16/03/10 (B542) Les chroniques du Sergent-Chef Ariko (suite). Le parti au pouvoir depuis plus de deux décennies a convoqué in extremis ses militants, pour un congrès qui s’est révélé être désastreux pour la majorité au pouvoir, incapable de proposer des solutions ni même de régler ses dissensions internes.

Immédiatement après le congrès de l’ARD qui s’est tenu à Balbala, le parti au pouvoir a convoqué « en urgence » ses militants pour tenir un congrès.

Une telle précipitation, mais pour quelles raisons ?

Ce grand parti de l’opposition (ARD) a été fondé par par le regretté Ahmed Dini, qui est le vrai père de la Nation. Le RPP a toujours refusé de le reconnaître comme tel, privilégiant de son côté, un vieux rigolo de la politique françafrique.

Son neveu, le dictateur a été stupéfait d’apprendre que les gens affluaient en masse pour soutenir le parti d’Ahmed Dini dirigé aujourd’hui par un Président élu démocratiquement par les militants : Ahmed Youssouf.

Combien de fonctionnaires ont bravé les interdits de la Présidence et se sont rués pour écouter à Balbala les ténors de l’opposition ?

Pendant ce temps, la majorité au pouvoir se déchire et se divise. Cette fois, les djiboutiens (y compris les cadres et les soldats de l’Armée) ont bien compris que le régime dictatorial est allé trop loin.

Les militaires ont saisi la balle au bond, cette fois. Ils an ont plus qu’assez de cette guerre larvée dont on ne voit pas l’issue.

Comme la population réclame de la modernisation et de la démocratie, le dictateur a sommé son Secrétaire général de convoquer « in extremis » un congrès pour inviter les militants du RPP à écouter ses âneries.

Mais de nombreux militants du RPP n’ont pas répondu à l’appel ni aux espoirs du dictateur. Tout simplement ils ont boudé cette fois. Mal préparé, la cérémonie au Palais du peuple ou dans ce qu’il en reste(*) n’a pas été un succès.

Le mal était fait !

La vidéo, montrant les traits empruntés de méchanceté et de cynisme du dictateur osant répondre froidement à ce jeune pour lui annoncer qu’il était mis à la porte de l’Académie militaire interarmes d’Arta, a fait le tour du monde.

Pour la petite histoire, sachez que les habitants d’Arta désignent plus volontiers cette école sous l’appellation « Académie de Kadra Haid » (**).

Revenons au congrès du RPP. Les cameramen de la RTD ont tenté l’impossible pour essayer de faire croire au peuple passé dans l’opposition, que la jeunesse se sentait proche du dictateur !

Âpres avoir salué quelques clampins de service, rémunérés pour la circonstance ainsi qu’une misérable troupe folklorique (les vrais artistes ont refusé de chanter à la gloire du dictateur – j’adresse un grand merci, en particulier à Aicha Bisleh et aux autres Awaleh qui ont dit non à IOG), le dictateur est arrivé au Palais dit « du Peuple », escorté par la Garde républicaine. A peine avait-il pénétré dans la salle que le dictateur a constaté que la salle était à demi vide.

Surpris, car cela ne lui était encore jamais arrivé, il s’est frotté les yeux.

Ses meilleures soutiens dont beaucoup de grands commerçants avaient décliné son invitation, accompagnée d’une aimable sollicitation à verser une contribution généreuse à la caisse du parti du Président dictateur.

Dans un geste de nervosité, un orateur a laissé tomber son chapeau. Le premier ministre cachait mal son inquiétude. Les ministres, les directeurs de cabinet ainsi que les conseillers techniques de ces mêmes ministres étaient là. Mais les femmes, à l’exception de quelques mamans qui ont perdu le sommeil et qui n’avaient rien à faire de mieux ce jour là, n’étaient pas non plus au rendez-vous.

La première dame, Kadra Haid, l’hystérique, cachait mal sa colère. Même l’épouse du premier ministre Dileita avait décliné l’invitation ! .

Après quelques chansons qui ont endormi le dictateur qui a d’autres soucis en tête, comme c’était à prévoir, la réalité a été connue de la population.

Ce congrès du RPP a été un désastre et jugé comme tel par l’ensemble de la population. Le décalage entre les rêves de la caste héritière du colonialisme et les aspirations légitimes du peuple pour de meilleures conditions de vie, se reflète dans l’abime qui sépare la vie du Palais présidentiel et la misère galopante qui harasse les seconds.

Les dégâts touchent maintenant toutes les sphères de la société civile. Le destin de tout un peuple a été embarqué de force dans cette galère politique, au petit bonheur la chance. La trinité règne : un seul homme, un seul parti et un seul journal.

Le Président de la République, Chef du Gouvernement est aussi le chef du parti au pouvoir. Il tient sans partage la place de l’homme fort à la tête de la trinité.

l’activité de la caste dirigeante est limitée désormais à tenir un congrès sans contenu. Une sorte de grand messe du parti pro-gouvernemental au cours de laquelle le chef du parti RPP prononce un discours où il présente un bilan aussi positif que maquillé d’illusions, et tout le monde (enfin les présents) applaudit.

Ensuite quelques personnes se succèdent a la tribune officielle pour rivaliser de flagorneries envers l’action du Président et de son équipe, sous les applaudissements frénétiques, quasi mécaniques des militants figurants.

Puis le dictateur Président prononce un nouveau discours solennel dit de clôture, remerciant ses partisans et promettant la poursuite d’une politique dont le succès (à ses seuls yeux ?) est confirmé dans les faits !.

Comme on ne change pas une équipe qui perd, non pardon, une équipe qui gagne pardon parce qu’elle perd le soutien populaire, ces dirigeants rppistes n’ont plus qu’à attendre les prochaines échéances électorales pour se faire réélire automatiquement, alors que la population boude massivement les urnes depuis 2003.

Quand au roi fainéant (IOG), l’adepte du moindre effort et du maximum de profits, il se contente, au gré de ses fantaisies, de provoquer un remaniement technique dans son équipe.

Quand un ministre décéde, il est aussitôt remplacé par un membre de son ethnie, le plus en vue dans la hiérarchie des valeurs créée par le système. Des alliances se nouent pour contrer les sourdes tensions qui secouent les ténors de la majorité au pouvoir.

Les ténors du parti au pouvoir suscitent de faux problèmes pour s’occuper. Des alliances de circonstance se font et se défont sous le regard tantôt amusé, tantôt inquiet du Président dictateur

De temps en temps , le roi fainéant met la main « à la pâte » qu’il sait modeler grâce à un savoir-faire hérité de son oncle et des anciens colons.

Quand l’argent des pays donateurs arrive à Djibouti, il est aussitôt confisqué et placé en sécurité, sans que la population nécessiteuse n’en voit jamais la couleur. Le sevrage progressif de cet enfant gâté (IOG) qui, dans les bras de l ex-mère patrie, continue a pisser sur tout le monde, quand il s’agit de téter le sein. la République de Djibouti est baladé d une salle d’attente à une autre.

Tout ce que le RPP sait faire à Djibouti, c est maintenir l’ordre public par la force. Cela, ils savent le faire car ils ont été formés à l’école coloniale.

Le gouvernement paresseux traîne les pieds. Pour bouger il aurait besoin d’un bon coup de pieds dans le derrière. La mine d’or qu’exploitent certains des serviteurs est menacée de fermeture. Comme rien n’a été préparé, on improvise sans arrêt. Au pied levé, on nomme tel ou tel fonctionnaire qui sera affecté à plein temps dans une Administration dont il ignore absolument tout du fonctionnement et des enjeux.

Il préside des réunions mais sans savoir ce qui se passe ni ce qui se dit. Son rôle est d’occuper les hôtes. L’émigration de la classe moyenne à l »étranger (Belgique-Canada) laisse un grand vide de capacité et de compétences. Et le phénomène s’amplifie. Pourtant chacun connaît le sort qui l’attend à l’étranger , surtout en Europe où trouver un emploi, même sous-qualifié est un exploit !

Nos compatriotes entrent dans le circuit infernal de l »assistanat, avec peu d’espoir d’en sortir un jour. C’est la réalité pour les premières générations, tandis que les secondes ont une chance de s’assimiler.

Au final , cela représente pour le pays, une perte immense en ressources humaines et en compétences. De plus, le temps, où les émigrés rapatriaient les économies, est révolu.

Au pays, c est le sauve-qui-peut, qui est devenu la règle. Certains se réjouissent lorsqu’un parent décroche le statut de « réfugié politique » ou à défaut « économique ».

S’il peut se débrouiller à l’étranger, ce sera une bouche de moins à nourrir. Il faut mieux se rappeler à l’ordre qu’échanger des sourires hypocrites en nous berçant d’illusions. Nous le disons autant pour les dirigeants, triomphalistes sans raison, que pour tous les opposants qui sombrent dans les excès du désespoir.

Le pouvoir attend que les bailleurs de fonds déversent des subventions. Mais l opposition djiboutienne se complaît dans l’expectative, espérant seulement que l’action des Chevaliers au service des Droits de l’Homme, provoquera l’aleternance, qu’ils appellent de tous leurs voeux, mais sans agir véritablement.

Un proverbe djiboutien dit << billawe an xaraago lo sidan lama helo marka ay hawli ku badho >> ce qui signifie en langue française que << un poignard que tu n'arbores pas en guise de parure, te fera défaut en cas de besoin>>.

C’est dans ce trou noir que survient le congrès du dictateur alors que la population se débat dans la misère la plus totale.

Le monde libre souffre d’un handicap structurel, une psychorigidité qui l’empêche d’évaluer objectivement le sort dramatique des pauvres africains. Tant que l’Occident n’aura pas soigné son propre traumatisme, il demeurera paralysé face aux souffrances des peuples dans le monde entier. Un proverbe célèbre le dit « celui qui a fait un naufrage tremble devant les flots tranquilles ».

Sergent-Chef Ariko
Gendarmerie nationale – Escadron présdentiel
Camp Barkat Siraji,

aujourd’hui transformé en Université
par un dictateur dépourvu de coeur et de toute raison.


(*) Souvenez-vous que l’autre moitié du Palais du Peuple a été incendiée par les Services du SDS après qu’un jeune Gadaboursi ait osé traiter le dictateur et son premier ministre de clowns, lors du séminaire censé réconcilier le Dictateur avec le peuple.

Le jeune avait été arrêté aussitôt par les militaires de la Garde républicaine sous les ordres du berger Colonel Mohamed Djama Doualeh et conduit à l’école de Police Idriss Farah Abaneh.

(**) Dans un prochain article, je reviendrai sur les causes profondes de la déstabilisation des militaires.