19/05/11 (B604) Omar Gabasse, co-représentant des réfugiés djiboutiens en Ethiopie et ancien réfugié lui-même, répond à l’auteur d’une caricature diffusée sur FaceBook. Il faut combattre IOG !

Cher Ablis,

La caricature est une manière d’exprimer son point de vue, sa façon de penser et de vouloir la faire partager.

Cependant je tiens à te dire que ta présentation est fort éloignée de la réalité.

Vouloir me travestir en passeur qui inciterait les candidats à l’immigration à affronter les mers pour venir en Europe – Voilà une idée curieuse, qui pourrait même prêter à sourire, si ce n’était la gravité des accusations qui se cachent derrière cette caricature.

D’abord, n’oublions pas les supplices et les risques que des milliers de réfugiés, majoritairement africains affrontent pour quitter leur pays et surtout pour sauver leur peau quand ils sont menacés. Les ridiculiser de cette façon est déjà une insulte à ces malheureux qui n’ont pas eu ta chance.

Mais revenons aux réfugiés djiboutiens. Pour quelles raisons se sont-ils retrouvés en Ethiopie ?

Pour fuir l’offensive des milices tribales qui avaient pour objectif d’exterminer un maximum d’Afars en juillet 93. Ces réfugiés vivent toujours en Éthiopie (région 2 AFAR) et ils ne bénéficient d’aucune reconnaissance de la part des autorités concernées a savoir l’ARA (Organisme Éthiopien chargé des affaires des réfugiés ) et le UN-HCR.

Avec la recrudescence des exactions commises contre eux non seulement dans le nord de notre pays mais aussi en Erythrée, leur nombre augmente´de jour en jour.

Il me semble nécessaire de t’expliquer le problème des réfugiés AFAR Djiboutiens, car tu ignores, au moins partiellement, la situation. Et si j’utilise le mot AFAR, c est parce qu’à cette époque, il n’y a jamais eu de génocide organisé dans le sud (Ali Sabieh – Holl holl ). Ce sont les Afar qui et eux seuls qui ont été persécutés durant la guerre civile. Ils ont subi les massacres, les viols, les exécutions sommaires, les destructions de points d’eau, de cheptels et de centres de soin. On peut raisonnablement dire que le pays Afar a été détruit sur tous les plans : social, économique, culturel …

Cela tu le sais bien.

Ce qui a changé aujourd’hui, c’est que les persécutions, même si elles ciblent toujours les Afar, touchent maintenant le peuple djiboutien dans son ensemble.

Cela explique probablement l’émergence d’opposants politiques non issus de la communauté AFAR.

Les Djiboutiens ont compris (enfin ?) qu’il fallait vivre ensemble dans la dignité et le respect de l’autre et que la justice soit la même pour tous. Nous savons tous que cela est possible, car il y a une réelle volonté parmi la majorité des Djiboutiens, qui ont compris que les affrontements ethniques n’apportaient que de la pauvreté et de la douleur, sans aucune contrepartie positive. .ALHAMDOULILAH

Ces réfugiés Djiboutiens dont je suis le co-représentant avec mon ami Jean Loup Schaal et d’autres personnes qui préfèrent garder l’anonymat nous ont mandatés pour défendre leurs intérêts.

Ce n’est pas Dankalino qui m’a nommé !

Ayant été moi-même, l’un de ces réfugiés en Éthiopie durant des années, j’ai eu la chance d’être admis au programme de réinstallation au Danemark. Je dois cela à l’engagement d’une fonctionnaire courageuse, Madame Jacqueline Parleviet, qui, après avoir analysé mon dossier de six pages, a décidé de proposer mon cas et celle de mon ami Kassim, aujourd’hui présent avec moi au Danemark. Je suis donc un réfugié politique djiboutien (Baagiya lakqot maamatiyo).

Je suis retourné en Éthiopie (à Addis Abeba) en 2007, durant l’été. A cette occasion, j’ai pu mesurer l’ampleur du problème des réfugiés djiboutiens. A cette époque, et très probablement, avec la complicité de certains fonctionnaires du UN-HCR, le gouvernement éthiopien avait décidé de retirer le statut qu’il avait accordé auparavant à une vingtaine de familles, après une occupation pacifique des locaux du UN-HCR d’Addis, dont j’avais été l’instigateur.

Je suis revenu en Europe en août pour médiatiser leur problème. Je me suis adressé à tous les opposants politiques mais aucun ne m’a répondu, ne serait-ce que pour me proposer son aide. Heureusement, grâce à un ami, je suis entré en contact avec Jean-Loup Schaal (Président de l’ARDHD) qui a accepté de m’aider sans aucune hésitation.

Les résultats sont là. Nous avons d’abord réussi à faire revenir les autorités Éthiopienne et le HCR sur leur décision de rayer les 20 familles des bénéfices du statut de réfugié. Puis nous avons réussi à sortir des griffes judiciaires éthiopiennes, une jeune fille mineure violé et incarcérée pour un délit qu’elle n’avait pas sommis. Puis nous avons réussi à faire réinstaller 12 personnes en France. Aujourd’hui, elles se sont bien intégrées depuis leur arrivée, il y a plus d’un an. Nous avons aussi réussi à faire admettre plusieurs dizaines de personnes qui avaient fui Djibouti pour des raisons politiques, au titre de réfugiés.

Parmi ces personnes figurent d’ailleurs un ex-membre de l’ancien comité exécutif du FRUD. Il se reconnaitra !

Contrairement à ce que ta caricature suggère, je tiens à te dire que les réfugiés Djiboutiens ne sont pas des clandestins.

Ce sont des femmes, des hommes et des enfants qui ont été contraint de quitter leur pays pour survivre. D’ailleurs, ce ne serait pas dans la culture AFAR de s’exiler. Ils y ont été contraints par la force des armes.

IOG pense-t-il que chaque exécution d’un AFAR le rapproche d’Allah ? et qu’ainsi il pourra gagner le paradis ?

Comme tu le sais, Ami, lorsqu’un milicien tue un AFAR dans le nord comme dans le sud, il reçoit une décoration et il prend du galon. Il est félicité par les hauts-gradés de l’armée tels que Zakaria, le chef suprême (adjoint) de l’AND.

Aurais-tu jamais entendu parler d’un soldat qui aurait été condamne pour des crimes ou des viols commis dans le nord ? Cela n’est jamais arrivé. Cela ne veut pas dire que tous les Djiboutiens seraient concernés par ces crimes, cette injustice flagrante et ces immunités de circonstance.

Le véritable coupable, c’est IOG et les quelques extrémistes qui l’entourent.

C’est IOG qui encourage l’armée à se comporter ainsi. Il aurait pu tout aussi bien l’encourager à pratiquer la justice et la protection des civils, comme c’est en principe le premier rôle d’un armée digne de ce nom, commandée par des officiers loyaux.

Voila en résumé le problème des réfugiés Djiboutiens et je dis en résumé car il me faudrait plusieurs pages pour expliquer et pour décrire la situation …

Qu’est-ce que l’ADN (Afar Diaspora Network) ? Quel est son objectif ?

Network, c’est un réseau via les nouvelles technologies, si j ai bien compris.

Non, mon cher Ablis, on doit pas répéter les mêmes erreurs politiques. Soit nous luttons pour tous les Djiboutiens, sans distinction d’origine pour éradiquer le mal, soit nous optons pour la séparation.

Personnellement, je suis contre la séparation. Je suis favorable à l’instauration d’un Etat digne de ce nom où toutes les communautés auront leur place, leur rôle à jouer et leur avis à donner.

Un proverbe dit : « c’est en essayant encore et encore, que le singe apprend à bondir ». Il ne faut pas être intelligent pour comprendre cela, ni être polytechnicien. Nous voulons vivre dans un État démocratique où le peuple va choisir librement ses dirigeants au lieu de subir les caprices d’un gros parvenu qui extermine, qui affame et qui expulse les Djiboutiens de souche.

Je suis vraiment désolé pour le petit Charlie. Il parait qu’il a 25 ans et il va conserver des séquelles de son incarcération. Certainement, ils vont le torturer moralement et physiquement jusqu’à lui faire reconnaître qu’il a été mal conseillé. Il est vrai qu’il marque des points sur le terrain d’après mes informations. Il s’attache à aider les pauvres de Balbala et la population de l’arrière-pays, sur le plan social. Mais il n’a rien compris à la situation politique d’aujourd’hui comme mes amis du pal .

On doit combattre le dictateur IOG, pour l’expulser hors de Djibouti. Il n’est plus temps de mendier quelque poste ministériel de couverture.

Si IOG nommait 20 ministres Afar, croyez-vous que le peuple de Djibouti aurait une vie meilleure ? Qui pourrait encore croire que les ministres nommés par IOG travailleront pour les intérêts supérieur des populations ?

Un dernier clin d’œil pour Diltourab, car Charlie va être bientôt libéré (Inch Allah). IOG sait très bien qui est Charlie ! Mais le malheureux ne sera plus comme avant.

Vive l’Unité,
Vivent les Djiboutiens,
Vive l’opposition Djiboutienne

Omar Gabasse
Co-Représentant des réfugiés Djiboutiens