14/11/2011 (B630) Dans la série des interviews (presque) imaginaires, notre correspondant a pu rencontrer le Ministre djiboutien de l’intérieur: Hassan Darar Houffaneh. « D’abord démasquer les taupes … »

ARDHD : Monsieur le Ministre, nous tenons d’abord à vous remercier de nous avoir accordé cet entretien.

Hassan Darar Houffaneh : Mais c’est tout à fait normal. A mon niveau, je n’ai aucun à priori contre quiconque, qu’il soit journaliste, opposant, syndicaliste. Chacun est libre de s’exprimer librement et sans retenue à Djibouti, à condition de ne pas toucher aux intérêts nationaux de notre pays souverain, ni à sa famille régnante.

ARDHD : Nous avons souhaité vous rencontrer pour parler de cette rumeur concernant la dissolution possible de la LDDH.

H D H : oui un beau scandale ! Il y a des taupes dans mon ministère, des taupes malfaisantes qui me coupent sauvagement l’herbe sous les pieds, m’empêchant d’accomplir les ordres donnés par notre Chef infaillible.

Pensez donc ! Alors que j’étudiais toutes les possibilités de mettre un terme à cette officine sordide, à ce repaire de brigands frustrés qui avancent masqués derrière la noble bannière des Défenseurs des droits de l’homme, voilà que l’information était déjà publiée par votre site et aussitôt reprise par d’autre.

J’avais choisi le vendredi pour bénéficier de l’effet de surprise. Et pof ! l’information est officialisée avant même que j’ai pris la décision et choisi la meilleure voie pour la mettre en oeuvre.

ARDHD : la meilleure voie ?

HDH : oui, soit une décision de radiation administrative par décret de cette association demain en Conseil des ministres, soit une plainte en justice. Dans ce deuxième cas, c’est un peu plus compliqué, car bien qu’ils soient totalement soumis aux ordres de Sa Majesté, les juges demandent un minimum de preuves. Ca prend du temps pour les fabriquer. Il faut convaincre les faux témoins, trouver des faux tampons, ne pas se tromper dans les dates, … C’est faisable, mais on y perd un temps précieux. Et moi du temps, j’en ai très peu.

Notre maître m’a bien prévenu. Si je n’obtiens pas le résultat qu’il attend avant la fin de la semaine, c’est moi qui saute ! Et on me reprend ma belle voiture neuve de fonction, mon salaire et mes droits de tirage sur les affaires de corruption. Alors vous pouvez mesurer combien je suis motivé pour trouver la solution la plus rapide. Je risque de tout perdre en une seconde …

ARDHD : qu’allez-vous faire ?

HDH : d’abord chercher les taupes. Mon ministère est infiltré par la LDDH, c’est clair. Ils ont des agents secrets partout. Ce n’est plus une association, c’est une hydre qui gangrène notre beau système de gouvernement. Pensez ! Connaître mes décisions avant que je les ai prises ! Du jamais vu. Donc je dois démasquer les taupes en priorité.

ARDHD : et ensuite ?

HDH : ensuite, je leur tranche la gorge ! Non, je plaisantais, j’ai mieux que cela. J’appelle le SRD et ils se chargeront de les faire avouer. Au passage, j’ai noté que le SDS avait eu un moment de faiblesse … ils n’ont pas été capables d’anticiper le fait que mon ministère était infecté par les taupes. D’ailleurs je n’exclue pas le fait qu’elles y aient été placées par mon prédecesseur, ce cher Yacin Elmi, comme des bombes à retardement, uniquement pour me nuire. C’est bien son style.

Madame Kadra Haid m’avait
d’ailleurs bien recommandé de me méfier de lui, le jour où elle m’a donné ma feuille de route pour le mois de novembre. Quelle femme de tête et organisée par dessus le marché ! Ca c’est un homme, pardon, je voulais dire une femme de tête.

ARDHD : en dépit de ce que vous qualifiez de contretemps, comment allez-vous agir maintenant pour atteindre vos objectifs.

HDH : d’abord, je vais faire un communiqué qui sera repris par l’ADI, la RTD et La Nation, dans lequel je dirai, la main sur le coeur comme Obama, mon attachement solennel, convaincu et indéfectible à la cause des droits de l’homme et à ses ardents défenseurs.

J’ajouterai que je sais que rien n’est encore parfait en république de Djibouti, mais que je consacre les 2/3 de mon temps de travail journalier (*), ce qui est considérable aux droits de l’homme et à veiller à ce qu’on les bafoue plus intelligemment que par le passé.

Ensuite je ferai la différence entre d’un côté d’honnêtes défenseurs des Droits de l’Homme, à l’image, par exemple, d’Idriss Ali Arnaoud, le Président de la Chambre ou de Mohamed Aref, l’ancien membre repenti d’Amnesty et de l’autre ce petit groupe d’illuminés malfaisants qui composent la LDDH.

Cela expliquera pourquoi je propose la dissolution immédiate de la LDDH en Conseil des Ministres du mardi.

ARDHD : sur quels motifs ?

HDH : ce n’est pas cela qui manque et comme le disent nos grands amis arabes, « bats la LDDH tous les mardis, si tu ne sais pas pourquoi, elle le sait ! ». Tous les prétextes seront les bienvenus et j’ajouterai qu’elle a touché à l’intouchable, ce qui mettra un point final et sans appel à mon réquisitoire.

ARDHD : c’est un peu mince en effet ! Mais nous vous remercions de cet entretien fort instructif.

HDH : je suis rassuré que vous partagiez mon opinion. Vous voyez bien, alors que nous sommes en opposition dans la vie, que nous pouvons nous entendre sur les principes fondamentaux des droits de l’homme ….

ARDHD : hum ! Pas si sur !

(*) NDLR : estimation moyenne du temsp de travail effectif : 90 minutes par jour. Les 2/3 cela donne à peu près 60 minutes par jour !