14/03/06 (B341-B) L’antisémitisme au service de la répression syndicale. (Lecteur)
« Exemple de paix et de démocratie pour les pays de la corne de l’Afrique » : ainsi était encore qualifié Djibouti le 3 mars dernier par Mme Brigitte Girardin, ministre française déléguée à la Coopération, au Développement et à la Francophonie. Est-ce fort de cette impunité (ce droit d’opprimer devrait-on dire) que le régime djiboutien s’est aussitôt lancé dans une répression sauvage des syndicalistes ? Rien n’interdit d’établir une certaine causalité entre dictature locale et permissivité internationale.
Mais, depuis la nomination au Quai d’Orsay de celui que les milieux concernés ont affublé du sobriquet de « Mickey d’Orsay », il n’échappe plus à personne que la France, minée par une fin de règne pathétique, n’a plus aucun dessein international à promouvoir.
Donc, son satisfecit à la dictature djiboutienne doit être pris à sa juste mesure : un non-événement surtout destiné gagner du temps en calmant ceux que sa Justice pense impliqués dans l’affaire Borrel.
Car le blabla de la France n’a pas empêché les instances internationales de vigoureusement condamner Djibouti pour sa répression syndicale (cf le communiqué du 14 mars 2006 de La Confédération internationale des syndicats libres CISL- et l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme FIDH- et de l’Organisation mondiale contre la torture -OMCT-).
Les quatre dirigeants syndicaux incarcérés à ce jour (MM. Mohamed Ahmed Mohamed, Djibril Ismael Egueh, puis MM. Adan Mohamed Abdou et Hassan Cher Hared) sont accusés de « livraison d’informations à une puissance étrangère ». Ceci au motif que les deux premiers avaient suivi un stage de formation en Israël à l’invitation de la centrale syndicale Histadrut. S’être rendus en Israël, voilà tout simplement ce qui leur est reproché !
Il y a déjà quelques mois de cela, des syndicalistes djiboutiens qui avaient accepté la même invitation avaient droit à pas moins qu’une fatwa en bonne et due forme lors de la prière du Vendredi. A travers la prêche de religieux à ses ordres, le régime tentait de discréditer toute l’action syndicale de ceux qui avaient osé pactisé avec « l’ennemi juif ». Car, c’est bien de cela qu’il s’agit malheureusement : une nouvelle manuvre d’incitation à la haine raciale et religieuse, ce qui n’est ni nouveau ni circonstancié : pour qui s’en souvient encore, la troupe militaro-artistique du régime chantait au printemps 2002 sur les ondes de la RTD « Qu’Allah maudisse les Juifs » !
Djibouti étant un pays de rumeurs et de médisance, les professionnels de l’intoxication se déchaînent sur le thème qu’il est immoral de se rendre en Israël, ce que les simples d’esprit, pas si rares sous ces cieux où le khat que la vraie réflexion, n’auront que peu de mal à accepter. L’antisémitisme au service de la lutte antisyndicale : il fallait y penser ! Mais c’était si facile d’y penser dans un pays où la liberté syndicale est quotidiennement bafouée ; où les travailleurs n’osent pas déclencher le plus pacifique mouvement de grève pour soutenir es syndicalistes injustement emprisonnés.
Parce que dans un pays où la Justice n’existe que sur le papier (et encore !) chaque travailleur a peur de perdre son emploi aussi facilement que d’autres sont arrêtés et incarcérés. A Djibouti, le travail n’est pas un droit inaliénable, garanti par la Déclaration des Droits de l’Homme : c’est un passe-droit qui dure tant que dure la soumission servile à l’ordre établi. Et la présence militaire des plus grandes démocraties occidentales n’y changera rien. Comme quoi il est risible de rechercher des islamistes terroristes à Djibouti en payant grassement un régime qui, en plus d’opprimer les siens, pratique aussi ouvertement un antisémitisme primaire faisant justement le lit de toutes les dérives intolérantes.
C’est contre le régime djiboutien qu’une fatwa populaire devrait être lancée : il est temps de s’en débarrasser !