10/06/2017 (Brève 998) Addis Abeba cherche à réduire sa dépendance vis-à-vis de Djibouti (La Tribune Afrique, signé par Amine Ater)
Le port de Berbera situé au Somaliland semble attiser l’intérêt du gouvernement éthiopien soucieux de multiplier ses accès à la mer. Addis Abeba dépend à 90% du port de Djibouti pour ses échanges commerciaux, une situation qui pourrait changer en cas d’entrée du gouvernement éthiopien dans le tour de table du port de Berbera géré par l’émirati DP World. Autre atout de ce complexe portuaire en extension, la présence d’une base militaire émiratie dans les environs.
Le gouvernement éthiopien est actuellement en négociation pour acquérir des parts dans une co-entreprise impliquant DP World Ltd. Cette entreprise s’apprête à devenir gestionnaire d’un port au Nord de la Somalie. Une opération qui pourrait stimuler l’économie éthiopienne, qui jouit d’une croissance rapide, mais qui pâtit de l’absence de littoral. Les autorités éthiopiennes disposent d’un « accord de principe » pour intégrer le tour de table du port de Berbera.
°° Pré carré émirati
Ces pourparlers visent à donner à Addis-Abeba une part de 19% dans le capital du port de Berbera. Situé au Somaliland, un territoire semi-autonome de la corne d’Afrique qui aspire à devenir un Etat, la gestion de ce port a été confiée par les autorités du Somaliland à l’opérateur émirati, DP World basé à Dubaï, qui détient une concession de 30 ans pour gérer et développer les installations du port. Pour l’instant l’opérateur émirati et le gouvernement du Somaliland sont les actionnaires majoritaires du DPW Berbera.
En cas de succès des négociations, le tour de table devrait être réparti entre le Somaliland qui détient 30% de l’entreprise, DP World qui compte 51% et 19% pour Addis-Abeba. Le port de Berbera est situé sur le golfe d’Aden, une voie navigable stratégique qui mène à la mer Rouge et au Canal de Suez. Le Somaliland revendique également la location d’un aéroport militaire qui pourrait être étendue en une installation navale, à proximité du port.
++ Multiplier les points d’entrée en Ethiopie
Accéder au tour de table du port est donc très stratégique pour l’Ethiopie, deuxième nation en terme de démographie du continent et dont la politique économique vise à faire du pays un centre de fabrication orienté vers l’exportation. D’ailleurs, le FMI prévoit une croissance de 7,5% pour l’Ethiopie en 2017, ce qui représente le rythme le plus rapide sur le continent après la Côte d’Ivoire. L’intérêt d’Addis-Abeba pour le port de Berbera est l’installation en cours d’un terminal à conteneurs.
Une unité qui sera dédiée au trafic de conteneurs en tant que centre de transit pour les pays enclavés. Ce qui permettra à l’Ethiopie de diversifier ses points d’entrée et de sortie de marchandises. Pour rappel, plus de 90% du commerce de l’Ethiopie passe actuellement par Djibouti. Addis-Abeba a même construit un chemin de fer la reliant à Djibouti, de manière à réduire les temps de chargement de 3 jours à 12 heures. Montant de l’investissement, 2,6 milliards de dollars pour une ligne qui devrait transporter 7,5 millions de tonnes métrique de cargaison par an d’ici 2020.
L’Ethiopie a par ailleurs récemment acquis des navires cargos, de manière à renforcer la capacité de ses services de transport maritime. D’ailleurs les autorités du Somaliland prévoit la construction d’une route de 260 km reliant le port à la frontière éthiopienne. La base militaire émiratie représente pour sa part un argument sécuritaire en faveur de l’exploitation du port de Berbera. La proximité géographique avec les Emirats Arabes Unis devrait également permettre aux opérateurs éthiopiens d’importer des matériaux de construction à faible coûts.