26/11/10 (B579) Yémen Express – Deux morts dans un attentat à la voiture piégée au Yémen, selon un groupe chiite – Un mort, 8 blessés dans un attentat – Le Yémen, un Etat failli ? (3 articles)

______________________ 3 – Nouvel Obs avec AP

Deux morts dans un attentat à la voiture piégée au Yémen, selon un groupe chiite

Au moins deux personnes ont été tuées et huit autres blessées vendredi dans un attentat-suicide à la voiture piégée contre des chiites qui se rendaient à des funérailles dans le nord du Yémen, a annoncé un porte-parole d’un groupe rebelle chiite.

Mohammed Abdel-Salam a déclaré que le kamikaze avait attaqué le convoi qui se rendait dans la province de Saada pour assister aux funérailles de Badr al-Houthi, le père du chef du groupe rebelle chiite.

Il s’agit du deuxième attentat-suicide contre des chiites cette semaine au Yémen.

Mercredi, un attentat-suicide à la voiture piégée avait frappé un convoi de chiites qui devaient assister à une cérémonie religieuse. Dix-sept personnes avaient été tuées.

Nombre de chiites dans le pays soutiennent les rebelles Houthis, engagés dans une lutte contre les forces gouvernementales.

Les autorités ont imputé l’attentat de mercredi à Al-Qaïda.

______________________ 2 – Europe 1

Yémen: Un mort, 8 blessés dans un attentat

Une personne a été tuée et huit blessées dans un attentat suicide vendredi contre un convoi de dignitaires tribaux se rendant aux funérailles du chef spirituel des rebelles chiites zaïdites dans le nord du Yémen, selon des sources tribales et la rébellion.

L’attaque s’est produite deux jours après un attentat suicide à la voiture piégée qui a coûté la vie à 23 chiites participant à une procession religieuse dans la province d’Al-Jawf, un bastion de la rébellion zaïdite qui a conclu une trêve fragile avec le pouvoir central à Sanaa voilà neuf mois.

Les dignitaires visés se rendaient de la ville de Saada, un autre bastion de la rébellion, vers celle de Dahyan où devaient se dérouler les funérailles de Badreddine al-Houthi, décédé jeudi à l’âge de 86 ans, ont précisé ces mêmes sources.

______________________ 1 – Affaires stratégiques

Le Yémen, un Etat failli ?

Depuis quelques temps, le Yémen défraie la chronique : il est pointé comme pays d’expédition de plusieurs colis piégés récemment interceptés à destination des Etats-Unis. Ces agissements sont systématiquement revendiqués par une des branches d’Al-Qaïda, l’Aqpa, présente dans la péninsule arabique mais dont la stratégie se distingue de celle mise en place par le réseau mère.

Les experts américains n’envisagent pas la possibilité d’une invasion généralisée du pays et du déclenchement d’une nouvelle guerre internationale dans la région. Cependant, ils affirment d’une part qu’il serait judicieux de recourir aux drones pour garder un œil sur la région et d’autre part qu’un renforcement de la collaboration avec les autorités yéménites est indispensable à la lutte contre le terrorisme.

Mais, le territoire yéménite est lui-même secoué par des attentats réguliers ; la communauté le composant est déchirée en son sein : un bras de fer continu s’est instauré entre les autorités étatiques et les rebelles chiites zaydites du Nord récemment touchés par un attentat suicide ayant fait 23 morts.

Il est difficile de déterminer de façon indubitable qui sont les responsables de ces agissements tragiques.

L’Etat yéménite ne parvient plus à asseoir sa légitimité sur son territoire ni à juguler les tensions intercommunautaires exacerbées par l’entrée en jeu des puissances étrangères et notamment régionales.

L’Arabie Saoudite mène une guerre transfrontalière justifiée par une interrelation présumée entre l’Aqpa et les Zaydites, supposés financés par l’Iran.

Les Zaydites se sentent menacés par le salafisme d’origine wahhabite, version très rigoriste de l’islam sunnite, très présent dans la région. Depuis 1962 et l’avènement de la République du Yémen, ils accumulent quantité de ressentiments liée à la suppression de l’imamat « millénaire » fondé par al-Hussein. Depuis les années 1980 s’est opérée une exacerbation des tensions intercommunautaires et le Yémen est devenu le théâtre d’affrontements violents.

La tentative d’arrestation du leader du mouvement zaydite, Husayn Badr al-Din al-Huthi, menée par le gouvernement depuis 2004 a attisé les tensions. Après un cessez-le-feu en 2008, le gouvernement a lancé une nouvelle offensive en août 2009, l’ « Opération Terre Brûlée », dans l’espoir de faire tomber les positions rebelles du Nord.

Les autorités yéménites estiment que l’existence d’une province autonome sous influence zaydite constitue une menace existentielle pour le régime du président Ali Abdullah Salih, mais elles ont également pris conscience de l’impossibilité d’une solution militaire.

Ces combats ont contraint des milliers de civils à quitter leurs terres ; les camps de réfugiés se sont multipliés un peu partout dans le pays pour accueillir les civils en fuite. Ce problème des réfugiés est renforcé par la raréfaction des eaux dans la région et la pénurie alimentaire, le Croissant rouge achemine chaque jour 89.000 litres d’eau à plus de 4.300 personnes déplacées.

Le Yémen apparaît aujourd’hui comme un Etat failli, impuissant à garantir sa propre sécurité intérieure, faute de cohésion nationale. Les Zaydites ont refusé de participer au processus d’uniformisation des identités religieuses encouragé par le système éducatif de l’Etat républicain. Les reformulations identitaires aujourd’hui de plus en plus violentes sont le produit de cet échec à faire naître une unité politique yéménite.

Les appétits sécessionnistes au Nord et la résurgence d’Al-Qaïda au Sud ébranlent le pouvoir central contraint de prendre en compte le jeu sous-jacent des puissances extérieures : les Etats-Unis, qui sont les premiers menacés par cette nouvelle forme de terrorisme à petits moyens, travaillent à convaincre l’Arabie saoudite de prêter main forte au gouvernement et laisser de côté, un temps, le reflux de la menace de l’émergence d’un Etat chiite à sa frontière Sud pour refouler la menace terroriste représentée par l’Aqpa.