18/06/10 (B556) Le Journal de la Flibuste (3 articles en Français)
_____________________ 3 – Jeune Afrique
Au port d’Eyl, la manne profite à tout le monde
Aujourd’hui, c’est la capitale mondiale de la piraterie – une ville inondée de dollars et d’armes, d’hôtels et de restaurants construits avec l’argent des rançons. À en croire le rapport du Groupe de contrôle sur la Somalie, remis le 10 mars au Conseil de sécurité des Nations unies, la répartition des rançons fait l’objet d’un véritable « business model ». Tout le monde « en croque », mais pas dans les mêmes proportions.
Les moins bien servis sont les villageois qui, sur terre, fournissent matériel, hébergement et nourriture ;: ils sont payés comme de simples prestataires de services. Viennent ensuite les miliciens qui attendent, sur la côte, l’arrivée du navire capturé pour en assurer la sécurité ;: ils perçoivent une rémunération fixe. Suivent les pirates (entre huit et douze à chaque équipée), recrutés seulement s’ils possèdent une arme ;: ils ont droit à un pourcentage de la future rançon – d’un montant moyen de 15 ;000 dollars. Les mieux lotis sont les investisseurs qui ont financé l’opération ;: ils touchent 30 % du butin plus le remboursement des frais.
Le mythe de Robin des Bois qui redistribuerait les gains a fait long feu. Cependant, la manne des rançons fait vivre bon nombre de Somaliens ;: les familles des pirates, mais aussi les commerçants, les vendeurs de voitures, les maçons…
De quoi faire rêver la jeunesse : « De nombreux étudiants arrêtent leur scolarité pour se rendre à Eyl car ils voient comment leurs amis se sont fait beaucoup d’argent », expliquait le ministre de la Pêche du Puntland, Abdulqaadir Muuse Yusuf, dans les colonnes du Guardian en 2008.
_____________________ 2 – Malango-actualités
L’opération Atalante étendue jusqu’à Mayotte
Par Eric Trannois
Les 27 ministres des Affaires étrangères ont, lors de leur réunion mensuelle lundi à Luxembourg, approuvé la prolongation de l’opération européenne anti-piraterie EUNAVFOR Atalanta pour deux ans de plus, « jusqu’à décembre 2012 ».
Ils ont également approuvé son « accord pour une extension de la zone d’opérations » à la fois vers l’est, jusqu’aux Maldives et plus très loin de l’Inde, et vers le sud, vers la Tanzanie, Mayotte et Madagascar, « afin de réagir à l’élargissement du champ d’action des pirates ». C’est la seconde extension depuis le début de l’opération, en décembre 2008.
Les 27 ont également adressé une piqûre de rappel, en guise d’avertissement en direction de la communauté maritime internationale pour qu’elle insiste « davantage pour que les transporteurs se conforment strictement aux bonnes pratiques ».
Cette extension vers le canal du Mozambique était attendue, après deux attaques avérées ayant eu lieu dans la région, une au nord des Comores et une autre, dernièrement, au banc du Geyser, entre Mayotte et Madagascar.
A l’élément de base navale de Mayotte, on n’a pas « été saisi officiellement », mais Thierry Avice nous confie que l’information peut arriver d’un moment à l’autre. En revanche, on n’a aucune information sur les détails du mécanisme. « Qui va être dedans?, quels seront les moyens? ». En effet, l’agrandissement de la zone d’action d’Atalante ne peut être efficace que si les moyens mis à sa disposition augmentent.
Une chose est certaine, les forces françaises dans l’océan Indien vont être impressionnantes alors que la France va prendre la tête de l’opération Atalante, pour la première fois, à la fin de l’été. Nicolas Sarkozy a indiqué que le porte-avions français « Charles de Gaulle » serait déployé dans les prochains mois dans l’océan Indien. Le président de la République a, ainsi, confirmé que le groupe aéronaval de la Marine nationale partirait « avant la fin de l’année en océan Indien et dans le golfe Persique ». En dehors du porte-avions et de son groupe aérien embarqué, le groupe aéronaval compte des frégates de lutte antiaérienne et anti-sous-marine, un sous-marin nucléaire d’attaque et un bâtiment de ravitaillement.
Même si la mission principale du Charles de Gaulle sera orientée vers l’Afghanistan en appui aux troupes engagées en Afghanistan contre les talibans, cette présence imposante ne peut que modifier la donne dans ce lourd dossier de la piraterie. Le Charles de Gaulle peut atteindre 27 nœuds et parcourir plus de 1000 km en une journée et peut emporter jusqu’à 40 appareils qui ont un rayon d’action de plus de 1500 km.
______________________ 1 – AFP
Cinq ans de prison pour les premiers pirates somaliens jugés en Europe
De Nicolas DELAUNAY
Les cinq premiers pirates somaliens jugés en Europe ont été condamnés jeudi aux Pays-Bas à cinq ans de prison par le tribunal de Rotterdam (ouest) pour avoir attaqué un cargo dans le golfe d’Aden le 2 janvier 2009.
"La cour condamne les prévenus à une peine de prison pour une durée de cinq ans", a déclaré le président du tribunal Jan Willem Klein Wolterink, soulignant que "la piraterie est un fait punissable".
"Les prévenus sont allés en mer dans le but de détourner un bateau", a indiqué le président en lisant le jugement. "Ils ont attaqué le Samanyolu", a-t-il dit, ajoutant : "c’est une chance que personne n’ait été tué ou blessé".
Au prononcé de la peine, l’un des pirates, Sayid Ala Garaar, 39 ans, s’est exclamé : "les Pays-Bas n’aiment pas les musulmans, on le sait". "Ce n’est pas légal", s’est-il emporté, comentant le jugement.
"C’est très dur, c’est trop dur. Ils ne faisaient même pas partie d’une grande bande organisée", a commenté l’un des avocats de la défense, Reinier Feiner, en annonçant à l’AFP qu’il allait faire appel pour avoir "un procès juste".
"Le tribunal a tenu compte de certaines circonstances, comme le fait que la Somalie est très pauvre et qu’ils ont attaqué pour subvenir aux besoins de leurs familles mais c’est encore trop lourd", a estimé un autre avocat de la défense, Willem Jan Ausma.
Les Somaliens, âgés de 25 à 45 ans, étaient poursuivis pour piraterie pour avoir attaqué un cargo turc enregistré aux Antilles néerlandaises, le Samanyolu, à bord d’une embarcation rapide et munis d’armes à feu.
"Lors de l’attaque, ils ont tiré en direction du Samanyolu et de son équipage avec des armes à feu et un lance-roquette", a assuré le président du tribunal.
"La piraterie est une menace sérieuse au droit international de libre passage dans les eaux internationales", a-t-il estimé, soulignant que le manque de sécurité dans le golfe d’Aden avait des "conséquences économiques mondiales".
Une peine de sept ans de prison avait été requise le 26 mai par le parquet contre les cinq prévenus qui encouraient jusqu’à douze ans de prison. Leur procès s’était ouvert le 25 mai.
Interpellés par la marine danoise, ils avaient été remis aux autorités néerlandaises à Bahreïn. Transférés aux Pays-Bas le 10 février 2009, ils étaient depuis en détention provisoire.
Lors de la première journée d’audience, les cinq hommes avaient affirmé être innocents. Ils avaient assuré être des pêcheurs, victimes d’une panne de moteur, et avoir voulu demander de l’aide au cargo turc. Deux d’entre eux avaient toutefois reconnu avoir été en mer pour "détourner un bateau".
Deux cent quinze attaques ont été menées par des pirates somaliens contre des navires de la marine marchande en 2009 au large des côtes somaliennes, sur un total de 409 dans le monde, selon le Bureau maritime international (BMI).
Plus de 110 pirates ont été déjà été jugés au Kenya.
Six pirates somaliens ont été condamnés à mort le 18 mai au Yémen pour une tentative de détournement, qui avait fait deux morts, d’un pétrolier yéménite.