18/09/08 (B465-B) Le Monde / Conflit frontalier entre l’Erythrée et Djibouti : l’ONU appelle au dialogue

S’il n’est pas résolu rapidement, le contentieux frontalier entre l’Erythrée et Djibouti risque d’avoir "un impact négatif majeur pour la région et plus largement pour l’ensemble de la communauté internationale (…) La possible déstabilisation de Djibouti et la militarisation du détroit de Bab El-Mandeb ne sont pas de bon augure pour la paix, le transport maritime et les investissements" : l’avertissement figure en conclusion du rapport des observateurs de l’ONU – dont Le Monde a obtenu une copie – qui, fin juillet, se sont rendus dans la Corne de l’Afrique. Le document a été examiné, mercredi 17 septembre, par le Conseil de sécurité, qui s’est montré sévère à l’encontre de l’Erythrée.

L’ancienne colonie italienne se voit reprocher son manque de coopération avec les Nations unies alors que le contentieux frontalier a dégénéré en affrontements militaires, en juin, qui ont fait plusieurs dizaines de morts. La mission de l’ONU dépêchée dans la Corne de l’Afrique a été reçue à Djibouti et en Ethiopie, la puissance régionale, mais elle n’a pu se rendre en Erythrée faute de visas.

Le Conseil de sécurité n’a pas apprécié cette fin de non-recevoir de l’Erythrée, un pays au nationalisme sourcilleux. Au cours de la discussion qui a suivi l’examen du rapport, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France ont été les plus sévères tandis que l’Italie (dont l’Erythrée a été une colonie) se montrait conciliante. Condamnée une première fois par l’ONU (c’était avant l’envoi de la mission), l’Erythrée échappera à une nouvelle condamnation officielle mais le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a été chargé de convaincre les Erythréens d’ouvrir très vite des négociations, et de faire en sorte que celles-ci ne s’éternisent pas.

Le rapport rend cependant justice à Asmara sur deux points. D’une part, constate-t-il, le tracé de la frontière reste à faire. Datant de la période coloniale, les documents officiels sont imprécis, contrairement à ce que soutiennent les autorités de Djibouti. Surtout, le rapport des experts de l’ONU reconnaît qu’un lien existe entre le conflit Erythrée-Djibouti et le conflit Erythrée-Ethiopie qui porte également sur un tracé de frontière. "Un progrès dans la résolution (de ce dossier) encouragerait l’Erythrée à accepter un arbitrage international", dit le rapport qui ajoute : "L’essentiel de l’instabilité dans la région vient de l’absence de solution dans la dispute entre l’Ethiopie et l’Erythrée."

Jean-Pierre Tuquoi,
avec Philippe Bolopion (New York, Nations unies)