29/01/05 (B283A) AFRICATIME / Un «porte-avions» à l’entrée de la mer Rouge (sous la signture d’Adrien Jaulmes)

Ville-État
fondée en 1888 par la France à l’entrée de la mer Rouge,
Djibouti est devenue formellement indépendante le 27 juin 1977.

Mais
c’est l’armée française qui fournit toujours le soutien logistique
à la fête de l’indépendance djiboutienne, et le loyer des
bases françaises reste une importante source de revenus pour ce petit pays
de la Corne de l’Afrique.

Car
même si les effectifs ont fondu au fil des ans, la France maintient à
Djibouti sa plus importante garnison outre-mer, avec 2 850 hommes. Les trois armes
voient dans ce territoire une implantation stratégique irremplaçable,
aux confins de l’Afrique, du Moyen-Orient et de l’océan Indien, et un terrain
d’entraînement sans équivalent. La marine tient à garder l’usage
de l’un des plus beaux ports en eau profonde de cette zone stratégique,
l’armée de l’air à entraîner ses pilotes au-dessus des déserts
qui entourent la ville, et l’armée de terre à positionner des troupes
projetables sur tout le continent.

Les
rapports entre la France et ses anciennes colonies africaines n’ont nulle part
été aussi étroits qu’avec Djibouti. Et les accords de défense
signés au lendemain des indépendances, qui permettent à Paris
de conserver cinq bases sur le continent africain (Tchad, Côte d’Ivoire,
Sénégal et Gabon) ont fait de Djibouti un État à part.

Pour
Djibouti, la présence française est à la fois une garantie
de stabilité dans une région troublée, et l’une de ses principales
ressources financières.

Le
loyer de la présence française a été récemment
réévalué, et se monte à présent à 30
millions d’euros par an, versé au titre de l’utilisation des infrastructures
militaires françaises sur place. De surcroît la France verse dix
millions d’euros pour un hôpital militaire, et la consommation des unités
positionnées sur le territoire avoisine 40 millions d’euros.

Mais
depuis 2002, le tête-à-tête entre la France et les autorités
djiboutiennes a été rompu par l’irruption d’un nouveau partenaire
: installée dans un ancien camp militaire français, l’armée
américaine a fait de Djibouti l’une des principales bases de son nouveau
dispositif dans la lutte contre le terrorisme.

Outre
les revenus du port de commerce, par où transitent toutes les marchandises
à destination de l’Ethiopie, la contribution financière américaine
rend soudain l’ancienne métropole moins indispensable aux Djiboutiens.
Et au bout de trente ans d’une indépendance nominale, Djibouti est peut-être
en passe de revoir ses relations avec l’ancienne puissance coloniale.

Adrien
Jaulmes
[28 janvier 2005]