21/06/09 (B504) FreeDjibouti -> VOUS AVEZ DIT INDÉPENDANCE ?

«Nous ne sommes pas encore libres, nous avons seulement atteint la liberté d’être libres.» Nelson Mandela

Dans quelques jours les Djiboutiens de partout, vont célébrer les 32 ans de l’in-dépendance de la République de Djibouti, un Djibouti plus que jamais malade, grabataire et saignant de tous ses maux.

Qu’est-il arrivé au rêve sacré des Pères de l’indépendance de notre pays?

Le pays rêvé par ces héros, ces vaillants combattants de la liberté, est mort avant d’avoir vu le jour. Tout s’est effondré quand ses enfants ont remplacé les colons pour agir comme ceux-ci, sinon pire.

En effet, en 1977, l’indépendance a formellement délivré le peuple de l’oppression coloniale, mais, à peine après, une autre chape de plomb allait contenir l’ardeur du peuple vainqueur. Ainsi, on est rapidement passé des colons au dictateur pour aboutir aujourd’hui au neveu…

Triste Djibouti…

Depuis 1977 donc, l’enthousiasme et les ambitions de générations entières ont été castrés par les apôtres de la domination, de l’intolérance, de la dictature… Ce n’est pas une révélation que de dire que nous sommes toujours colonisés, de l’intérieur cette fois-ci. En effet, les Djiboutiens se sentent aujourd’hui tout aussi asservis que leurs aînés par les oppresseurs d’un autre genre. Et rien ne change car il n’y a pas de réelle volonté politique de changement.

Car la «démocratie» à Djibouti a ceci de cocasse: elle choisit et parfois nomme son président et le fait élire ensuite par des urnes performantes en termes de victoires assurées…

À l’heure où j’écris ces lignes, le Peuple djiboutien ne contrôle rien du tout, ni ses lois, ni ses responsables politiques, ni son patrimoine, ni son destin. Celui qui est à la tête et son clan sont les seuls à disposer Djibouti, de son peuple et de ses richesses de la manière la plus arbitraire et scandaleuse qui soit. Depuis 1977, le peuple est mis hors-jeu et ne participe pas à l’élaboration de l’histoire de son pays.

Il subit tantôt avec souplesse, tantôt avec brutalité, l’amputation de son droit à la participation active et sombre dans une décadence qui fait de lui un ramassis d’indigènes, comme du temps de la colonisation française.

Tous les chantiers civilisateurs qui auraient dû marquer notre indépendance et permettre au peuple Djiboutien de se défaire radicalement du poids, du drame colonial, d’accéder vraiment à la liberté, à la démocratie et au progrès, n’ont jamais été entrepris, depuis le départ des Français et jusqu’à cette heure, nous vivons une sorte de tragédie comique humiliante, où de faux dresseurs de fauve épuisent nos vies et jonglent à perdre haleine avec nos impuissances dans un délire paranoïaque qui n’a d’égal que la compassion paternaliste de nos anciens maîtres dominants.

Ceci n’est nullement un jugement de valeur mais une affirmation fondée sur les faits:

32 ans après l’indépendance,
le bilan est plus que catastrophique: pauvreté endémique, déliquescence des services publics, délabrement des infrastructures, taux de chômage exorbitant, taux d’analphabétisme, de mortalité et de décrochage scolaire croissants et la liste est longue…

32 ans après l’indépendance,
nous nous retrouvons avec une économie exsangue, atrophiée, désarticulée, exclusivement prise en charge par la famille du Président et soutenu par une mafia féroce ayant pour mission de pérenniser le pillage systématique de nos ressources.

En d’autres termes, la main basse de la France des réseaux sur Djibouti se poursuit allégrement avec la complicité des nouveaux maîtres dans un environnement pourri, corrompu et bestial.

32 ans après l’indépendance,
d’honnêtes citoyens Djiboutiens sont encore volés, battus, enlevés, tués, torturés, jetés en prison ou contraints à l’exil juste parce qu’ils ont osé dire non…

Comme au temps de la répression des colons français.

32 ans après l’indé-pendance, l’état despotique et illégitime, dans absolument toutes ses proliférations, exacerbe de plus en plus, par manque d’imagination, les tensions et les lignes de fracture à l’intérieur de la société djiboutienne.

Au sein de l’ensemble de la population, les dérèglements se font de plus en plus profonds et sapent les habitudes, les solidarités et les liens ataviques d’une société en plein désarroi identitaire, éberluée par les interdits et l’activisme quasiment révisionniste et même négationniste d’un pouvoir qui veut absolument s’inscrire dans la durée et dans l’histoire, le pays né de sa seule histoire despotique, comme si tout peut-être acheté et formaté selon les désirs et les besoins d’une oligarchie en mal de légitimité, de reconnaissance et qui ne doit sa survie qu’à l’action conjuguée, d’une répression policière et sécuritaire féroce et le silence complice d’une certaine communauté internationale…

Bref, Djibouti est déconnecté de la dynamique de la satisfaction des besoins essentiels des citoyens et se retrouve déstructuré, dépouillé, sali, calomnié par ceux qui prétendent le gouverner. Il n’y a pourtant pas de recettes miracles au développement et au bien-être. Sous toutes les latitudes, les impératifs sont connus: démocratie, état de droit et bonne gouvernance, et tout ce que ces exigences comportent. On semble ne pas le comprendre encore à Djibouti.

32 ans après l’indépendance,
force est de reconnaître que beaucoup de Djiboutiens, blasés et désabusés, ne s’identifient même plus à l’acte libérateur de leurs aînés, un acte hautement trahi. Chez eux, l’euphorie de l’indépendance s’est estompée depuis que leurs espérances furent laminées par les nouveaux féodaux.

Faut-il les en culpabiliser?

Que représente le 27 Juin pour les Djiboutiens d’aujourd’hui? Quel sens délivre-t-il à son écrasante majorité, la jeunesse? Cette jeunesse qui a en face d’elle trop de mauvais exemples. Le patriotisme, l’intégrité, l’amour du pays, le sens du devoir et la reconnaissance du sacrifice suprême ont été profané.

Il y a eu un véritable détournement de sens et de richesse.

Face à ce constat hallucinant, et dans les circonstances particulières actuelles, devrions-nous continuer à célébrer avec faste, défilés, ripailles, feux d’artifices, bals et autres… cette date, ou devrions-nous plutôt en faire une journée de recueillement et d’hommage à nos vaillant martyrs et en même temps réfléchir sur leur cheminement, nous inspirer de leur courage et bravoure et en tirer des leçons?

On pourrait donc organiser un peu partout à Djibouti et dans la diaspora, des journées de réflexions sur notre destin, l’avenir de notre pays et la dérive de notre peuple?

Ce n’est ni s’ériger en prédateurs du patriotisme, ni encore moins manquer de repère. Il s’agit seulement de projeter le regard au delà du miroir et faire la part des choses afin d’accompagner notre pays à rattraper l’histoire ou, tout le moins, à éviter une marginalisation et la descente aux abîmes considérées par beaucoup comme son destin le plus probable.

Aujourd’hui, l’indépendance est un gros mot qui équivaut à une insulte à notre entendement. Nous avons besoin de la simplifier dans la plus élémentaire des notions inhérentes à tout être humain: la liberté. Comment peut-on l’entendre aujourd’hui sans se faire insulter par notre abjecte réalité.

Nous avons besoin de démystifier le mot, de le réduire à son cota minima stricto-sensu, de le dépouiller de toute sa charge lyrique, mythique et de lui enlever tout effet émotionnel ou passionnel, le faire asseoir dans le réel, de le sauver du labyrinthe du mystère des valeurs indéfinies et impossibles à saisir, le libérer de l’incertain des illusions, de le tirer au clair de l’espoir comme un objectif concret dont la réalisation ne dépend plus que de nous, de notre volonté et de notre conscience des moyens adéquats et nécessaires pour le réaliser…

Y réfléchir serait déjà un grand pas vers la reconquête de notre Indépendance, un authentique 27 Juin pour en finir avec le Djibouti des imposteurs.

Ce serait le plus grand hommage rendu aux illustres femmes et hommes qui ont lutté pour notre souveraineté internationale.

Bonne fête comme même à tous ce qui ne sont pas d’accord à ma réflexion.

On est avant tout Djiboutien.

Djiboutiennement

FreeDjibouti

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