15/04/09 (B494) Le journal de la Flibuste … Regain d’activité chez les pirates. (6 articles en Français)

_________________________ 6 – Marine Marchande ave AFP

Piraterie: armer les navires marchands ferait monter le "niveau de violence"

Le fait d’armer les équipages de navires marchands ferait monter le "niveau de violence" des pirates somaliens impliqués dans les attaques récentes au large des côtes de l’Afrique de l’est, a estimé lundi Peter Chalk, expert du groupe de réflexion américain Rand corporation.

"Les marins de la marine marchande ne sont pas entraînés pour le combat et ne seraient probablement pas enclins à affronter des pirates possédant des armes létales", a dit à l’AFP cet expert spécialisé dans le terrorisme et la piraterie.

"Toutefois, armer les marins ferait quasi-certainement monter la mise de la part des pirates et ferait monter leur niveau de violence", a-t-il ajouté. De plus, a-t-il souligné, les pirates disposeraient d’armes "plus lourdes et supérieures à tout ce dont les marins pourraient disposer".

En outre, selon M. Chalk, armer les équipages poserait des problèmes juridiques avec notamment avec les Etats côtiers disposant d’une régulation stricte vis-à-vis des armes. Interrogé sur la possibilité d’une intervention internationale visant les pirates à terre, M. Chalk a également jugé que l’idée n’était pas bonne.

"Cela politiserait un problème qui est avant tout économique", a-t-il dit avant d’ajouter que cela entraînerait en outre des "dommages élevés" sur les populations civiles.

Selon lui, il est plus utile d’aider "à dynamiser les capacités de surveillance côtière des Etats littoraux autour de la Somalie (Yémen, Kenya, Djibouti) (…) d’encourager les initiatives public-privé pour améliorer le marché et de commercialiser des moyens non létaux défensifs et des techniques de communications". "Sur le long terme, l’absence de gouvernement en Somalie doit être traitée", a-t-il aussi dit.

_________________________ 5 – Le Figaro

La saison des pirates a repris dans le golfe d’Aden

Isabelle Lasserre

Trois nouveaux bâtiments ont été attaqués mardi malgré les patrouilles internationales, qui semblent dépassées.

Quelques jours seulement après le tragique dénouement de la prise d’otages du Tanit par les commandos de marine français, trois nouveaux bateaux ont été attaqués mardi, au large de la Corne de l’Afrique. Après s’être emparés d’un cargo grec, des pirates somaliens ont capturé un bâtiment libanais de 5 000 tonnes. Ils ont également ouvert le feu, au lance-roquettes, sur un navire libérien. Grâce à ces nouvelles prises, le butin de guerre des pirates somaliens se monte désormais à 18 navires et près de 300 marins, dont certains sont retenus depuis huit mois et demi.

En février dernier, on se félicitait, à Paris, du succès d’Atalante, la première opération navale européenne, censée avoir fait «fortement chuter» le nombre de captures de bateaux dans la région. La mini-épidémie d’attaques qui sévit dans l’océan Indien depuis quelques jours vient relativiser ce succès. Si les pirates s’étaient montrés plus discrets depuis le début de l’hiver, c’est surtout, soufflent des spécialistes, qu’ils attendaient que la mer redevienne plus clémente et que les vagues s’apaisent pour permettre à leurs légères embarcations d’aller plus vite et plus loin. De la même manière qu’en Afghanistan, les talibans attendent le printemps et la fonte des neiges pour reprendre leur offensive, il y a, dans l’océan Indien, une saison pour le piratage. Celle-ci semble bel et bien avoir repris.

Face à ce nouveau fléau qui perturbe une route stratégique par laquelle transitent 30 % du pétrole brut mondial et 12 % du commerce maritime, l’Union européenne pensait, en lançant Atalante en novembre 2008, avoir trouvé, à défaut d’un vaccin ou un remède miracle, une parade au développement exponentiel de cette activité des mers.

Des raids éclairs

L’effet dissuasif des patrouilles devait rendre la piraterie, devenue un véritable business en Somalie, à la fois moins rentable et plus dangereuse. Atalante avait même été présentée comme l’un des principaux succès de l’Europe de la Défense sous la présidence française de l’Union. Déclenchée pour un an, avec le soutien des Britanniques, elle devrait d’ailleurs être reconduite.

La recrudescence des attaques prouve que la réponse européenne, si louable soit-elle, est insuffisante. Pour surveiller une zone immense – 2 millions de km² -, escorter les cargos du Programme alimentaire mondial et les navires vulnérables, surveiller les eaux territoriales, Atalante n’a que des moyens modestes : huit navires et deux avions de reconnaissance.

À ces faibles forces, les pirates font face en adoptant des techniques opératoires toujours plus sophistiquées et en se procurant du matériel toujours plus puissant. Ils agissent de plus en plus loin, jusqu’à 800 kilomètres des côtes, se transforment en véritables paramilitaires et utilisent des «bateaux mères» à partir desquels ils lancent des raids éclairs sur des bateaux à moteur. Au fur et à mesure que les navires de guerre d’Atalante se sont déployés dans l’océan Indien, les pirates somaliens ont élargi leur rayon d’action, notamment vers l’Est et le Sud. «Les pirates ont explosé en nombre et en importance», reconnaissait en février le patron des forces françaises à Djibouti.

Les experts le disent depuis le début : la vraie solution au problème de la piraterie dans le golfe D’Aden se trouve sur terre, en Somalie, ce pays ruiné par des années de guerre civile, au sein duquel les clans imposent leur loi à un État déliquescent. Alors, à moins de régler les problèmes politique et économique de la Somalie, les patrouilles des bâtiments internationaux risquent fort d’être condamnés à une lutte sans fin.

_________________________ 4 – Le Monde

Les pirates somaliens attaquent trois bateaux en quelques heures

La marine canadienne escorte un bateau du Programme alimentaire mondial à son entrée dans les eaux territoriales somaliennes le 18 septembre 2008.
Trois bateaux ont été successivement attaqués, au large de la Corne de l’Afrique, mardi 14 avril, par des pirates qui ont ainsi démontré que les récentes opérations commando française et américaine n’avaient pas entamé leur détermination.

Dans la matinée, les pirates somaliens ont capturé l’Irene EM dans le golfe d’Aden, un cargo grec battant pavillon de Saint-Vincent-et-Grenadines avec vingt-deux membres d’équipage philippins à son bord, neuvième prise depuis le début du mois. Le navire de 35 000 tonnes appartient à une compagnie maritime installée au Pirée, le grand port près d’Athènes.

Puis, un deuxième cargo libanais, le Sea Horse, battant pavillon togolais, a été capturé dans la même zone, selon une porte-parole de l’OTAN. Celle-ci n’a pu préciser ni le nombre de membres d’équipage à bord, ni leur nationalité. Elle ne savait pas non plus s’ils étaient sains et saufs. Les pirates ont attaqué le bateau, de 5 000 tonnes, à partir de "trois ou quatre embarcations", a-t-elle simplement ajouté.

Enfin, vers 15 heures, des pirates somaliens ont ouvert le feu sur un navire battant pavillon libérien, le Safmarine Asia. Une dizaine de pirates à bord de trois embarcations ont tiré à l’arme automatique et au lance-roquettes sur le navire libérien de 21 887 tonnes, ont annoncé des officiers de l’OTAN. On ignore s’il y a des victimes.

UNE "RÉPONSE ROBUSTE" FACE À LA PIRATERIE

Lundi, le président américain, Barack Obama, s’est dit déterminé à lutter contre ce fléau, appelant à la coopération internationale pour que les pirates rendent des comptes pour leurs "crimes". "Je veux dire très clairement que nous sommes résolus à stopper l’augmentation" de la piraterie dans cette région, a dit M. Obama.

Le responsable du Bureau maritime international, Noel Choong, a apporté son soutien à une approche musclée pour lutter contre la piraterie somalienne, qui perturbe l’une des routes maritimes les plus fréquentées de la planète. "Nous soutenons une réponse robuste contre les pirates", a-t-il déclaré tout en concédant qu’elle pouvait "engendrer des actes de rétorsion de la part des pirates" et "augmenter le niveau de violence contre les navires et les membres d’équipage".

Au moins 17 navires et plus de 250 membres d’équipage sont actuellement entre les mains de différents groupes de pirates somaliens. En 2008, le nombre des actes de piraterie dans la région avait augmenté de près de 200 % par rapport à 2007, selon le BMI. Cette recrudescence a conduit au déploiement d’une imposante armada constituée d’une vingtaine de bâtiments de guerre opérant sous commandement des Etats-Unis, de l’OTAN, de l’Union européenne ou national, à l’image de la Chine ou de la Russie.

_________________________ 3 – Le Nouvel Obs

Deux cargos détournés mardi au large de la Somalie

Les deux attaques confirment que les pirates de la région sont déterminés à poursuivre leurs opérations malgré les récentes interventions de forces armées.

Des pirates somaliens se sont rendus maîtres d’un vraquier grec dans la nuit de lundi 13 à mardi 14 avril à la faveur d’un beau clair de lune dans le golfe d’Aden. Un peu plus tard dans la journée de mardi, un second cargo, battant pavillon togolais, a été capturé au large de la Corne de l’Afrique, annoncé un responsable de l’Otan.

Ces deux attaques confirment que les pirates de la région sont déterminés à poursuivre leurs opérations malgré les récentes interventions des forces spéciales américaines et françaises pour libérer des marins pris en otages.

Des otages

Le commandant de la frégate portugaise de l’Otan Corte-Real, Alexandre Fernandes, a dit qu’il ne s’était écoulé que trois minutes entre l’appel de détresse du vraquier grec et son détournement.

Le bâtiment, qui bat pavillon de Saint-Vincent et des Grenadines, se rendait de Jordanie en Inde au moment de son interception dans le golfe d’Aden. Ses 22 membres d’équipage sont de nationalité philippine, a annoncé le ministère grec de la Marine marchande. Le Programme d’assistance aux marins de l’Afrique de l’Est a précisé pour sa part qu’aucun d’entre deux n’était blessé.

"Je peux confirmer qu’un deuxième cargo, le Sea Horse, a été pris", a de son côté déclaré la porte-parole de l’Otan, Shona Lowe, depuis le commandement naval de l’Otan situé à Northwood, en Angleterre.

Elle n’a pu préciser ni le nombre de membres d’équipage à bord, ni leur nationalité. Elle ne savait pas non plus s’ils étaient sains et saufs.

Les pirates ont attaqué le bateau à partir de "trois ou quatre embarcations", a-t-elle simplement ajouté.

Filature

Un navire de guerre canadien a dépêché un hélicoptère pour évaluer la situation à bord du Irene E.M.

"Il y a des otages. Nous allons donc filer le navire et suivre l’évolution de la situation", a précisé Fernandes.

Ce nouveau détournement intervient après la libération dimanche d’un capitaine américain retenu pendant plusieurs jours par des pirates dans un canot de sauvetage.

Les forces spéciales américaines étaient intervenues pour délivrer Richard Phillips, capitaine du cargo Maersk Alabama qui avait accepté d’être pris en otage pour épargner les membres de son équipage.

Trois pirates ont été tués dans l’intervention des soldats américains en mer.

Vendredi, des unités de l’armée française avaient libéré quatre Français, dont un enfant, retenus en otage sur un voilier, le Tanit, dans le golfe d’Aden.

Au cours de l’opération, le père de l’enfant avait été tué ainsi que deux pirates.

Trois autres assaillants avaient été capturés.

Avant le détournement du vraquier grec, les pirates somaliens détenaient 17 navires et 260 autres otages, dont une centaine de marins philippins.

 

__________________________ 2 – Le Figaro

Bientôt 15 pirates somaliens dans les prisons françaises

Christophe Cornevin

Placés à l’isolement et dispersés dans plusieurs maisons d’arrêt, ils encourent vingt ans de réclusion.

Les trois Somaliens capturés lors de l’opération de libération des otages du voilier Tanit vendredi dernier dans le golfe d’Aden pourraient être transférés vers la France. Selon nos informations, la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Rennes a ouvert dimanche une enquête préli­minaire pour «séquestrations suivies de mort». Ils s’apprêtent donc à partager le sort des douze autres pirates présumés actuellement détenus dans les geôles françaises.

Le 18 avril 2008, six premiers Somaliens soupçonnés d’être impliqués dans la prise d’otage du voilier de luxe Le Ponant avaient été transférés vers la France. Cette procédure visant un acte de piraterie était une première judiciaire.

Mis en examen à la JIRS de Paris pour «détournement de navire», «séquestrations, association de malfaiteurs en bande organisée», «vols et recels liés la demande d’une rançon», ces suspects ont été dispersés et placés à l’isolement dans plusieurs maisons d’arrêt, dont celles de la Santé et Bois-d’Arcy.

«N’ayant pas la possibilité de parler avec quelqu’un maîtrisant leur langue depuis douze mois, hormis quand leur avocat les rencontre avec un traducteur, ils sont tous plongés dans une profonde dépression, note Me David Reingewirtz, codéfenseur avec Me Gustave Charvet de Mohamed Saïd Hote, ex-comptable de 50 ans en proie à une grave maladie qui risque de l’emporter. Notre client, comme les autres, a été capturé en territoire somalien à bord d’un 4 x 4, ce qui ne prouve en rien leur participation à la prise d’otages du Ponant.»

Requête en nullité rejetée

Considérant que la France n’avait aucune autorité à intervenir en territoire somalien, qu’aucun élément sur l’interpellation ne figure dans la procédure et que les cinq jours de «garde à vue» des suspects à bord d’une frégate de la Marine s’étaient déroulés en «dehors de tout cadre légal», les avocats ont déposé une requête en nullité en octobre dernier. Celle-ci a été rejetée par la chambre de l’instruction la semaine dernière. La détention des présumés pirates a été prolongée de six mois, l’instruction ne devant s’achever qu’en avril 2010.

En septembre dernier, six autres pirates interceptés lors de la prise d’otages sur le voilier Carré d’As ont connu le même sort. Eux aussi attendent, isolés, un sombre destin : encourant jusqu’à vingt ans de réclusion criminelle aux assises, ils savent qu’un retour au pays signifierait leur arrêt de mort en raison de l’intransigeance des autorités de Mogadiscio.

Si l’ex-président somalien Abdullah Yusuf Ahmed a donné son accord à l’envoi vers la France de ses compatriotes lors des affaires du Ponant et du Carré d’As, nul doute que son successeur, Sheikh Sharif Sheikh Ahmed, collaborera pour l’extradition des trois ravisseurs capturés sur le Tanit. En effet, il a notamment été l’un des chefs des tribunaux islamiques ayant réussi à mettre entre parenthèses, fin 2006, les actes de piraterie. Avant que les raids maritimes ne repartent de plus belle.

__________________________ 1 – Le Point avec Reuters

Regain de piraterie au large de la Somalie

Deux navires marchands ont été détournés et un autre a été attaqué mardi au large de la Somalie, quelques jours seulement après que les marines française et américaine aient fait échouer deux prises d’otages de leurs ressortissants dans le golfe d’Aden.

Dans la nuit de lundi à mardi, profitant d’un clair de lune exceptionnel, des pirates se sont rendus maîtres de l’Irene E.M., un vraquier grec battant pavillon de Saint-Vincent et des Grenadines qui se rendait de Jordanie en Inde avec 22 marins philippins à bord, tous indemnes.

Le jour venu, d’autres pirates armés circulant à bord de trois ou quatre embarcations rapides ont pris le contrôle d’un navire marchand de 5.000 tonnes battant pavillon Togolais, le Sea Horse, à 143 km au large de la Somalie.

Un peu plus tard, une dizaine de flibustiers à bord de trois embarcations ont tiré à l’arme automatique et au lance-roquettes sur un navire libérien de 21.887 tonnes, le Safmarine Asia, au large de la Corne de l’Afrique. On ignore s’il y a eu des victimes, mais le navire a pu leur échapper.

Les officiers de la frégate portugaise Corte-Real, qui fait partie de la "task-force" anti-piraterie mise sur pied par l’Otan dans cette région ignorent si cette attaque a fait des victimes.

ACTIVITÉS LUCRATIVES

Cette série de coups de main prouvent clairement que les pirates n’ont pas été dissuadés par les opérations de sauvetage française et américaine intervenues ces derniers jours pour libérer leur ressortissants pris en otages.

Les forces spéciales américaines sont intervenues dimanche pour délivrer avec succès Richard Phillips, capitaine du cargo Maersk Alabama qui s’était offert en otage pour épargner les membres de son équipage. Trois pirates ont été tués dans cette intervention.

Deux jours plus tôt, des commandos de marine français avaient libéré quatre des cinq Français, dont un enfant, retenus en otages sur un voilier, le Tanit, dans le golfe d’Aden. Le père de l’enfant a été tué dans cette action, de même que deux pirates, trois autres étant capturés.

Après leurs derniers coups de main, les pirates basés dans des anciens villages de pêcheurs étalés tout au long des côtes somaliennes détiennent une vingtaine de navires et près de 300 otages, dont ils négocient libération contre de fortes rançons.

En dépit d’une forte présence navale internationale dans cette partie de l’océan Indien, l’une des plus fréquentées du monde par les navires marchands, les spécialistes ne s’attendent pas à un baisse de ces activités lucratives de piraterie tant que la situation en Somalie-même restera chaotique.

Version française Guy Kerivel
et Marc Delteil