrestre diminuant. De plus, le Sénégal est bien placé à la lisière de la zone sahélienne et de ses sanctuaires islamistes. Le Gabon, lui, est la plaque tournante, aérienne notamment, de toutes les opérations françaises en Afrique, d’où viennent les troupes qui encaissent les premiers chocs et où atterrissent les avions qui transportent les soldats ou évacuent les ressortissants. Cette capacité pourrait être conservée.

La fermeture de bases n’est pas la seule option disponible. «L’idée est de diminuer le nombre d’hommes en Afrique d’une manière générale, poursuit la même source, avec deux solutions palliatives : réaffecter de plus en plus nos hommes, moins nombreux, à la formation des armées africaines, pour, à terme, passer le relais, et prépositionner des équipements et installations pour des troupes d’intervention venues de métropole en cas de coup dur.»