14/04/09 (B494) FreeDjibouti -> LA RTD : LA TELE DE LA HONTE

Incompétence, ignorance, complaisance ou refus de voir l’évolution du monde, la RTD est une télévision publique qui refuse de faire de la télévision.

Télévision du palais présidentiel, des séminaires ou des colloques, la RTD assassine constamment la compétence des journalistes en les réduisant à d’abominables griots.

L’élection de Guelleh à la tête du pays a aggravé la situation. La RTD est incontestablement devenue la télévision du Président. Ce dernier et ses acolytes y passent le clair de leur temps à endormir les populations avec des déclarations purement propagandistes. Normalement créée pour servir le public, la télévision nationale djiboutienne a complètement failli à sa mission. Du jingle au contenu du Journal Télévisé, en passant par le décor ou encore le nœud de la cravate du présentateur, tout dégage des relents des années 90.

Aujourd’hui sur l’Internet, la RTD se révèle comme une honte nationale vendue à l’international. Regard critique sur une télévision publique en pleine déconfiture.

La plupart des Djiboutiens, du moins ceux qui s’y connaissaient un peu en Télé ont trop vite fait de penser qu’avec l’avènement du régime dit de «changement», on allait en finir avec les vieilles méthodes de la télévision d’Etat. Mais c’était mal connaître IOG et ses méthodes dictatoriales.

La situation n’a fait que s’aggraver.

Le régime a changé, mais à la RTD, on a continué à appliquer les vieilles recettes classiques : «on prend les mêmes et on recommence». Aujourd’hui, il est désolant, déplorable, à la limite révoltant de voir que la RTD ne diffuse aucune émission digne du nom qui va dans le sens de sensibiliser les Djiboutiens aux problèmes de corruption, de laxisme, de malhonnêteté, de médiocrité, de gaspillage. Bref une télé responsable qui assume ses responsabilités et qui sensibilise la population sur les risques et les dangers du je-m’en-foutisme qui les gangrènent le système tout entier.

On note une absence notoire d’émissions de débats d’intellectuels sur les questions de société, de politique, sur la bonne gouvernance, sur le civisme. Pourquoi ne pas inviter des intellectuels au Journal Télévisé (pas toujours sur le plateau mais ils peuvent être interrogés en direct depuis un lieu public, un restaurant ou à leur domicile) ?

En fait, la RTD devrait être le temple, l’agora où tous les problèmes de la société djiboutienne sont débattus, notamment ceux qui ont trait au développement, au progrès social, à la cohésion nationale, à l’intégrité et surtout au patriotisme.

Qu’est-ce qu’un budget gouvernemental ? Quels sont ses impacts sur la population ? Quelles sont les maladies les plus répandues dans la population ?

La RTD devrait être une télévision à travers laquelle on comprend mieux les choses. Elle devrait informer et sensibiliser la population qui n’a pas encore atteint un certain niveau d’analyse et de compréhension des effets pervers et dangereux des maux qui minent notre société.

C’est aussi par elle que doivent s’exprimer les masses, c’est par elle que les gouvernants peuvent voir ce que la population pense de leur façon de gérer les affaires du pays et ce qu’elle ressent quand les choses ne vont pas bien ou si leur politique sociale a été efficace ou non.

En fait, la RTD devrait jouer son rôle de quatrième pouvoir en critiquant et en montrant la voie du succès au gouvernement.

Mais malheureusement ce n’est pas le cas : à la RTD, on ne donne jamais la parole ni aux populations ni aux intellectuels crédibles. Cela ne plaît pas, ou du moins cela n’arrange pas le Président. Les journalistes et animateurs ont depuis longtemps jeté le froc aux orties et se sont transformés en complices et en talentueux relayeurs de la démagogie et des manigances politiciennes. Il n’y a qu’à suivre de près le Journal Télévisé pour s’en rendre compte.

Comment comprendre qu’une télévision publique puisse sciemment rompre avec la déontologie professionnelle pour épouser une inélégance avachie derrière laquelle se cache toute une panoplie de dérives, de désinformation, d’incompétence et de désorientation de la population ?

On nous balance à répétition de la musique et des chansons à la solde de Guelleh ou des films étrangers. Quelqu’un disait la dernière fois que c’est parce que les Djiboutiens aiment les films étrangers et la musique. Bien sûr qu’ils les aiment ; mais c’est parce qu’on les a forcés à les aimer en ne leur donnant pas la chance de voir autre chose !

Ce que l’on constate depuis des années, c’est une RTD qui passe tout le Journal Télévisé à diffuser les images d’une seule personne et de ses acolytes qui n’ont d’autres soucis que de se faire de la publicité et de se partager impunément, l’argent du contribuable djiboutien.

Si l’on s’en tient à ce qui se passe quotidiennement, on dira simplement que notre télévision est devenue le lieu par excellence où les démons viennent faire étalage de leurs discours laudatif envers le patriarche président en vue d’une éventuelle promotion dans l’escarcelle gouvernementale. En un mot l’actualité, dans la version de la télévision djiboutienne, se résume en la tragi-comédie institutionnelle, où Guelleh, dans son costume de marchand d’illusion, fait défiler ses ministres et ses alliés politiques par intérêt pour sauver les apparences d’un pays qu’il mène droit vers le chaos.

Les opposants n’ont jamais le droit à la parole comme leur en donnent droit la démocratie et l’éthique républicaine.

Ainsi les journalistes se sont-ils laissés enfermés dans un cercle vicieux de média d’état qui n’est là que pour servir le Président et ses collaborateurs, faisant ainsi fi de leurs missions premières qui sont ceux d’informer juste et d’éduquer.

Il est rarissime de voir à la RTD des reportages ou enquêtes sur les difficultés quotidiennes de la population : la semaine dernière par exemple, pendant que la télévision nous passait en boucle les interminables séminaires, les «activités du chef de l’Etat» ainsi que les «activités du Président de l’assemblée nationale» (termes inventés par les responsables de la RTD pour faire croire aux Djiboutiens que ces derniers travaillent pour eux), la radio nationale nous informait concrètement qu’il avait une grosse pénurie de sang dans les centres hospitaliers djiboutiens. Il faut désormais arrêter de croire que la télévision publique djiboutienne est financée par le gouvernement.

La télévision nationale est en fait financée par nous tous !

C’est inacceptable ce qu’elle nous sert en retour. On ne peut pas dire qu’on fait de la télé et ne pas pouvoir faire une enquête sur la pénurie de sang dans les hôpitaux djiboutiens. Il s’agit d’un sujet public majeur à côté duquel la télévision est passée sans souci. Les responsables de la RTD tiennent trop à leur fauteuil pour résister au Président de la République. Tous ceux qui ont manifesté des intentions contraires à la volonté du chef de l’Etat, ont été remerciés ou éjectés de leur poste de responsabilité. Beaucoup de journalistes qui n’avaient jadis accepté qu’à contrecœur les conditions nouvelles de la République démocratique, ne se sont pas fait prier pour collaborer avec le nouveau régime afin de préserver leur gagne-pain.

la RTD a finalement un site Internet mais il suffit de faire une comparaison pour se rendre compte que le site est le plus grotesque de l’Afrique de l’est.. C’est un site sans vie, sans contenue et sans ergonomie. Il faut parfois même avoir de la chance pour y accéder. Quel gâchis !

A regarder la RTD, on a parfois honte.

On n’a pas toujours l’impression qu’il y a même un téléprompteur. Entre la lecture complète du communiqué de la présidence ou du ministère et la lecture classique de lancements, on ne se trouve jamais.

Tout le monde sait maintenant que l’objectif de Guelleh et de ceux qui l’entourent, c’est d’asseoir un régime, un Etat reposant sur une puissante télévision de propagande. C’est ce que René Balmé décrit en ces termes «Aujourd’hui, les dictatures n’ont pas à avoir recours à la torture, aux exécutions sommaires ou à l’emprisonnement de masse. Elles ont les médias, suffisamment aguerris et entraînés pour laver les cerveaux et leur distiller soigneusement, méthodiquement et quotidiennement le prêt à penser qui fera de chaque citoyen l’électeur modèle formaté pour reconduire, reproduire, malgré lui, le modèle.»

On voit ainsi se succéder au jour le jour, avec une inquiétude sans nom, des journalistes pervertis (pas besoin de citer leurs noms. Tout le monde les connaît et tous se reconnaîtront à travers ces lignes), versant dans le griotisme ou la passivité totale, sans effort d’analyse transcendantale qui aurait pu leur permettre de laisser transparaître qu’ils ne sont pas que des moutons de panurge.

A cela s’ajoute le fait que les images dont on nous gave au JT ne sont que des images crues, tronquées des chaînes étrangères, sans filtre, sans effort de réécriture et d’analyse. Mais qu’on ne s’y trompe pas : Il y a certes dans cette boite à images d’IOG quelques journalistes honnêtes et intelligents qui font sérieusement leur travail, mais ils payeront toujours pour les pourris.

Avec le salaire insignifiant dont ils bénéficient, les jeunes journalistes et les techniciens de la RTD sont toujours réticents à faire des reportages pour lesquels, il n’y a pas de rémunération (per diem) sauf les quelques billets donnés par les responsables qui ont demandé une couverture médiatique pour valoriser leur action personnelle.

C’est pour la plupart, une journée financièrement perdue et on ne peut que les comprendre. Cette mentalité a franchement tué en eux tout esprit de créativité et d’innovation. On nous bourre la tête avec le mot «changement» à longueur de JT mais le medium par lequel passe le message, ne veut jamais s’aventurer à expérimenter le changement. Il est impossible aujourd’hui de convaincre les Djiboutiens que la RTD n’y arrive pas parce qu’elle n’en a pas les moyens.

On ne fait pas de la télévision quand on n’en a pas les moyens. Il va donc falloir fermer boutique.

Shame on you !

FreeDjibouti

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