14/06/08 (B452) AFP : Arrêt des tirs à la frontière Djibouti-Erythrée, nouvelle source de tension.

Les combats entre troupes djiboutiennes et érythréennes ont cessé dans la région frontalière de Ras Doumeira, devenue un facteur supplémentaire de tensions dans la région explosive de la Corne de l’Afrique, toujours à la merci d’un nouveau conflit.

« Depuis 36 heures, les combats ont cessé mais le dispositif des forces armées djiboutiennes (FAD) est en place pour défendre le territoire de toute incursion ennemie », a annoncé vendredi à Djibouti le haut commandement militaire.

« Le dernier bilan établi par la direction des services de santé des armées fait état de 9 morts, de 10 blessés graves et de 98 blessés légers » dans les rangs des FAD, selon un communiqué du haut commandement. L’Erythrée n’a fourni aucune indication sur ses pertes.

Des échanges de tirs nourris ont eu lieu mardi entre troupes érythréennes et djiboutiennes à Ras Doumeira, à 120 km au nord de la ville de Djibouti.

La tension entre l’Erythrée et Djibouti était très forte depuis une incursion, le 16 avril, de troupes érythréennes vers Ras Doumeira, zone désertique sur les rives de la mer Rouge.

Les deux pays se sont opposés à deux reprises en 1996 et 1999 pour cette zone.

Selon Djibouti, la désertion de soldats érythréens – venus se réfugier côté djiboutien – a mis le feu aux poudres mardi, entraînant une attaque érythréenne, suivie d’une riposte djiboutienne.

Asmara a nié toute velléité hostile envers son voisin, mais le gouvernement djiboutien a vu mercredi dans cet accrochage une volonté délibérée de l’Erythrée « de déstabilisation (…) de toute la Corne de l’Afrique ».

Petit Etat bénéficiant d’une position stratégique hors pair à l’entrée de la mer Rouge, le long d’une des voies maritimes les plus fréquentées au monde, Djibouti est devenu la pièce maîtresse de la lutte antiterroriste dans la Corne de l’Afrique depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

Le pays, ancienne colonie française, abrite la plus grande base militaire de la France à l’étranger et l’unique base militaire américaine en Afrique.

Paris a indiqué jeudi apporter à Djibouti une aide logistique, notamment médicale, ainsi que des renseignements militaires dans cette affaire.

Depuis des années, Djibouti tente d’échapper aux conflits qui minent ses trois voisins: Somalie, Erythrée et Ethiopie, dont la quasi totalité des importations transite par le port de Djibouti.

L’Ethiopie et l’Erythrée sont en état de quasi belligérance permanente depuis leur guerre frontalière de 1998-2000. Addis Abeba et Asmara s’opposent également en Somalie, livrée au chaos depuis le déclenchement de la guerre civile en 1991.

L’armée éthiopienne soutient le gouvernement somalien, tandis que l’Erythrée appuie l’opposition, dominée par les islamistes, qui a formé il y a un an à Asmara une nouvelle coalition, l’Alliance pour une nouvelle libération de la Somalie (ARS).

Soucieux de préserver sa neutralité, le gouvernement djiboutien a abrité de nouveaux pourparlers intersomaliens qui ont abouti lundi à la signature d’une trêve entre le gouvernement de Mogadiscio et l’ARS. Cette trêve a aussitôt été dénoncée par des islamistes ayant le soutien de l’Erythrée.

Pour le journal gouvernemental djiboutien, le fait que l’accrochage de Ras Doumeira ait eu lieu dès le lendemain de la signature de l’accord de Djibouti n’est pas « une coïncidence ».

Quoi qu’il en soit, le Conseil de sécurité de l’ONU a condamné jeudi « l’action militaire de l’Erythrée contre Djibouti » et a « exhorté les deux parties, en particulier l’Erythrée, à faire preuve d’un maximum de retenue et à ramener leurs forces à leurs positions d’avant l’incident ».