25/02/2023 (Brève 2185) TV5 Monde : Djibouti vote aux législatives et s’interroge sur la présidentielle à venir

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Djibouti, petit pays stratégique de la Corne de l’Afrique, votait vendredi pour des élections législatives sans suspense mais sur fond d’interrogations quant à la succession du président au pouvoir depuis 1999.

Les principaux partis d’opposition ont boycotté ce scrutin, qui doit désigner les 65 députés de l’Assemblée nationale – dont 58 sont actuellement du puissant parti au pouvoir, l’Union pour la majorité présidentielle (UMP).

Seul parti à se présenter dans les six circonscriptions de ce pays de moins d’un million d’habitants, il est assuré d’emporter à nouveau la majorité. Face à lui, l’Union pour la démocratie et la justice (UDJ), cinq sièges actuellement, concourt dans deux circonscriptions.

Quelque 230.000 électeurs sont appelés à désigner leurs députés, élus pour cinq ans lors d’un vote à un tour et qui doivent compter au moins 25% de femmes.

La participation semblait faible dans les bureaux de vote, selon la presse djiboutienne et des témoins.

« A chaque élection, je vote pour le même gouvernement », a déclaré Souad Elmi Siyad, 64 ans, retraité.

De son côté Moktar Abdi, ingénieur de 30 ans, a affirmé à l’AFP qu’il ne mettrait pas de bulletin dans l’urne : « Je ne vote jamais. Je ne suis pas intéressé par cette élection. Ma famille ne va pas voter non plus ».

Les principaux partis d’opposition, comme le Mouvement pour le renouveau démocratique (MRD) ou l’Alliance Républicaine pour le Développement (ARD), boycottent ce scrutin qu’ils ont chacun qualifié de « mascarade ».

A la dernière présidentielle en 2021, Ismaël Omar Guelleh, dit « IOG », avait été réélu à plus de 97% face à un novice en politique.

Pour le chercheur Benedikt Kamski, de l’institut allemand Arnold Bergstraesser, l’intérêt de la population pour cette élection est, de même qu’en 2021, « très, très limité ».

++ Bases militaires –

Après son vote, M. Guelleh s’est félicité « du calme et de la tranquillité » de la campagne électorale. « Je forme le voeu sincère que notre pays poursuive son histoire collective sous le signe de l’unité, de la cohésion nationale, de la stabilité et du développement », a-t-il ajouté.

L’Igad, groupement régional de pays d’Afrique de l’Est, et l’Union africaine avaient annoncé l’envoi d’observateurs.

++ Les résultats sont attendus dimanche, selon une source à la présidence.

Territoire désertique, Djibouti est un Etat stable en plein coeur d’une région troublée – voisin de la Somalie, l’Erythrée et l’Ethiopie, faisant face au Yémen – et qui suscite l’intérêt des grandes puissances. Il accueille notamment des bases militaires américaine, française, japonaise et chinoise.

Carrefour millénaire, il se situe également sur la route migratoire de nombreux Africains, principalement des Ethiopiens, qui chaque année tentent de gagner l’Arabie saoudite via le Yémen. Beaucoup s’y installent.

Les cinq mandats de M. Guelleh ont été marqués par un exercice du pouvoir autoritaire ainsi que par un développement des infrastructures logistiques, Djibouti tirant profit de sa situation stratégique à l’entrée de la Mer Rouge.

L’économie devrait croître de 5% en 2023 selon le FMI, malgré notamment les conséquences de la guerre en Ukraine et une sécheresse record dans la Corne de l’Afrique.

++ Flambeau –

En toile de fond de ce scrutin se dessine le sujet hautement sensible de la succession du président, dans une société marquée par les dynamiques claniques et l’équilibre entre Issa et Afar, les deux principales communautés.

Âgé de 75 ans, M. Guelleh ne pourra se représenter en 2026, date à laquelle il aura dépassé la limite d’âge – 75 ans également – imposée par la Constitution.

Il a affirmé qu’il ne changerait pas ce texte. En septembre 2021, Djibouti s’était par ailleurs agité de rumeurs sur son état de santé.

« Les gens sont curieux de (savoir) qui va succéder à IOG. Il y a un consensus sur le fait que le successeur sera choisi avant les élections de 2026 – de la même manière qu’en 1999, quand IOG est arrivé au pouvoir », note M. Kamski.

A l’époque, le prédécesseur et mentor de M. Guelleh, Hassan Gouled, lui avait passé le flambeau après une vingtaine d’années de règne.