07/05/02 Triste nouvelle sur RFI : Les États-Unis se retirent de la Cour Pénale Internationale

Les États-Unis
dénoncent leur signature du traité instaurant
la Cour Pénale internationale. Le projet ne sera donc
pas soumis au vote du Congrès. Ils ne veulent pas prendre
le risque de voir les soldats de leurs corps expéditionnaires
traduits devant une juridiction étrangère ou
internationale.

C’est
un coup sévère pour la Justice internationale,
mais ce n’est pas une surprise. Certes, parmi les partisans
d’une juridiction universelle, on attendait mieux d’un pays
démocratique et engagé dans la défense
des droits de l’homme comme les États-Unis

Mais depuis
la conférence de Rome, en 1998, Washington avait multiplié
les embûches, les pressions et les menaces pour faire
avorter ce projet. La signature américaine n’avait
d’ailleurs été enregistrée qu’à
la veille du départ du président Clinton de
la Maison-Blanche, le 31 décembre 2000.

Non seulement
cet accord de principe ne sera pas soumis à la ratification
du Congrès, mais la dénonciation même
de cette signature constitue un cas de figure inédit.
Selon un responsable américain cité par le New
York Times, le retrait du projet sommeillait dans les cartons
depuis plusieurs mois. Précisément depuis le
mois de septembre, date à laquelle son annonce a été
reportée en raison des attentats anti-américains
et des conséquences que l’on sait.

Isolationnisme
intenable

Les raisons des réticences américaines sont
bien connues. Les États-Unis manifestent une opposition
systématique à tout ce qui pourrait menacer
l’idée qu’ils se font de leur indépendance
nationale, c’est à dire, à tout ce qui
pourrait entraver leur capacité d’intervention
extérieure. C’est un point non-négociable.
Et, de fait, la compétence de cette CPI indépendante
des juridictions nationales, en poursuivant les criminels
de guerre, contre l’humanité et les auteurs d’actes
de génocide aurait pu entraver les opérations
de police internationales auxquelles se prêtent de plus
en plus volontiers les forces armées américaines.
Selon la Fédération Internationale des Droits
de l’Homme (FIDH), «les vieux réflexes subsistent
: on ne peut pas juger un citoyen américain autrement
que par une juridiction américaine. Il y a un refus
absolue de déléguer cette compétence
à une autre justice, qu’elle soit d’un autre
pays, ou internationale».

Cependant,
en agissant de la sorte, les Américains savent qu’ils
prennent le risque d’un isolement de plus en plus important
sur la scène internationale. Il est vrai que bon nombre
de «grands» pays n’ont pas ratifié
le texte portant création de la CPI. C’est notamment
le cas de la Russie, de la Chine, du Pakistan, de l’Inde,
d’Israël et de la plupart des pays arabes. Mais,
parmi les alliés de Washington, il existe un cercle
de pays-signataires, dits «vertueux», et notamment
parmi les Européens, dont il peut difficilement se
passer de l’alliance, surtout dans le contexte qui prévaut
d’interventionnisme massif.

Ainsi,
dans les milieux spécialisés, le pessimisme
n’est pas total. On indique qu’à terme, avec
l’arrivée de nouveaux signataires, l’isolationnisme
américain en la matière deviendra intenable.

Le retrait
de la signature américaine intervient moins d’un
mois après la ratification du traité de Rome,
le 11 avril dernier, par un soixantième parlement,
ouvrant ainsi la voie à l’entrée en vigueur
de la CPI, le 1er juillet prochain.

GEORGES
ABOU
06/05/2002