12/11/07 (B421) RUE 89 : Affaire Boulin: la famille prend l’opinion à témoin (Info lectrice)

Par David Servenay (Rue89)

Elle a choisi Libourne. Point de départ de l’histoire familiale. Ce vendredi 2 novembre, soir de vacances, ils sont peu nombreux dans la salle polyvalente de la ville pour entendre l’appel de Fabienne Boulin-Burgeat. Une centaine de personnes, des amis et quelques « patriotes » comme le dira un Libournais « d’origine irlandaise ».

Mobiliser l’opinion pour obtenir la réouverture du dossier

Deux semaines après la décision du procureur général de Paris, Laurent Le Mesle, de ne pas rouvrir le dossier Boulin, la fille du ministre du Travail et de la Participation assassiné en 1979 cherche à mobiliser l’opinion.

Objectif: obtenir la réouverture du dossier judiciaire, mais surtout faire de son histoire un symbole de l’esprit républicain. Pour cela, Fabienne Boulin-Burgeat fourmille de projets: créer une association, faire une tournée dans tout le pays ou encore monter un site internet…

Bien sûr, Robert Boulin a marqué cette petite ville alanguie au bord de la Dordogne. A partir du retour des gaullistes au pouvoir en 1958, il en fût pendant plus de vingt ans le député-maire UNR, puis RPR. Mais surtout, c’est le terroir de son engagement politique. Un mot suffit à réveiller les mémoires locales: Navarre. Le principal réseau de Résistance de la région, où il s’engage en 1941, à 17 ans, et dont il devient le chef à partir de 1943. Une période où Robert Boulin jouait à « la main chaude avec la mort ».

Le RPR et le SAC derrière l’assassinat?

Dans l’assistance, un vieux monsieur écoute avec attention les explications d’Eric Burgeat. Avocat de formation, le mari de Fabienne Boulin détaille la logique de la décision du procureur Laurent Le Mesle.

« C’est une décision prise ‘en droit et en opportunité’, ce qui veut dire que ce n’était peut-être pas le moment de rouvrir le dossier. Mais cela n’empêche en rien une réouverture du dossier… plus tard. »

Une fois le débat terminé, casquette à la main, Jacques Douté va dire un mot aux orateurs. Le vieux monsieur est un ami de longue date, celui par qui Robert Boulin est entré en maçonnerie à la fin de sa vie. Catholique convaincu, l’homme politique avait été déçu par les reculs postérieurs au concile Vatican II. Il avait donc fini par dire « oui » à ses amis du Grand Orient de France, qui l’initièrent en 1975.

Restaurateur à Libourne, Jacques Douté voyait chaque semaine son ami Boulin qui, rituellement, dînait chez lui en arrivant du train de Paris le week-end. Huit jours avant le fatal 29 octobre 1979, Douté envoit un bristol d’invitation pour la tenue du 26 octobre, où il doit endosser, pour la seconde fois, les habits de « Grand Vénérable » de sa loge.

Cinq jours plus tard, la réponse arrive par courrier à en-tête du ministère: « Désolé, mon Très Cher F…, mais je serai ce jour-là au Parlement. » Aussitôt, Jacques Douté téléphone à son ami. Lors de cette conversation, Robert Boulin désigne les adversaires auxquels ils se heurtent au sein du RPR et du SAC, le Service d’action civique.

Dans l’assemblée, plusieurs élus locaux sont venus entendre Fabienne Boulin.

L’affaire incarne toujours un enjeu dans le paysage politique local. Le maire de Libourne, Gilbert Mitterrand, y est très attentif lorsqu’il évoque le refus de réouverture du dossier:

« Ces éléments nouveaux, lesquels faudraient-ils apporter? Faut-il des aveux? Faut-il attendre que madame Boulin trouve elle-même le ou les assassins avec leur propre aveu? Ça paraît énorme que la justice ne veuille pas admettre qu’elle a commis une erreur. »

Toutes les bonnes volontés, du Net et d ‘ailleurs, sont donc conviées à apporter leur soutien à Fabienne Boulin-Burgeat.