25/10/2011 (B627) Dans la série des interviews (presque) imaginaires, un représentant de l’ARDHD a rencontré Guelleh, à sa demande, dans sa résidence d’Arta. Il lui a fait part de ses états d’âme, en toute transparence … Bof ! au final, rien de changé …

Il y a quelques heures, nous avons été fort surpris de recevoir un appel d’Hassan Saïd qui nous a demandé de nous rendre de toute urgence à la résidence présidentielle d’Arta, car le Président Guelleh souhaitait nous accorder une interview.

Nous avons demandé des garanties avant d’accepter que l’un de nos correspondants sur place se rende à cette convocation officielle. D’abord la garantie qu’il ne serait pas arrêté sur place, puis qu’IOG répondrait en toute transparence à toutes nos questions et enfin que nous serions autorisés à publier l’intégralité de l’entretien.

Hassan Saïd a répondu positivement à toutes nos demandes préablables, ce qu’il a confirmé en envoyant un Fax authentique.(*)

Notre correspondant s’est donc rendu le mardi 24 octobre à Arta où il a été accueilli courtoisement avant d’être introduit dans le salon de réception de la résidence de week end des Princes de Pacotilles.

ARDHD : Monsieur Guelleh, d’abord sachez que nous considérons cette invitation comme un très grand honneur. Il n’est pas fréquent de rencontrer en tête à tête, le grand prince de la Corne de l’Afrique, grand ami des plus puissants …

IOG : épargnez-moi la flagornerie, je vous prie, venons-en aux faits.

Comme le vous le savez, puisque vous l’avez écrit, j’ai décidé de prendre trois jours, non pas de repos, mais de réflexion et d’introspection.

Qui suis-je ? Où vais-je ?

Voilà des questions fondamentales, auxquelles il me faut des réponses rapidement. La mort dans des conditions honteuses, je devrais dire l’exécution sommaire et extrajudiciaire de mon vieux camarade et maître à penser, m’a totalement bouleversé.

Je savais que l’ingratitude de nos peuples était sans limite, mais de là à assassiner un dirigeant en exercice, plein de bon sens et qui justifiait d’une longue expérience … C’est un crime honteux que je condamne sans appel.

ARDHD : certainement, Monsieur le Président. C’est votre point de vue et nous le respectons. Mais au-delà de la tristesse que vous éprouvez, n’y aurait-il pas la peur que semblable tragédie ne vous arrive … ? Nous savons et vous le savez aussi, même si vous faites semblant de l’ignorer, que la population dans sa grande majorité vous rejette, vous et votre épouse, d’abord parce qu’elle a perdu confiance dans les promesses que vous n’avez jamais tenues et aussi parce que les salaires de la fonction publique ne sont plus payés avec régularité, que l’armée est entrée dans une période de contestation et que la police se pose des questions avec la tentative d’assassinat de son patron … Alors, avez-vous peur de la fin de votre régime, oui ou non ?

IOG : un homme qui n’a pas peur est un homme mort !

J’ai toujours eu peur et c’est pourquoi je suis encore en vie. J’ai eu peur de tous mes concitoyens, de mes responsables de la sécurité et de la défense, de mes ministres et aussi de ma femme. Pour conserver mes prérogatives, je n’avais pas le choix. Il fallait absolument qu’ils aient encore plus peur que moi.

Comment leur faire peur ?

Il n’y a pas trente-six moyens. Il faut en tuer quelques uns, provoquer des attentats contre d’autres mais sans les tuer, mettre au placard la troisième catégorie et faire disparaître sans même laisser la moindre trace, la dernière catégorie. A ce petit jeu, je suis le meilleur. La trouille, ils ont tous la trouille : mes ministres, mes directeurs, mes chefs de corps et surtout le peuple. Ils viennent à mes convocations, la peur au ventre.

C’est aussi, quand les leaders de l’opposition, même s’ils habitent à l’étranger, ont peur de parler ou qu’ils n’ont plus rien à dire : là, je prends du plaisir. Une jouissance considérable…

Alors je sais que j’ai gagné et que je suis le plus fort parmi les plus fortiches.

ARDHD : c’est une méthode en effet. Mais elle semble avoir atteint ses limites aujourd’hui. Les étudiants, les chômeurs, les universitaires, les retraités, pour ne citer qu’eux, ont bravé la peur et ils viennent hurler leur colère et leur désespoir sous vos fenêtres.

Votre Colonel Berger de la garde républicaine n’est pas intervenu. Le chef de corps de votre police a été pris de malaise dans sa voiture. C’est vrai qu’ils réchappent respectivement d’une grande peur, puisqu’ils ont failli mourir l’un et l’autre. Alors sur quel registre nouveau, allez-vous jouer ce deuxième acte ?

IOG : pourquoi croyez-vous que j’ai pris trois jours de réflexion à Arta sans la Paulette, comme vous l’appelez ? Entre nous, elle déteste que vous l’appeliez comme cela et vous me faites bien rire. Elle pique des colères à chaque fois qu’elle voit le nom de Paulette …. Je me moque d’elle et cela l’énerve encore plus : ça met de l’ambiance à Haramous où sinon je m’ennuierai à mourir.

Pour revenir à votre question, c’est vrai que je dois trouver de nouveaux axes pour ma politique, car sans cela, il ne me reste plus qu’à démissionner.

Aujourd’hui, je ne suis pas le dos au mur, car j’ai le choix.


Partir la tête haute, en laissant le « bord… » pardon pour ce terme grossier, aux autres et m’installer confortablement dans un pays qui saura reconnaître mes qualités et mon immense fortune (la 5ème d’Afrique, je vous rappelle).
Mais c’est dur pour mon amour propre.

Ou rester et combattre ce peuple d’ingrats jusqu’à la mort glorieuse, comme mon excellent ami, vient de le faire …

J’avoue que je suis partagé et j’aimerais bien avoir votre sentiment. Que feriez-vous à ma place ?

ARDHD : nous ne sommes pas à votre place. Nous n’avons tué personne et nous n’avons pas volé d’argent à qui que ce soit. Pour nous et vous le savez, vous n’êtes qu’un dictateur lamentable, en fin de carrière et l’avenir est sombre si vous persistez à vous maintenir au pouvoir.

Vous devez partir rapidement, car vous n’avez plus beaucoup de temps devant vous. Sinon effectivement, la fin peut-être terrible, quand la foule devient tellement hostile, qu’il n’est plus possible de la contrôler et que les forces de sécurité refusent de tirer sur leurs enfants, leurs épouses et leurs parents.

IOG : vous avez peut-être raison, mais le problème, si je partais, c’est que je devrais emmener la Paulette puis la supporter à longueur de journée dans l’exil. Vous me voyez, remorquant la Paulette accrochée à mes basques du matin jusqu’au soir ?

C’est cela qui m’arrête. Elle est odieuse et méchante et elle est devenue acariâtre avec l’âge… Elle me casse les oreilles avec ses récriminations interrompues. L’argent elle en a ! Le pouvoir, elle me l’a pris ! Qu’est-ce qui lui faut de plus ! Non ce n’est pas possible…

ARDHD : ca dépend de ce que vous préférez. Finir votre vie avec la Paulette ou finir lynché par la population ?

IOG : ce n’est pas un choix cela ! L’un est aussi terrible que l’autre ! Finalement, et c’est uniquement pour éviter d’avoir à supporter la Paulette, je crois que je vais faire le choix de m’accrocher au pouvoir. Tant pis, pour ce que mes ennemis me feront. Mais à tout prendre je préférerais me suicider avant.

ARDHD : attendez, vous avez oublié la troisième voie. Celle qui consisterait à restaurer les libertés, à provoquer des élections libres et démocratiques, à jeter vos hyènes et à les remplacer par des hommes compétents, sans aucune préférence tribale ou autre. Celle de reconstruire le pays avec des hommes intègres et motivés.

Ouvrir le pays au multipartisme, autoriser les media d’opposition, rendre l’argent volé, rendre à la Justice son indépendance, supprimer toute forme de censure, … Il y aurait beaucoup à faire et vous retrouveriez rapidement une nouvelle jeunesse.

Les subventions reviendraient et aussi les investisseurs sérieux. Le chômage diminuerait et la santé et l’éducation se remettraient à fonctionner pour le bien de toutes et de tous. Pourquoi négligez-vous cette voie ? Sans oublier la dissolution immédiate du SDS et de la G.R. ..

IOG : à mon âge, on ne se refait pas. J’ai pris goût à l’asservissement de mes concitoyens, qui se prosternent avec respect, aux cris des suppliciés dans les casernes, aux supplications des familles de victimes auxquelles je réponds avec délectation par le plus grand mépris …

Je ne pourrais pas supporter que l’on puisse me contredire un jour, s’opposer à mes décisions, critiquer mes actes, comme un vulgaire président européen, qui est souvent la victime des flèches lancées par son opposition ….

Non, je ne changerai pas et je resterai à mon poste.

Que ceux qui espéraient mon départ, rentrent chez eux en silence et sans manifester, car la Garde républicaine s’occuperait d’eux avec toute la fermeté requise …

ARDHD : Une dernière question si vous le permettez : pourquoi avoir choisi l’ARDHD pour exprimer vos états d’âme aujourd’hui, alors que l’ARDHD est censuré par vos services dans le pays ? L’ADI ou la RTD auraient diffusé plus largement vos messages, plutôt les états de votre confusion actuelle … !

IOG : La censure de nos jours ne sert plus à grand-chose. Vous le savez. Elle retarde la diffusion des idées et des textes, pendant quelques heures, mais les idées finissent toujours par se propager et par être diffusées à la population.

Si je maintiens la censure, c’est pour que l’on ne me reproche pas un jour d’avoir été libéral.

Je suis un dictateur africain authentique. Je le revendique et je l’assume pleinement.

Après moi, vous constaterez la fracture, le désordre, les rivalités ethniques, civiles et sociales. J’ai bien miné le terrain pour que l’on me regrette. Dans moins d’un an, on commencera à regretter les Ben Ali, les Moubarack et surtout les Kadhafi et on suppliera, ceux qui sont encore en vie, de revenir aux commandes ….

Synthèse : Un peu étonné par les difficultés psychologiques de notre interlocuteur, nous nous demandions, s’il était possible d’affirmer que si Guelleh restait au pouvoir, il fallait en mettre la faute sur les épaules (larges ?) de RPP : la Reine Paulette de Pacotilles ? Probablement !

(*) Qu’est-ce qu’un fax authentique (pour les profanes) ? C’est un fax, une note ou un décret, dont on ne peut plus contester l’existence après coup, contrairement à certaines pratiques habituelles de l’ancien secrétaire de la Présidence ou de l’ancien Ministre de l’intérieur, qui avaient contesté l’existence même de notes dûment signées par eux et portant des numéros d’enregistrement chronologiques.