03/12/05 (B327) Un lecteur nous adresse un article extrait de l’Etincelle N°1 du 25/07 au 25/09 qui anticipait déjà les événements qui se sont déroulés à Arta le 30 novembre …. Rétrospective historique fort intéressante de toutes les violations commises dans ce quartier depuis 15 ans, par les régimes de Gouled puis de Guelleh.

POURQUOI ARHIBA EST- ELLE
LA PRINCIPALE CIBLE DE LA REPRESSION ? (Extrait de l’Etincelle N°1)

Esquisse d’une analyse sociale de ce quartier pauvre de la Capitale

En 2004, les habitants du quartier Arhiba ont été à plusieurs reprises l’objet de la répression de la part des forces de l’ordre. Par deux fois (en juin et décembre) plusieurs personnes ont été blessés et plusieurs autres ont été emprisonnés, torturés.

Il ne se passe pas une année sans qu’il y ait des heurts entre les habitants de ce quartier et les forces de l’ordre. Pourquoi un tel acharnement contre les habitants de ce quartier ? Arhiba qui a été crée pour les dockers dans les années 1970 est devenu aujourd’hui un immense bidonville abritant plus de 30 000 personnes, à l’intérieur de la Capitale.

Arhiba mérite bien son nom qui veut dire «Bienvenue » ! Puisqu’il est devenu le refuge de tous les sinistrés fuyant la sècheresse et un sanctuaire pour tous les persécutés.

Les personnes d’origine Gadaboursi, pourchassées par les miliciens de SDS y ont été accueillies en 1988/89. Les Oromos qui ont subit une véritable chasse à l’homme en juin 1991 (une centaine ont été massacrés par des groupes de civils encadrés par les forces de sécurité) se sont massivement réfugiés à Arhiba. Les poursuivants se sont heurtés aux habitants d’Arhiba qui ont perdu 5 hommes dans la défense des fugitifs Oromos.

Le quartier deviendra aussi le lieu de refuge, pour tout ceux qui ont fui la répression aveugle dans le Nord et le Sud Ouest du pays. Les militants du Parti légalisé PRD crée par le regretté Mohamed Djama Elabé, ont eu la vie sauve grâce à
l’intervention énergique des habitants d’Arhiba contre la FNP (Police) en 1993.

C’est ce quartier, que le régime a choisi de punir en représailles à la suite d’une défaite militaire au Nord, le 18 décembre 1991. Tôt le matin, la Cité Arhiba est cernée par une force impressionnante composée de Gendarmes, des militaires, des éléments de Force navales et des policiers. Ainsi sont exécutées de sang froid, 59 personnes, et 200 seront blessées par balles, une centaine disparue.

Le bilan aurait été plus lourd, sans l’intervention d’un courageux policier Mohamed Houmed, qui a empêché que les gens ne montent dans des camions. Il sera exécuté par ses collègues. L’ensemble de ces victimes sont enterrées sur le lieu où elles furent assassinées. Elles appartiennent toutes à l a communauté afare.

La réaction internationale en général et celle de la France en particulier n’ont pas été à la hauteur de ce crime odieux. Cependant le survol d’un hélicoptère militaire français qui a par ailleurs filmé la scène, a quelque peu freiné le carnage. Les auteurs du forfait courent toujours, blottis dans les plus hautes fonctions de l’Etat.

Depuis la sanglante journée du 18 décembre 1991, chaque année est commémorée « la journée des Martyrs » à Djibouti, en France et depuis 7 ans en Belgique.

En France, c’est l’Association pour la Démocratie et le Développement (ADD) qui organise chaque année la manifestation du 18 décembre contre l’oubli, contre l’impunité des coupables et pour l’ouverture d’une enquête internationale.

En Belgique, c’est le Forum pour la Démocratie et la Paix qui a pris en charge l’organisation de la manifestation. Le 18 décembre 2004, de nombreux djiboutiens représentant plusieurs sensibilités de l’opposition ont manifesté devant l’Ambassade de Djibouti en Belgique.

Arhiba a connu une autre expédition punitive de la part des Forces gouvernementales en juin 1993, causant la mort de 10 personnes et de plusieurs blessées, détruisant les habitations d’Arhiba II, suivi de l’expulsion des milliers d’afars vers l’Ethiopie. Se concentrent dans ce quartier tous les ingrédients d’une contestation : l’exclusion communautaire, sociale et de la citoyenneté par le fait de prince.

Arhiba est aussi un quartier où le taux de chômage est le plus élevé, où le service sanitaire est le plus déficient et le taux de personnes atteintes par le VIH est le plus élevé. Cette dernière donnée n’est peut être pas le fruit d’un hasard : il ressort de l’enquête de certaines associations que des responsables djiboutiens auraient dirigé des prostituées atteintes du VIH vers Arhiba.

Le régime cherche un prétexte pour raser cette cité, le Président actuel a affirmé publiquement devant un parterre de jeunes qu’il envisageait de détruire le quartier.
Malgré toutes ces répressions, Arhiba n’a pas plié, reste debout et est à l’avant-garde des luttes sociales et politiques.