24/12/06 (B375) REUTERS : Les islamistes somaliens appellent au « djihad » contre l’Ethiopie. (Info lectrice)


Par Guled Mohamed

MOGADISCIO
(Reuters) – Les islamistes somaliens ont exhorté d’autres musulmans
à se joindre à leur « guerre sainte » contre l’Ethiopie,
tandis que des tirs de roquettes se poursuivaient entre leurs combattants
et les forces gouvernementales.

« Notre
pays est ouvert à tous les musulmans. Qu’ils viennent combattre en
Somalie et livrent le djihad et, si Dieu le veut, attaquent Addis Abeba »,
a déclaré le cheikh Youssouf Mohamed Siad « Inda’ade »,
responsable de la Défense au sein de l’Union des tribunaux islamiques
(UTI).

Les deux
camps échangent des tirs d’artillerie et de roquettes depuis mardi.
Chacun affirme avoir tué des centaines de combattants adverses, des
ONG évoquant pour leur part des dizaines de morts.

Ces combats,
les plus sérieux qui aient opposé les deux camps à ce
jour, font craindre un embrasement généralisé de la Corne
de l’Afrique, où l’Ethiopie et l’Erythrée, ennemies historiques,
pourraient reprendre leurs hostilités en terrain somalien.

« Nous
avons demandé à la communauté internationale de régler
ce problème », a déclaré Inda’ade, un extrémiste
connu pour sa virulente rhétorique, aux journalistes à Mogadiscio.
« Nous leur avons demandé d’agir avant que cela ne devienne un
brasier qui s’étende à toute la région. »

TIRS
DE ROQUETTES

L’UTI
a pris le pouvoir à Mogadiscio et dans une partie du sud de la Somalie
en juin, entravant les efforts déployés par le gouvernement
de transition, basé à Baïdoa, pour rétablir un pouvoir
central dans ce pays en proie à l’anarchie depuis le renversement du
dictateur Mohamed Siad Barré, en 1991.

De sources
diplomatiques, on craint que les propos enflammés tenus par les islamistes,
soutenus par l’Erythrée, ne soient destinés à provoquer
l’Ethiopie, qui soutient le gouvernement, afin qu’elle intervienne militairement.

Addis
Abeba a fait savoir que sa patience avait des limites et le parlement éthiopien
a approuvé un plan censé permettre au pays de réagir
à une éventuelle invasion islamiste.

Solomon
Abede, porte-parole du ministère éthiopien des Affaires étrangères,
a estimé samedi que l’appel au « djihad » de l’UTI prouvait
son « extrémisme ». « S’ils étaient aussi forts
dans leurs actes que dans leurs déclarations, les extrémistes
de l’UTI auraient déjà attaqué Addis Abeba », a-t-il
dit.

Un habitant,
Hassan Yusuf, a vu des combattants islamistes se rapprocher de Daynunay, une
base militaire avancée du gouvernement située à environ
20km au sud-est de celle de Baïdoa, qui est encerclée par l’ennemi.

« Ce
matin, j’ai entendu des tirs de roquettes provenant de la ligne de front »,
a-t-il dit. Il ajoute avoir vu vendredi des combattants islamistes amener
trois soldats éthiopiens morts dans un village proche de Daynunay tandis
que des islamistes blessés étaient soignés à Buur
Hakaba, localité voisine.

APPELS
À LA RETENUE

Les islamistes
ont annoncé avoir pris vendredi soir Tiyeglow, une ville située
à environ 70km au nord-est de Baïdoa où ils disent n’avoir
rencontré aucune résistance.

En Ethiopie,
des policiers ont fait savoir que les forces de sécurité avaient
arrêté 20 personnes qui s’étaient infiltrées dans
la région de l’Ogaden (Est), où prédomine l’ethnie somalie.
Ces individus sont accusés d’avoir collaboré avec les islamistes.
Addis Abeba soupçonne ces derniers de vouloir annexer l’Ogaden.

L’Union
africaine a estimé samedi, comme avant elle l’Onu, les pays occidentaux
et des ONG, qu’il fallait que les combats cessent et que reprenne le processus
de paix.

Le Premier
ministre somalien Ali Mohamed Gedi a assuré que sur le principe le
gouvernement était disposé à le faire.

« Mais
il n’est pas possible pour les Tribunaux islamiques d’attaquer des positions
gouvernementales d’un côté et, de l’autre, d’être disposés
à négocier », a-t-il déclaré aux journalistes
à Baïdoa.

Les islamistes
accusent l’Ethiopie, alliée de Washington dans sa lutte mondiale contre
le terrorisme, d’envahir la Somalie. Washington affirme pour sa part que l’UTI
est dirigée par une cellule d’Al Qaïda, ce qu’elle nie.

Des experts
militaires estiment que l’Ethiopie dispose d’environ 15.000 à 20.000
soldats en Somalie, tandis que l’Erythrée compte environ 2.000 hommes
appuyant les islamistes.

Asmara
nie toute présence militaire en Somalie, tandis qu’Addis Abeba ne reconnaît
le déploiement que de quelques centaines d’instructeurs militaires
à Baïdoa.