08/05/08 (B446-B) A l’approche du 15ème anniversaire de l’exil pour les réfugiés djiboutiens, un lecteur nous envoie un article sur leur histoire et sur la situation actuelle de ces dizaines de milliers de familles qui ont été sacrifiées par Goueld puis par Guelleh au nom de leur orgueil et de leurs intérêts personnels. (Lecteur)

A l’occasion du 15ème anniversaire de l’installation des réfugiés djiboutiens sur le sol éthioipien (09 juillet 1993), il me semble important de retracer l’histoire de ces réfugiés, à la fois pour les jeunes générations, mais aussi parce qu’ils sont en grande précarité, en danger et en difficulté.

Lors de l’offensive générale des mercenaires à la solde du gouvernement djiboutien, dans le nord sud et le sud-ouest de la République au mois de juillet 93, plus de 100.000 combattants ont choisi l’exil vers l’Ethiopie et l’Erythrée pour fuir les exactions commises par les hordes enrôlées par Gouled et ses sbires.

Ces barbares venus d’Ethiopie et de Somalie n’avaient qu’un seul objectif : humilier et exterminer, sans crainte de sanction, les populations civiles locales. Les cas d’exécutions massives, de viols, de destruction de cheptels et de puits, de mise à sac de villages, de dispensaires et d’écoles se sont multipliés dramatiquement. Des preuves existent encore : photos, fosses communes, tombes, etc…

Le plus terrible est que ces hordes ont pu agir avec la complicité d’Ougoureh Kifleh, ex responsable important du FRUD, qui s’était déjà rallié en secret à Gouled et qui s’est comporté ensuite comme un traître.

Conspirateur, il est le principal responsable des défaites du FRUD (Front pour la Restauration, l’Unité et la Démocratie).

Il tient toujours sa récompense : puisqu’il a été nommé Ministre de la Défense et qu’il l’est toujours, bien que les Présidents et les Premiers Ministres aient changé.

Histoire des réfugiés djiboutiens.

Juillet 1993 .
En juillet 1993, plus de 80.000 personnes : femmes, enfants et vieillards se sont installés en Ethiopie, à Eli Daar, Manda et Aysaaita dans la région Afar.

Officiellement, la radio éthiopienne n’a admis qu’un nombre de réfugiés de 18.000, mais ses informations ne s’appuyaient sur aucun recensement. Elles étaient fort éloignées de la réalite.

Environ 40.000 autres réfugiés ont rejoint l’Erythrée et j’évoquerai ensuite leur histoire.

1°) Les réfugiés en Ethiopie

Grâce a la solidarité des Afar qui vivaient dans ces régions et en dépit des maigres moyens dont ils disposaient, les réfugiés djiboutiens ont été accueillis avec humanité.

Ni le HCR ni le Gouvernement éthiopien n’ont pris la mesure de la catastrophe humanitaire. En conséquence, rien n’a été organisé pour eux. Pas de structures d’accueil, pas d’assistance, pas de recensement ni de délivrance de titres de séjour de réfugiés.

Plus tard, certaines familles ont créé un Comité pour solliciter collectivement le statut de réfugiés et pour recevoir une assistance de première nécessité et en particulier une couverture médicale. Seules une vingtaine de familles a pu en profiter.

Vers la fin septembre 1993, le PAM (Programme alimentaire mondial) a débloqué des vivres qui ont transité par l’ARA (Organisme éthiopien pour les réfugiés), mais seule une petite partie a été distribuée aux familles djiboutiennes, en dépit du fait qu’un représentant de l’ARA se trouvait à Ayssaita.

Ces maigres allocations déjà amputées, n’étaient pas encore acquises en totalité !

En effet, le Préfet de la région, le Chef de la police et des officiers exigeaient leur part. Leur menace était de dénoncer les réfugiés qui refusaient de partager comme étant des membres actifs du FRUD afin de pouvoir les emprisonner et les torturer.

1995
une délégation du FRUD (bis) conduite par Ougoureh Kifleh, Ministre djiboutien de la défense, se rend en Ethiopie.

Une délégation, composée de 15 personnes tous anciens reconvertis après traîtrise du FRUD, est venue rendre visite aux refugies djiboutiens, pour leur proposer de rentrer au pays chez eux. Sachant que les mercenaires de Gouled continuaient à harceler les populations du nord, à violer les femmes et à tuer sans aucun scrupule, ils ont refus à l’unanimité les propositons de Kifleh et de sa bande.

1996
les USA ont donné l’asile à 16 familles .
Une centaine de personnes ont été contraintes de fuir la région 2 AFAR, en proie à un harcèlement permanent de la part des autorités régionales : Préfet, Chef de la police, etc.. Elles se sont réfugiées à Addis Abeba et ont tenté de se confondre parmi la population, tout en poursuivant des démarches auprès des institutions internationales, pour faire enfin reconnaître leur statut de réfugié et les droits afférents .

Grâce a l’intervention d’une ONG locale, 16 familles ont été autorisé à émigrer aux USA.

1997
Le Gouvernement éthiopien organise l’extradition des dirigeants réfugiés du FRUD et il les transfère à Djibouti.
En septembre 1997, les dirigeants du FRUD ont été extradés de force vers Djibouti.

Avec eux plus de 40 jeunes dont les noms n’ont pas encore été révélés ont été aussi renvoyés à Djibouti.

Cela a créé la panique et un sentiment d’insécurité chez tous les réfugiés djiboutiens qui vivaient dans la région Afar.

Par précaution, la majorité des refugies se sont éparpillés sur tout le territoire en s’éloignant autant que possible de la Région AFAR où ils étaient en danger. Nombreux ont rejoint Bate, Dessie, Combolcha et Addis Abeba où ils étaient difficiles à localiser.

1998
Trois autres familles obtiennent l’asile aux USA, sept en Nouvelle Zélande.
La même année une vague d’arrestations de plusieurs refugies djiboutiens qui ont pu être libérés ensuite.

Fin 1998
Sur les conseils d’un responsable du HCR, qui leur a confié que l’ARA ferait tout son possible pour empêcher l’enregistrement des réfugiés djiboutiens par son organisation, quinze familles ont tenté de franchir la frontière kenyanne.

Interceptés à la frontière, ils furent emprisonnés pendant un mois avant d’être renvoyés en Ethiopie.

2000
Une parodie de rencesement a été organisée dans la région 2 AFAR. Entre l’information et la date limite, le temps était si court que les milliers de réfugiés éparpillés sur de très grandes surfaces n’ont pas été prévenus ou n’ont pas eu le temps d’arriver.

Officiellement, 13.000 réfugiés djiboutiens ont été rapatriés.

Décembre 2000.
Vingt familles qui avaient opté pour une occupation pacifique des locaux du HCR ont finalement obtenues le statut de réfugiés et les aides correspondantes : un petit pécule mensuel et une assistance médicale.

Mars 2007
Les réfugiés djiboutiens donnent officiellement mandat à Jean-Loup Schaal et à l’ARDHD pour les représenter à l’étranger et pour défendre leurs intérêts.

Mai 2007
Le HCR convoque les réfugiés enregistrés pour leur signifier qu’ils devaient retourner à Djibouti et que la prise en charge se terminait. Le refus de toutes les familles a été catégorique.

Décembre 2007
L’affaire Hasna. Fille d’un réfugié enregistré auprès du HCR, cette gamine de 12 ans avait été enlevée par un jeune éthiopien qui l’a séquestrée et violée pendant 17 jours. Pour qu’il échappe à la Justice, son Oncle, Officier de Police a fait incarcérer la fillette avec les adultes pour un vol à l’étalage. En plus du vol qu’elle n’avait pas commis, l’Officier de Police lui aurait fait avouer (sous la menace ?) qu’elle était plus âgée (majorité pénale), mariée, avec une autre identité et une autre adresse.

L’affaire fortement médiatisée en France et en Europe et la pression du HCR ont finalement contraint les autorités éthiopiennes à la relâcher en Février 2008.

2°) Que sont devenus les refugies qui sont installés en Erythrée ?

La majorité des jeunes a été enrôlée de force dans l’Armée érythréenne.

Certains ont déserté, d’autres sont toujours militaires. Face à cette situation et aux conditions de l’accueil, les femmes et les enfants sont passés en Ethiopie où ils ont contribué à accroître le nombre des réfugiés.

3°) La situation à ce jour.

Les vingt familles inscrites vivent toujours dans la peur :
– peur d’être extradées sans avertissement ni alternative vers Djibouti,
– peur que le HCR ne leur coupe les maigres revenus.

Les milliers de familles non enregistrées attendent et espèrent toujours l’enregistrement auquel elles ont droit et les maigres secours associés.

Chaque famille espère pouvoir quitter l’Ethiopie où elle se sent mal à l’aise et en permanent danger pour pouvoir s’établir de façon pérenne et stable dans un pays d’accueil.

Il semble qu’il y ait quelques ouvertures avec des pays occidentaux, mais les places sont rares ….

Les malheureuses familles, victimes, au fond, de la dictature djiboutienne et de la traîtrise de certains éléments du FRUD, ont été sacrifiées au nom de l’intérêt personnel des dictateurs djiboutiens qui se sont succédés.