27/06/06 (B356_B) Le Monde : L’enquête sur la mort du juge Borrel relancée

Des empreintes génétiques qui pourraient appartenir aux assassins du juge français Bernard Borrel, tué en 1995 à Djibouti, ont été découvertes sur le short retrouvé près du corps du magistrat, a annoncé, mercredi 28 juin, Me Olivier Morice, l’avocat de la veuve du juge.

Ces empreintes génétiques ont été identifiées par le docteur Olivier Pascal, pionnier de l’ADN en France et expert près la Cour de cassation, a-t-on précisé de même source, confirmant ainsi une information du quotidien Libération. « C’est une avancée considérable pour l’enquête. Nous savions déjà depuis plusieurs années que Bernard Borrel avait été assassiné, mais maintenant la justice est sur la piste de ses assassins et des complices », explique Me Morice.


Le corps immolé de Bernard Borrel avait été retrouvé le 19 octobre 1995 au bas d’une falaise à 80 kilomètres de Djibouti, devant l’île du Diable. Le magistrat était vêtu d’un slip et d’un tee-shirt. Son short et différents objets lui appartenant avaient été découverts sur les hauteurs de cette falaise, semblant accréditer la thèse d’un suicide, longtemps privilégiée par les autorités djiboutiennes et françaises.

Le docteur Pascal a découvert, lors de ses expertises, deux traces d’ADN inconnues sur le short du juge Borrel, l’une dans la poche avant droit et l’autre à l’entrejambe. « Au vu de la quantité d’ADN retrouvée », nous pouvons « exclure l’hypothèse d’un contact bref. Il faut envisager un contact long et [ou] un maintien avec force », explique l’expert, concluant que l’hypothèse « d’un transport du corps » était « en accord » avec ses observations.

THÈSE DE L’ASSASSINAT ACCRÉDITÉE

Aux yeux de la famille de la victime, ces travaux accréditent davantage encore la thèse de l’assassinat de Bernard Borrel, qui était coopérant français et conseiller technique auprès du ministère de la justice djiboutien. L’hypothèse du suicide par « autocombustion » avait été initialement privilégiée par la justice française mais, après plusieurs changements de magistrats et d’autres expertises, notamment médico-légales, c’est la piste criminelle qui est suivie.

Me Olivier Morice estime que le magistrat français a été victime d’un assassinat commandité par le pouvoir djiboutien, pour des motifs politiques liés à des découvertes faites par Bernard Borrel. Des témoignages d’opposants et d’exilés djiboutiens, dont la validité est contestée par Djibouti, laissent penser que le chef d’Etat actuel du pays, Ismaël Omar Guelleh, pourrait être impliqué.

Un ex-gardien de prison djiboutien a témoigné, en mai, devant la juge d’instruction Sophie Clément, pour raconter qu’un détenu, extrait le jour du crime de sa cellule, pouvait selon lui être impliqué dans l’affaire. Début 2005, le gouvernement français a livré à la juge Clément deux feuillets de documents secrets sur l’affaire, tout en gardant la confidentialité sur une quarantaine de feuillets.

Un nouvelle demande pourrait être prochainement formulée par la magistrate. Le dossier Borrel est important sur le plan diplomatique, Djibouti accueillant la principale base militaire française en Afrique.

Avec AFP et Reuters