20/04/07 (B392 -A) REUTERS Les combats rendent peu à peu Mogadiscio inhabitable

Par Sahal Abdulle

MOGADISCIO (Reuters) – Confrontés aux pires combats qu’ait
connus Mogadiscio depuis plus de dix ans, ses habitants se demandent quand
les armes vont cesser de parler pour les laisser reprendre une vie normale.

Les combats de plus en plus violents opposant le gouvernement provisoire et
ses alliés éthiopiens à des combattants islamistes et
des membres du clan des Hawiye ont transformé en ville morte une partie
de la capitale somalienne.

« La vie est devenue insupportable », explique un chômeur,
Ibrahim Maalim. « J’entends encore des tirs sporadiques dans le nord de
la ville. Mogadiscio est en train de devenir inhabitable. »

Dans certains quartiers de la ville, les rues sont désertes, les enseignants
ont fermé les écoles et aucun bruit ne s’échappe des
maisons aux façades criblées de balles.

Plus de 200.000 personnes, soit un cinquième de la population de la
ville, ont fui par tous les moyens – âne, charrette, à pied ou
en voiture – depuis février, abandonnant des quartiers entiers à
des combattants qui se tirent dessus à la mitrailleuse, cachés
derrière des tas de sable.

Abdifatah Abdikadir pourrait bien rejoindre cet exode.

« A chaque fois que mes enfants entendent des coups de feu ou de grosses
explosions, ils viennent me supplier de les faire sortir de Mogadiscio. Même
ma femme s’y est mise », dit-il.

« Tout le nord de la ville est vide (…). J’y suis allé
hier, il n’y a pas de vie là-bas, c’est horrible. »

Plusieurs milliers de personnes ont choisi de dormir sous des arbres
à Afgoye, une localité située à une trentaine
de kilomètres au nord-ouest de Mogadiscio, plutôt que d’affronter
un jour de plus les tirs de mortier et les coups de feu.

La plupart des experts et des diplomates pensent que les violences vont aller
en s’intensifiant.

CATASTROPHE HUMANITAIRE EN VUE

Les islamistes, qui pendant six mois ont contrôlé la majeure
partie du sud de la Somalie avant d’être défaits par le gouvernement
et les forces éthiopiennes en tout début d’année, ont
juré de mener une « guerre sainte » contre les troupes étrangères.
Le président Abdullahi Youssouf, qui les qualifie de terroristes, a
juré quant à lui de les éradiquer.

Selon des ONG sur place, l’insécurité entrave la distribution
de l’aide d’urgence à ceux, nombreux, qui ont tout laissé derrière
eux dans leur fuite: maisons, biens et commerces.

Epuisés par leur exode, des centaines de Somaliens souffrent de diarrhées,
de choléra et d’autres maladies, et l’Onu met en garde contre une possible
catastrophe humanitaire.

La saison des pluies ne devrait pas arranger la situation. Ceux qui sont restés
dans des zones en proie aux combats seront exposés à des coupures
de courant, d’eau, à la hausse des prix sur les marchés et à
la peur constante de voir leur maison anéantie par une roquette.

« Une assiette de riz qui coûtait auparavant 5.000 shillings
(environ 50 cents américains) se vend maintenant 11.000 shillings »,
explique Maalim.

Même les habitants de la capitale qui ont tenu bon pendant les 16 années
d’anarchie consécutives au renversement du dictateur Mohamed Siad Barre,
en 1991, craignent pour l’avenir.

« Je n’ai pas vu grand-monde dans les rues ce matin », constate Ahmed
Abdikadir, un habitant du marché d’Al Barakah, où un obus est
tombé jeudi, dispersant les chalands.

« Il n’y a pas assez d’eau et les principaux marchés d’alimentation
sont fermés. Je ne sais pas comment nous allons survivre si la guerre
continue. »