___________________ 2 – RSF
46e anniversaire de Dawit Isaac, emprisonné depuis 9 ans
Cest aujourd’hui l’anniversaire du journaliste Dawit Isaac, et c’est le dixième qu’il passe en prison. Pas de célébration familiale, pas de bougies ni de gâteau danniversaire, Dawit se retrouve, une année encore, seul, plus isolé que jamais, entre les murs étroits et insalubres de sa cellule, peut-être dans le bagne d’Eiraeiro, ou ailleurs. Nul ne le sait. En guise de cadeau cependant, Dawit peut compter sur la mobilisation des siens. Et sur celle de quelques organisations, comme l’Association mondiale des journaux (WAN-IFRA) qui vient de lui décerner, aujourd’hui, le “2011 Golden Pen of Freedom”.
Il y a neuf ans, lorsqu’il a été arrêté à Asmara, il nimaginait certainement pas quil serait encore en détention le jour de ses 46 ans. Il pensait sûrement que son innocence aurait été prouvée depuis longtemps. Innocent, mais de quoi ?
Les raisons de sa détention demeurent à ce jour inconnues. “C’est un traître à la solde de l’Ethiopie”, nous disent les autorités érythréennes. Son crime ? Avoir simplement reproduit dans le quotidien désormais disparu Setit, une lettre de ministres et de généraux appelant à la démocratisation de l’Erythrée. Il pensait aussi sans doute que sa double citoyenneté, érythréenne et suédoise, le protègerait de larbitraire et de linjustice qui règnent dans son pays natal. Pourtant, le gouvernement suédois, qui affirme entretenir une “diplomatie silencieuse” avec lErythrée, reste inefficace.
Son frère, Esayas Isaac, refuse, lui, de rester silencieux. Il se mobilise en Suède, mais aussi à travers l’Europe, pour alerter lopinion sur le sort du journaliste et tenter de faire agir le gouvernement suédois. Avec la section suédoise de Reporters sans frontières, représentée par Björn Tunbäck, il a organisé aujourd’hui une conférence à luniversité de Göteborg, où étaient présents le Club national de la presse suédois, lAssociation de politique étrangère de l’université de Göteborg, et lancien Premier ministre Ingvar Carlsson, qui sest depuis longtemps illustré par ses positions contre la diplomatie silencieuse du gouvernement suédois. Carin Norberg, responsable du Nordic Africa Institute, ainsi que le journaliste érythréen en exil Meron Estifanos, ont également pris la parole.
Esayas Isaac et Reporters sans frontières nont de cesse dinterpeller la Suède et les autorités européennes dont ils dénoncent la passivité et le manque dinitiative. La semaine passée, ils ont présenté ensemble, en Suède et devant le Parlement européen à Strasbourg, un avis juridique sur lobligation positive issue du droit international qui contraint la Suède et l’Union européenne à tout faire pour garantir la protection du journaliste.
Plus dinformations : http://fr.rsf.org/erythree-le-frere-de-dawit-isaac-et-18-10-2010,38564.html
Ambroise PIERRE
Bureau Afrique / Africa Desk
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___________________ 1 – Wan IFRA
Un journaliste suédo-erythréen remporte la Plume dor de la liberté 2011
La Plume dor de la liberté 2011, le prix annuel de la liberté de la presse remis par lAssociation mondiale des journaux et des éditeurs de médias dinformation (WAN-IFRA), est décernée à Dawit Isaak, le fondateur du premier journal indépendant érythréen emprisonné depuis neuf ans sans chef dinculpation ni procès.
Dawit Isaak, citoyen à la double nationalité suédoise et érythréenne, a été incarcéré en septembre 2001 suite à la fermeture des médias indépendants en Érythrée, un des pires pays au monde au point de vue de la liberté de la presse. Le pays na pas de médias privés : ni journaux, ni radios, ni stations de télévision.
Dawit Isaak, qui vient davoir 46 ans ce mercredi 27 octobre, na officiellement été accusé daucun délit et lincertitude demeure sur le lieu de sa détention.
« Dawit Isaak, qui avait été contraint de fuir son pays pour la Suède, mais était retourné plus tard en Érythrée en raison de son attachement aux principes démocratiques et à une presse indépendante, mériterait dêtre félicité pour ses actions. Le gouvernement érythréen, comptant parmi les plus répressifs au monde, a cependant choisi de lemprisonner », a déclaré le conseil dadministration de la WAN-IFRA lors de la proclamation du prix.
« Dawit Isaak a été confronté à de rudes épreuves, mais son engagement pour la liberté de la presse et les droits de lhomme na jamais faibli. Dans de telles conditions, il faut faire preuve dun grand courage pour travailler comme journaliste et ne pas faire de compromis. Dawit Isaak est une source dinspiration pour la presse du monde entier », ajoute le conseil dadministration.
La WAN-IFRA exhorte le président érythréen, Issayas Afeworki, à libérer immédiatement Dawit Isaak.
La Plume dor de la liberté est décernée chaque année par la WAN-IFRA pour récompenser laction remarquable dun individu, dun groupe ou dune institution ayant particulièrement contribué par ses écrits et ses actions à la défense de la liberté de la presse.
Dawit Isaak a fui lÉrythrée en 1987 lors de la guerre dindépendance et est arrivé en Suède avec le statut de réfugié. Il est devenu citoyen suédois en 1992 après avoir travaillé pendant des années comme agent de nettoyage. Il est rentré en Érythrée en 1996 après laccès à lindépendance du pays.
Sattachant à développer la presse indépendante du pays, Dawit Isaak a co-fondé le premier journal indépendant, Setit, qui sest taillé une réputation à léchelle nationale pour son journalisme dinvestigation couvrant souvent les abus de pouvoir du gouvernement.
En 2001, après la publication par Setit et dautres journaux dune lettre ouverte rédigée par 15 ministres du cabinet qui réclamait des réformes démocratiques et une investigation des événements menant à une guerre récurrente entre lÉrythrée et lÉthiopie, tous les médias privés du pays ont été fermés. Onze sur les quinze ministres ont été arrêtés, ainsi que Dawit Isaak et 13 autres propriétaires de journaux, éditeurs et journalistes.
Aucun dentre eux na fait lobjet dun chef dinculpation ou dun procès. Dawit Isaak et les autres personnes arrêtées ont été qualifiés de traîtres. Selon les sources, parmi les journalistes détenus en 2001 quatre ont déjà trouvé la mort.
En 2008, selon certaines informations, Dawit Isaak aurait fait partie de 113 prisonniers politiques transférés dans une prison de haute sécurité à Embatkala, où les conditions de détention sont parmi les plus dures du pays. Il aurait été placé dans un hôpital militaire et malgré les dires du gouvernement assurant quil reçoit tous les traitements médicaux nécessaires, nous ne connaissons pas lendroit précis de son lieu de détention et navons pas de détails sur son état de santé.
Le gouvernement de Suède et les médias suédois ont entrepris de nombreux mais vains efforts pour faire sortir Dawit Isaak. Le gouvernement érythréen a clairement dit que sa double nationalité suédo-érythréenne était sans importance. « La Suède ne me concerne pas. Elle na rien à voir avec nous », a souligné le président Issayas Afeworki lannée dernière.
Le président a également déclaré quil nétait pas prévu de libérer Dawit Isaak ou de lui accorder un procès avec un chef dinculpation officiel. Les déclarations du président faites au cours dune interview diffusée en mai 2009 ont soulevé de nombreuses critiques à léchelle internationale lorsquil a mentionné : « Nous ne lui accorderons jamais un procès et nous ne le relâcherons jamais. Nous savons parfaitement comment traiter les gens de son espèce. »
LÉrythrée est un pays à parti unique gouverné par le président Issayas Afeworki depuis quil a acquis son indépendance de lÉthiopie en 1993. Le pays na jamais connu délections libres. Deux tiers de la population dépendent de laide humanitaire de létranger pour se nourrir.
LÉrythrée est le plus grand geôlier de journalistes en Afrique avec au moins 19 dentre eux en prison. Dautres ont été contraints de fuir leur pays. En raison de la politique répressive de son gouvernement, lÉrythrée est un pays qui parvient à se soustraire à la surveillance internationale et dont la population na pratiquement aucun accès aux informations indépendantes. La poignée de correspondants étrangers résidant dans la capitale Asmara fait lobjet dune intense observation de la part des autorités.
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Parmi les précédents lauréats de la plume dor de la liberté décernée chaque année depuis 1961, citons Jacobo Timerman dArgentine (1980), Anthony Heard dAfrique du Sud (1986), Doan Viet Hoat du Vietnam (1998), Geoffrey Nyarota du Zimbabwe (2002), Shi Tao (2007) et Li Changqing (2008) de Chine. Le lauréat 2010 était Ahmad Zeid-Abadi of Iran.
La liste complète des lauréats est publiée sur http://www.wanpress.org/pfreedom/goldenpen.php
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La WAN-IFRA, basée à Paris en France et à Darmstadt en Allemagne, avec des filiales à Singapour, en Inde, Espagne, France et Suède, est lAssociation Mondiale des Journaux et des Éditeurs de Médias dInformation.
Elle représente plus de 18 000 publications, 15 000 sites Web et plus de 3 000 sociétés dans plus de 120 pays.
Lassociation est issue de la fusion de lAssociation Mondiale des Journaux et de lIFRA, lorganisation mondiale de recherche et de services pour lindustrie de la presse. Pour en savoir plus sur la WAN-IFRA, veuillez consulter le site http://www.wan-ifra.org ou lire le magazine de la WAN-IFRA à ladresse http://www.ifra.net/microsites/wan-ifra-magazine
Pour toute question, veuillez vous adresser à : Larry Kilman, directeur de la communication et des affaires publiques, WAN-IFRA, 7 rue Geoffroy Saint-Hilaire, 75005 Paris France. Tél. : +33 1 47 42 85 00. Fax : +33 1 47 42 49 48. Mobile : +33 6 10 28 97 36. E-mail : larry.kilman@wan-ifra.org