09/10/10 (B573) FreeDjibouti -> Partis politiques : les défis de la gouvernance interne

Par FreeDjibouti

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Malgré l’entrée en hibernation de nombreux partis politiques, ceux-ci connaissent des remous en leur sein, conséquence de l’absence d’une gestion participative et donc le fruit de l’autocratie. La désertion des militants de leur formation politique traduit non seulement une volonté d’aller à la soupe, mais aussi et surtout leur lassitude d’attendre le changement, en vain.

Les partis politiques Djiboutiens sont-ils victimes de la mauvaise gouvernance ?

Cette question mérite bien d’être posée compte tenu des vagues régulières de défections des militants de leur formation politique constatées ces derniers temps.

. Qu’est-ce qui expliquent ces remous au sein des organisations politiques ?

Par définition, le parti politique est une association à but non lucratif dans laquelle des citoyens se regroupent autour d’un projet de société et d’un programme politique. Un militant a le droit de quitter librement s’il ne partage plus l’idéal de son parti. Mais, ce motif n’est pas fondamental, car à Djibouti, les critères prédominants d’adhésion des citoyens à une formation politique est l’appartenance du leader à leur groupe ethnique ou à leur région et les possibilités offertes par le parti : un parti prometteur avec de chances élevées de participation au pouvoir. Rares sont ceux qui militent dans un parti par conviction. D’autres raisons pourraient être à l’origine du départ des gens de leur parti.

La gestion autocratique des partis est décriée

Il est vrai que le phénomène n’est pas nouveau. à Djibouti, le paysage politique est toujours rythmé par la transhumance des militants ou des leaders d’un camp à l’autre à l’approche imminente des consultations électorales. L’on démissionne de sa formation pour se rallier au parti ou regroupement de partis de son choix.

L’objectif des organisateurs serait la recherche du positionnement sur l’échiquier politique national.

La crise au sein des formations politiques pourrait donc s’expliquer par la tenue très prochaine des élections. Il faut ajouter à cela la démotivation des militants.

Peu de Djiboutiens ont vocation à rester éternellement opposants. De plus, on ne peut pas exister politiquement si on n’a pas participé à la gestion du pouvoir politique. Las d’attendre l’alternance au pouvoir, certains ténors optent, soit pour une lutte armée pour renverser la situation, soit pour le ralliement au pouvoir en place.

Pour survivre, certains membres fondateurs des partis de l’opposition militent également pour le parti au pouvoir. Cependant, les gens ne rallient pas le RPP parce qu’il est plus démocratique que les autres ! Le pouvoir quel qu’il soit attire (bénéfice des privilèges, protection, changement de statut, etc.). Il est difficile aux cadres d’autres formations de résister aux stratégies offensives de recrutement du RPP. Le parti au pouvoir aura toujours un avantage que d’autres formations n’ont pas : moyen de l’État, définition de politique, rétribution plus facile des militants.

Mais, l’on ne peut pas faire l’impasse sur d’autres mobiles.

Les déserteurs justifient souvent leur départ par la mauvaise administration de leur formation par leur ancien dirigeant. Le même modèle de déclaration est repris à l’occasion de toutes les défections. Les leaders des partis politiques Djiboutiens traînent parfois derrière eux, des anciennes habitudes dont la gestion autocratique qui sapent le bon fonctionnement de leur association.

Pourquoi ce réveil tardif des oppositions intérieures aux partis politiques ?

Certains ont milité des années durant dans le système de parti unique. Sous le règne monolithique, seul l’avis du guide comptait. Les débats contradictoires ou des décisions concertées sont limités à l’intérieur du parti. C’est cette mentalité héritée du parti unique qui serait à l’origine de la gestion anti-démocratique du parti par nos leaders, lesquels ne tiennent pas compte des avis des autres. Dans le système démocratique, le parti a des devoirs envers ses membres.

L’association doit, entre autres, informer largement et consulter ses adhérents avant toute décision, favoriser en son sein le débat contradictoire et l’alternance, être transparente en matière de gestion financière, etc. Le congrès du parti offre une occasion aux militants de disséquer, de manière libre les maux dont souffre leur formation, de redéfinir ensemble de nouvelles orientations en matière de lutte ou de gestion, de renouveler le mandat du bureau exécutif, de se prononcer sur la situation politique et sociale de l’heure, etc.

Malheureusement, de nombreux leaders gèrent leur formation comme leur patrimoine personnel. Les alliances avec les autres formations ou regroupements politiques, se nouent et se dénouent selon le bon vouloir du chef… Pour illustration, un président d’une formation, membre d’un regroupement de partis, aurait signé une alliance avec un autre parti sans l’avis des autres membres du bureau. Le responsable du parti juge seul, de l’opportunité de la tenue du congrès ou pas. Pourtant, le rôle du chef, c’est d’appliquer les statuts et règlement, et décisions du parti.

La violation par le chef de ses devoirs engendre une frustration chez les militants qui quittent le parti. Cela fragilise l’association, dont le but principal est de conquérir et d’exercer le pouvoir. Il faut être uni. L’on a coutume de dire que l’union fait la force. Le départ constitue aussi un danger pour notre démocratie.

Car, la qualité d’un système démocratique ne s’apprécie que par rapport à celle des organisations politiques qui l’animent. Les dissensions dans les formations expliquent également le manque de démocratie interne. L’on ne peut être un démocrate sans appliquer les principes de la démocratie !

Comment les partis, qui ne pratiquent pas la démocratie en leur sein, peuvent-ils contribuer à l’émergence d’un pouvoir démocratique dans notre pays ?

Par ailleurs, il est beau de revendiquer l’alternance ou de fustiger la mauvaise gouvernance du pouvoir, mais encore faut-il que les leaders des partis de l’opposition eux-mêmes donnent également de bons exemples en matière de gestion et d’alternance dans leur formation.

Or, les assises débouchent rarement sur l’alternance au sommet. Généralement, les partis ne procèdent pas de façon démocratique à l’élection des membres du bureau exécutif ni au renouvellement dudit bureau. La désignation des postulants se fait souvent par cooptation. Pour preuve, depuis l’instauration du multipartisme chez nous, la quasi-totalité des partis sont dirigés par les mêmes personnes.

Pourquoi les autres n’accèdent-ils pas aux commandes ?

Les statuts et le règlement intérieur du parti donnent droit à tout militant de se porter candidat.

Mais, les membres ne remplissent pas les conditions pour être éligibles. L’une des conditions est de contribuer à la vie du parti en payant ses cotisations. Or, selon les leaders, beaucoup de militants ne cotisent pas. La plupart ignorent les textes du parti. Conséquence : ils sont souvent marginalisés. De plus, les militants pensent qu’il faut avoir les moyens pour diriger une formation. Par contre, les dirigeants qui sont nantis, du moins pour quelques-uns, financent parfois en grande partie le fonctionnement de la structure. Même si celui qui a des moyens détient aussi le pouvoir, les leaders ne peuvent pas indéfiniment rester à la tête de leur organisation.

Après le chef, le déluge inévitable ?

L’association est appelée à survivre après son leader. Il faut penser dès à présent à la relève. Puisque la majorité des responsables sont des sexagénaires. En outre, un militant de base, qui dispose de moyens, peut contribuer de manière efficace au fonctionnement de son parti.

L’alternance au sein du parti est aussi valable que celle d’un État démocratique

Les partis doivent trouver des solutions à ce phénomène de défections fréquentes dans leur rang afin de redonner confiance à leurs militants.

Pour y parvenir, il leur faudra développer la démocratie interne. L’action première, doit être sous-tendue par la conviction qu’il ne peut pas y avoir de vraie démocratie sans partis politiques forts. Les responsables politiques doivent œuvrer au renforcement de capacité des partis, gage d’une véritable démocratie.

Cela passe par la tenue des ateliers d’échange regroupant les acteurs politiques sur le mode de gestion démocratique au sein des partis politiques, l’amélioration du cadre politique, formation politique sur la stratégie des alliances, par exemple.

Djiboutiennement

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